Evangile



On peut placer l'évangélisation à cinq niveaux:
Quelques réflexions:
Qu'est-ce que l'évangélisation ?
Quelques principes p. 2
L’envoi des disciples (Luc 10)
Qu’est-ce que la mission ?  p.4
Évangéliser est plus large que baptiser p­. 6
Qu’est-ce que le Royaume de Dieu ? p. 7
Évangélisation et dialogue p. 8
Faire toute chose nouvelle p. 9
Claude POULLARD DES PLACES, missionnaire des pauvres p.10
Les défis de la mission en Afrique p. 11
On peut placer l'évangélisation à cinq niveaux:
- D'abord nous-mêmes. Non pas nous évangéliser nous-mêmes, mais nous laisser évangéliser par l'ESPRIT SAINT. Cela veut dire prier, méditer la Parole de Dieu et la mettre en pratique, et nous laisser conduire par le Saint Esprit dans toute notre vie
Nous laisser évangéliser par les autres. Ecouter les conseils. Participer à la vie de l’Eglise Formation (cours de Bible, Récollections…). Engagement dans les mouvements et groupes divers. C'est le travail en particulier des C.E.B (communautés chrétiennes de base). Paul nous le dit : "instruisez-vous, réconciliez-vous les uns les autres".
- Evangéliser nos frères chrétiens. Là aussi, cela se passe à 2 niveaux : personnel et communautaire. Comme Jésus nous le dit "si ton frère a péché, va le trouver seul à seul…s’il ne vous écoute pas, dis-le à la communauté » (Mat 18,15-17) ". Nous conseiller, nous soutenir les uns les autres, voir ensemble comment suivre le chemin de DIEU. Et en particulier bien sûr, former les catéchumènes, pour qu'ils connaissent et aiment JESUS CHRIST, et vivent avec LUI.
- Evangéliser les non chrétiens c'est ce dont j'ai parlé dans mon dernier article "quelle Eglise pour quelle évangélisation?"
- Evangéliser nos cultures: voir les documents : INCULTURATION ET EVANGELISATION DE NOS COUTUMES PAR LES CEB, INTERVENTION AU CHAPITRE GENERAL DES FILLES DU SAINT CŒUR DE MARIE et Rencontre avec la chorale de Nord-foire.

-Evangéliser notre société : voir les documents Justice et Paix.
Quelques réflexions: Evangéliser ce n'est pas parler, c'est agir. Comme JESUS qui prie son PERE toute la nuit. Qui ensuite commence par guérir les malades, à donner à manger à ceux qui ont faim, à libérer les gens en chassant les esprits mauvais. Et seulement ensuite, IL leur annonce la Parole de DIEU : qu’Il est le Sauveur, l’Eucharistie Pain de la vie, la libération des péchés… mais IL a commencé par libérer les gens. C'est dans ce sens là que le Pape François nous invite à agir, par exemple dans sa dernière lettre sur "la joie de l'Evangile". Quand les disciples de Jean Baptiste viennent voir JESUS, pour LUI demander s'IL est le sauveur, IL ne fait pas de discours. IL leur dit : » venez et voyez « ce que JE fais pour les pauvres et les petits (Luc 7,18-23).
Il nous faut donc dépasser les fêtes sans fin, la course à l'argent (khaware et concerts), les dépenses d'argent pour des choses inutiles, (tee shirts, casquettes), au lieu de nous en servir pour l'évangélisation de nos frères. Cela demande donc de mettre en place le troisième plan d'action pastoral dans ses quatre objectifs, pas seulement la communion et la sanctification. D'ailleurs, si tu n'es pas témoin de l'Evangile, prêts à dialoguer avec les autres et à accueillir ce qu'ils ont à nous dire (3°objectif : le témoignage), et si tu n'es pas capable de te mettre au service de tes frères pour leur rendre leur dignité, pour le développement du pays, pour la justice, la paix et la réconciliation (4° objectif), est ce que tu es chrétien?
Nous avons trop limité notre plan pastoral à la paroisse. Alors que JESUS nous demande de sortir de nous mêmes. JESUS nous dit bien "vous êtes la lumière du monde", pas seulement la lumière de L'Eglise. Et l'Eglise ne doit pas travailler pour elle-même, elle doit travailler pour le royaume de DIEU.
Evangéliser c'est aussi dialoguer et accueillir : admirer les bonnes choses que les non-chrétiens font, comme JESUS a admiré la foi de l'officier romain (Mat 8,5) : IL dit aux apôtres "je n'ai jamais vu une telle foi en Israël". Comme JESUS qui écoute la femme syrienne, qui lui dit " les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table" (Marc 7,26) Et JESUS va se tourner vers les païens grâce à cette parole. Comme IL a choisi la samaritaine, une païenne, pour aller enseigner ses frères (Jean 4).
Voici maintenant le compte-rendu d'une rencontre sur l'évangélisation.
Cette rencontre a été faite en deux langues : français et ouolof ; on ne donnera dans ce compte rendu que les idées principales. En effet, cette conférence a été faite également sous forme de dialogue avec tous les participants, grâce à deux micros baladeurs qui permettaient à chacun de s’exprimer et de se faire entendre par tous. Bien sûr, il n’est pas possible de reprendre ici les interventions de chacun, ni leur participation Voici simplement les notes prises par un participant.
N.B. : En réponse à la question : « Quelles sont les paroles de Dieu que vous connaissez qui parlent de l’évangélisation ? », les participants ont cité en particulier les passages suivants :
- une affirmation de Paul : « Malheur à moi si je n’annonce par l’Evangile » (1° Cor 9.16) ; le Seigneur ne m’a pas choisi pour baptiser, mais pour évangéliser (1° Cor 1.17)  Dieu veut que tous les hommes soient sauvés (1° Tite 2,4).
  • Jésus lui-même au moment de quitter cette terre disait à ses apôtres : « Allez enseigner toutes les nations » (Marc 16,15)
  • Le Concile Vatican II rapporte que : « l’Esprit Saint donne à tous les hommes de prendre part au Mystère pascal (de ressusciter avec Jésus Christ) d’une façon que Dieu Lui-même connaît ».
Quelques principes
  1. Jésus a dit : « Allez enseigner toutes les nations ». Il l’a dit, et il l’a fait lui-même en premier. Cela veut dire que l’évangélisation, c’est Jésus lui-même. C’est d’abord le connaître et l’aimer, ensuite vivre avec lui, enfin continuer son travail. C’est le Christ qui est le noyau et le centre de toute l’évangélisation. Si on ne vit pas avec le Christ on ne peut ni être évangélisé, ni évangéliser ses frères.
  2. L’Evangile, ce n’est donc pas un livre à connaître, ni des choses à enseigner, c’est une personne ; et c’est là l’une de nos différences avec les musulmans. Pour les musulmans, le texte est sacré et ils font des récitations du Coran. Pour nous, nous ne faisons pas de récitation de l’Evangile. Parce que ce n’est pas le texte qui est important, c’est Jésus, Jésus qui disait : « Je suis la Vérité, le Chemin et la Vie ».
  3. L’Evangile, c’est une Bonne Nouvelle. Le père Armel a alors demandé aux participants : quelle est la Bonne Nouvelle de l’Evangile ? Ensuite il leur a demandé de citer les phrases des Béatitudes qu’ils connaissent par cœur. En effet, ces Béatitudes, le Sermon sur la montagne, sont la base de l’Evangile, et le discours programme de Jésus-Christ. Cela veut dire que Dieu veut que nous soyons heureux ; toutes les phrases des Béatitudes commencent par ce mot. Et que évangéliser, ce n’est pas apporter aux hommes des commandements, encore moins des interdits, mais c’est les rendre heureux. En particulier, rendre heureux ceux qui ne le sont pas, ceux qui ne sont pas respectés, ceux qui sont méprisés, ceux qui sont écrasés, ceux qui n’ont pas leur place dans la société, ceux qui souffrent et qui n’ont pas de quoi vivre. L’évangélisation, ce n’est pas amener des commandements, c’est rendre les hommes heureux.
  4. Enfin, l’évangélisation c’est un acte de foi, c’est un engagement ; comme on nous le dit au début de ce Carême : « Convertis-toi et crois à l’Evangile ».
Une remarque : on dit parfois « il faut s’évangéliser avant d’évangéliser les autres ». Je ne suis pas tellement d’accord avec cette formule. En fait, nous ne pouvons pas nous évangéliser nous-mêmes, nous nous laissons évangéliser par l’Esprit-Saint, l’Esprit de Jésus. Et lorsque nous sommes évangélisés par Dieu, alors nous pouvons apporter l’Esprit de l’Evangile à nos frères.
Autre chose : ce n’est pas d’abord par nos paroles que nous évangélisons, mais par notre témoignage de vie. Si nous sommes heureux d’être chrétiens et de vivre selon l’Evangile, les gens suivront notre chemin. Car eux aussi ils ont envie d’être heureux. Il ne s’agit pas tellement de montrer l’exemple, car nous ne sommes pas toujours exemplaires. Ce qui est important, ce n’est pas d’être exemplaires, mais c’est de nous engager avec les autres, chrétiens et non chrétiens, pour construire ensemble le Royaume de Dieu. C’est de cela que l’Eglise, comme le monde, a besoin.
N.B. : Toute la conférence a été coupée par des chants sur l’évangélisation. Après un de ces chants, le Père Armel a demandé aux participants de dire par cœur ce que Jésus a fait lorsqu’il a envoyé ses disciples en mission. Puis il a ensuite repris ce texte en l'expliquant point par point. Voici certaines de ses remarques, à partir du chapitre10 de St Luc
L’envoi des disciples (Luc 10)
  • Jésus envoie 70 disciples. Ce ne sont donc pas les apôtres seulement que Jésus envoie. Cela veut dire que « évangéliser » c’est la responsabilité de tous les chrétiens (les disciples) pas seulement des évêques, des prêtres, et des religieux.
    Ensuite, le Christ envoie ses disciples deux par deux. Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire d’abord qu’on ne peut pas être chrétien tout seul, mais on ne peut pas non plus évangéliser tout seul.
    L’évangélisation, ce n’est pas l’affaire d’une personne, même la plus courageuse, c’est la responsabilité de toute la communauté ; c’est la communauté qui va évangéliser, en s’appuyant sur les qualités et les charismes de chacun.
  • La première chose que Jésus dit c’est : « Priez le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson ». La base de l’évangélisation, c’est d’abord la prière, puisque ce n’est pas nous qui évangélisons mais c’est bien l’Esprit de Jésus. C’est Lui qui travaille dans le cœur des hommes.
  • Ensuite l’évangélisation nous demande d’être courageux ; Jésus le dit clairement : « Je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups ». Il faut donc que nous soyons décidés, courageux, pleins de foi, et prêts à supporter les accusations et les oppositions, dans la paix et dans le calme. Comme le disait déjà Jésus dans les Béatitudes : « Heureux ceux qui sont persécutés à cause de la justice » ; « ils m’ont persécutés, ils vous persécuteront vous aussi ». Si nous annonçons l’Evangile, des gens ne seront pas d’accord, et ils nous feront souffrir ; c’est obligé.
  • Une autre recommandation de Jésus : « Ne portez ni bourse, ni sac, ni chaussures ». Si nous voulons évangéliser, il faut que nous soyons pauvres de cœur, détachés de l’argent et généreux. Jésus nous avertit : « Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’argent ». Beaucoup de gens se lancent dans toutes sortes d’activités, pour avoir le pouvoir et l’argent. Si nous nous engageons dans l’évangélisation, c’est pour Dieu, et non pas pour un intérêt égoïste. L’évangélisation, ce n’est pas une question d’argent, de technique ou de moyens. C’est une question d’amour. On ne peut pas acheter un homme avec de l’argent. Ni gagner une conversion avec des cadeaux.
  • Jésus continue : « Dans toute maison où vous entrez, dites d’abord : que la paix soit sur cette maison ». La première façon d’évangéliser nos frères et nos sœurs, c’est de leur apporter la paix de Dieu. Et avec eux de travailler pour faire grandir la paix, la vraie paix de Jésus-Christ. Comme nous le disions, l’évangélisation, ce n’est pas des discours, ce sont des actions. La première action, c’est de construire la paix, tous ensemble, avec ceux qui nous reçoivent.
  • Jésus dit encore : « Demeurez dans cette maison-là, mangez et buvez ce qu’on vous donnera ». Qu’est-ce que cela veut dire ? L’évangélisation suppose que l’on prenne le temps d’abord de se connaître, de vivre ensemble, de partager nos idées, nos soucis et nos problèmes. C’est ensuite, lorsque nous avons vécu ensemble, et que nous sommes demeurés longtemps dans une maison, que nous pouvons y apporter l’Evangile. D’ailleurs s’il n’y a pas une amitié entre nous, l’autre ne pourra pas nous écouter, il n’acceptera ni ce que nous dirons, ni notre témoignage de vie. A ce moment-là, l’Evangile ne pourra pas passer.
Le Père Armel a ensuite repris le retour des disciples, aux versets 17 à 21, en disant en particulier ceci : "Les 70 disciples reviennent dans la joie". L’Evangile est une Bonne Nouvelle. On ne peut l’annoncer que dans la joie. Les disciples disent eux-mêmes « les démons sont soumis à ton Nom ». Jésus répond « Je vous ai donné le pouvoir de marcher sur les serpents et sur les scorpions, et sur toute la puissance de l’ennemi ». L’évangélisation, c’est l’action de Dieu ; nous croyons qu’Il est avec nous, Il nous soutient, Il nous protège. Mais Jésus ajoute : « Ne vous réjouissez pas, que les démons vous soient soumis ; soyez heureux parce que vos noms sont écrits dans les cieux ». Par l’évangélisation, nous vivons avec Dieu, nous sommes avec Lui dans toute notre vie, sur la terre et après notre mort.
  • "Jésus tressaille dans le Saint Esprit". L’évangélisation, ce n’est pas notre œuvre. Ce ne sont pas nos idées, que nous devons transmettre. Ce ne sont pas nos manières de faire ou de vivre, que nous devons enseigner aux autres. Il s’agit d’écouter le Saint Esprit dans notre cœur. C’est Lui qui nous montrera, ce que nous avons à faire et ce que nous avons à dire, pour évangéliser.
  • Enfin, il y a la prière de Jésus : « Père je te rends grâce, parce que tu as caché ton Evangile, à ceux qui se croient sages et intelligents; et tu l’as fait connaître aux petits ». Comme Jésus disait déjà dans les Béatitudes : « Heureux les pauvres, le Royaume de Dieu est à eux ". L’Evangile s’adresse d’abord aux petits de la société, à tous ceux qui sont rejetés, mis à côté, écrasés. C’est à eux, que nous devons d’abord nous adresser. C’est eux que l’Evangile va d’abord délivrer.
Qu’est-ce que la mission ?
Après avoir donné la parole aux participants, le Père continue : Jésus dit « Allez enseigner toutes les nations, de tous les peuples faites mes disciples ». Et Marc dit même « Allez enseigner l’Evangile à toute la Création » (Marc 16,15). Pas seulement aux hommes, mais à toutes les créatures, comme nous la montré par exemple St François. Ou comme le dit Paul aux Romains « La création tout entière attend d’être libérée de la corruption et de la mort" (Rom 8,22). L'évangélisation va ensemble avec le respect de la création. C'est-à-dire avec la lutte contre la pollution, contre les feux de brousse, contre la désertification, contre le déboisement, et contre les saletés qui salissent notre terre : les eaux sales, les ordures, les fumées et déchets chimiques de nos usines, et même les déchets atomiques envoyés chez nous par les pays riches. L'évangélisation ne va pas sans la protection de l'environnement. Il nous faut beaucoup réfléchir à tout cela. Car nous n'avons pas encore compris, que notre foi nous demande de respecter la création, que Dieu nous a donnée.
  • Jésus dit: "Allez dans le monde entier. De tous les peuples faites des disciples" (On a chanté ce chant ensemble). Il ne s'agit pas seulement d'évangéliser les personnes une par une, individuellement. Il s'agit bien d'évangéliser tout le peuple ensemble. Evangéliser toute la nation. Jésus disait sur la montagne à tous ses disciples, dès le début de son enseignement de l'Evangile: "Vous êtes le sel de la terre. Vous êtes la lumière du monde" (Mat 5,13-15). Jésus ne dit pas: vous êtes le sel de la communauté chrétienne, mais bien le sel de toute la terre. Et à ce sujet, le père a fait remarquer qu’il suffit d’un peu de sel, pour donner du goût à tout le plat. Souvent, nous disons : nous les chrétiens, nous sommes trop peu nombreux, nous ne pouvons pas évangéliser. Mais si nous avons la force de Jésus, nous pouvons donner le goût des choses de Dieu à tout le pays. A condition de ne pas être un sel pourri, que l’on jette par terre, et sur lequel on marche. A condition aussi d’être au milieu de nos frères, et de partager leur vie : si le sel n’est pas au milieu du riz, il ne donne lui pas de goût A condition d’être vraiment éclairés et allumés par le Christ. Pour pouvoir, à notre tour, faire entrer nos frères dans la Lumière de Dieu. Comme disait Jésus : « Celui qui fait la Vérité vient à la lumière » (Jean 3,21), quelle que soit sa religion.
  • Il s’agit donc d’évangéliser tout le peuple, et tout le pays. Notre pays est en pleine transformation. C’est un appel que Dieu nous adresse à construire notre pays, dans la ligne du 2° Synode pour l’Afrique, dont le thème était justement « Réconciliation, Justice et Paix  ». C’est tout cela que nous devons mettre en pratique, pour faire grandir notre pays. Comme le disait déjà le prophète Isaïe, dans le chapitre 58 au début de notre Carême : « Si tu t’engages avec Dieu, ton pays qui était un désert deviendra un jardin bien arrosé, où les eaux ne manquent jamais ; tu rebâtiras les ruines anciennes ; tu rendras à nouveau fortes, les fondations d’autrefois ; on t’appellera celui qui répare les murs, celui qui remet en service les routes ». C’est cela l’évangélisation.
  • C’est Dieu qui nous a donné notre terre. A nous, non seulement de la garder, mais de la faire grandir. Comme le disait déjà Dieu à Adam et Eve, dès le début du monde : « Grandissez et multipliez-vous ; toute la terre est à vous ; développez le monde ». Cela suppose donc que les chrétiens s’engagent dans la société, et également dans la politique. A condition de s’engager dans la politique, non pas pour gagner et détourner de l’argent, non pas par soif du pouvoir pour s’imposer aux autres, mais vraiment pour construire le pays selon l’Evangile. Et pour se mettre au service de nos frères, comme Jésus qui a dit : « Je ne suis pas venu pour être servi mais pour servir » (Mat 20,27; Luc 22,27). Il a lavé les pieds de ses apôtres, et il a dit : « le plus grand parmi vous, ce sera celui qui se fait petit devant ses frères ».
  • Jésus nous demande de construire le pays d’après les Béatitudes. Il disait : « Heureux les pauvres » (Mat 5,3). Nous pensons d’abord aux pauvres, dans nos projets de développement. Nous leur donnons leur place dans la société. Ensemble, nous cherchons à construire la paix. Nous avons faim et soif de justice. Et dans notre engagement, nous pensons à consoler ceux qui pleurent (voir Matthieu 5, 3-12).
  • En effet, nous sommes bien obligés de nous poser un certain nombre de questions quand nous voyons ce qui se passe dans le pays. En quittant la capitale, nous avons traversé des quartiers populaires, des banlieues où les gens ont de la peine à vivre. Mais dans ces banlieues, nous avons vu aussi des grandes maisons pleines de luxe. Et nous avons croisé des voitures modernes tout-terrain qui coûtent des millions. Alors que dans ces quartiers, les gens n’ont pas de quoi vivre, manger, s’habiller ou se soigner. Si on ne change pas les choses, les pauvres vont devenir de plus en plus pauvres, et également le pays. Car tout cela ne peut que créer l’inflation, et faire perdre sa valeur à notre monnaie.
    On prévoit des soutiens pour les fonctionnaires. Mais quelles mesures a-t-on prévu pour tous ceux qui sont dans le secteur informel, et qui se débrouillent en exerçant des petits métiers ? Et que fait-on pour le monde rural ? Les villageois ont droit à l’eau et à l’électricité, comme ceux de la ville. La saison des pluies va commencer. Que fait-on pour aider les paysans, leur fournir des engrais, des semences et du petit matériel, pour qu’ils puissent cultiver ? Et ainsi non seulement vivre, mais nourrir tout le pays. L’évangélisation, c’est reconstruire le pays, dans la justice, la paix, et la réconciliation. Si nous ne faisons pas cela, nous ne sommes pas chrétiens. Et tout ce que nous pourrons dire, ce ne seront que des discours inutiles et creux.
Évangéliser est plus large que baptiser
Paul disait : « Dieu ne m’a pas choisi pour baptiser, mais pour évangéliser » (1° Cor 1,7). Qu’est-ce que cela veut dire ? Baptiser quelqu’un, c’est lui donner le sacrement qui le fait entrer dans l’Eglise. C’est quand il demande à devenir chrétien. Evangéliser quelqu’un, c’est lui permettre de vivre dans l’esprit de l’Evangile, quelle que soit sa religion. Un non chrétien qui met en pratique les valeurs de l’Evangile et écoute la voix de Dieu dans son coeur, il est déjà évangélisé. Il est déjà dans le Royaume de Dieu. Jésus disait:" Celui qui fait la vérité, il vient à la lumière". Et Jésus disait à un autre :"Tu n'es pas loin du Royaume de Dieu" En effet, qu’est-ce que l’évangélisation : c’est rendre présent et faire grandir le Royaume de Dieu parmi nous
Qu’est-ce que le Royaume de Dieu ?
Les participants ont longuement échangé sur cette question. Ils ont rappelé ces paroles de Jésus : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu, et sa justice » (Matthieu 6,33). Le Royaume de Dieu, c’est quand nous changeons notre cœur, et que nous commençons une vie nouvelle (Jean 3, 38). Le Royaume de Dieu, c’est quand nous donnons ce que nous avons aux pauvres (Matthieu 19, 21). Et surtout quand nous avons un cœur de pauvre (Matthieu 5, 3 ; Jacques 2, 5). Le Royaume de Dieu, comme l’évangélisation, c’est Jésus. Quand Jésus est là, le Royaume de Dieu est là. Et Jésus disait : « Quand deux ou trois sont réunis en mon Nom, je suis au milieu d’eux » (Mat 18,19). Le Royaume de Dieu est là, quand il y a l’amitié, l’amour, la communion. Jésus disait : « Celui qui accueille un enfant, c’est moi qu’il accueille » (Mat 18,5; Mat 19,14). Quand nous accueillons un enfant, ou un petit de la société, un pauvre, un exclu, un humilié, Jésus est là, le Royaume de Dieu est là. St Paul expliquait : le Royaume de Dieu est justice, paix et joie (Romains 14, 17). Dans la prière nous disons : « Notre Père, que ton Royaume vienne, que ta volonté soit faite sur la terre ». Le Royaume de Dieu est ouvert à tous. Jésus accepte de guérir le serviteur de l’officier romain, qui était non seulement un païen et un étranger, mais un colonialiste qui faisait souffrir et tuait le peuple. Et Jésus s’écrie : « je n’ai jamais vu une telle foi en Israël ». Il ajoute : « ils viendront de l’est et de l’ouest, et prendront place à table au repas du Royaume » (Mat 15,21-28). Avant de recevoir la communion, c’est justement la prière de ce païen et de cet étranger, que nous reprenons : « Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir. Mais dis seulement une parole, et je serai guéri"
C’est le Saint Esprit qui nous guide dans notre travail d’évangélisation."Le fruit de l'Esprit, c'est l'amour, la joie, la paix, la patience et la bonté" (Galates 5, 22). Le Royaume, c’est quand il y a l’amour. C’est ce que Jésus nous dira à la fin du monde (Matthieu 25, 34-40) : « Venez, vous les bénis de mon Père. J’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger; j’étais étranger, vous m’avez accueilli; j’étais nu, vous m’avez habillé (et donc vous m’avez rendu ma dignité); j’étais en prison, vous êtes venu me visiter (et me libérer); j’étais malade, et vous m’avez soigné. Entrez dans le Royaume ». C’est cela l’évangélisation ; ce ne sont pas des paroles, c’est vivre l’Evangile : aimer, accueillir et aider les pauvres, les étrangers, les malades, les prisonniers, ceux qui pleurent, ceux qui sont rejetés. La Préface de la Fête du Christ-Roi nous explique, ce qu’est le Royaume de Dieu: « un Royaume d'amour et de vérité, de justice et de paix." Et l'évangélisation, c'est faire venir le Royaume de Dieu sur la terre.
Après un temps de partage avec les participants, le Père Armel a expliqué la relation, entre l’Eglise et le Royaume de Dieu. L’Eglise ne doit pas travailler pour elle-même, elle est au service du Royaume, un Royaume qui est plus grand que l’Eglise. Dans ce Royaume, tous les hommes ont leur place, "les hommes de toutes langues, de toutes cultures, de toutes races", mais aussi de toutes religions. Car Dieu a ouvert son Royaume à tous. C’est pour cela que nous devons aider tous les hommes, à vivre selon l’Evangile. Même s’ils ne connaissent pas Jésus, du moment qu’ils se laissent conduire par l’Esprit qui parle dans leur cœur, et qui les conduit vers le Royaume de Dieu, ils sont évangélisés, ils sont dans le Royaume. Jésus disait : » Quand je serai élevé de terre, j’attirerai tout à moi ». (Jean 12,32). Voir le document L 54 « Evangélisation et Royaume de Dieu", dans mon site, rubrique « Justice et Paix », à la 2ème page : formation.
Évangélisation et dialogue
  • L’évangélisation ne peut se faire que dans le dialogue. Mais un vrai dialogue, non pas une simple discussion, surtout pas une conversation banale. Ni une conversation agressive, où l’on veut convertir l’autre à ses idées, ou à sa religion. Dans le dialogue, nous nous aidons les uns les autres, à nous convertir à Dieu. Car tous nous avons besoin de conversion, quelle que soit notre religion. Conversion veut dire : se tourner. Il s’agit de s’aider et de se soutenir, pour se tourner ensemble vers Dieu. Et non pas vouloir faire changer l’autre de religion. Le dialogue ne peut se faire que dans une rencontre profonde, où chacun offre à l’autre, dans la liberté, le meilleur de lui-même. Mais, en même temps, où chacun cherche à accueillir le meilleur de l’autre, pour nous rejoindre en Dieu, au plus profond de notre cœur.
  • Le dialogue ne peut se faire que dans l’humilité. Car Dieu seul est Vérité. Bien sûr, la Vérité existe : c’est Dieu Lui-même. Mais nous, nous ne voyons qu’une partie de la Vérité. Nous ne la comprenons que très imparfaitement. Bien plus, la Vérité de Dieu nous la recevons des autres. Il s’agit donc de nous éclairer mutuellement, en partageant notre foi, pour mieux comprendre qui est Dieu et ce qu’Il nous demande. Car les croyants des autres religions ont aussi beaucoup de choses à nous apprendre sur Dieu. Et beaucoup de choses à nous apporter.
  • L’évangélisation ne peut se faire que dans le respect de l’autre. Comme Jésus a respecté la Samaritaine. Alors que les Juifs méprisaient les étrangers et abaissaient les femmes. Surtout les femmes comme la Samaritaine « qui avait eu cinq maris. Et l’homme avec qui elle vivait n’était pas son mari » (Jean 4,18). L’évangélisation suppose l’accueil de l’autre, qui est étranger par sa langue et sa religion. Comme Jésus a accueilli les lépreux. Et le seul qui est venu lui dire merci, justement c’était un étranger et un païen, un Samaritain (Luc 17, 11-19).
  • L’évangélisation suppose que l’on admire les gens des autres religions. Comme Jésus a admiré la foi de la Syrienne, en disant «femme ta foi est grande! » (Mat 15,21-28). Nous croyons que Dieu travaille au cœur de tous les croyants. C’est pour cela que la foi de l’autre me pose question, mais aussi me fait grandir. Dans la mesure où, comme Jésus, je suis capable de la découvrir et de l’admirer. Saint Jean-Paul 2 disait en 1981, aux musulmans des Philippines : « Je veux que vous soyez convaincus, que vos frères et sœurs chrétiens ont besoin de vous. Et qu’ils ont besoin de votre amour ». Nous n’évangélisons pas d’abord pour apporter quelque chose aux autres, mais pour recevoir de nos frères leur amour et leur foi. Et ainsi grandir ensemble dans l’amour et la foi. Déjà, le Psaume 86 disait de Jérusalem : « Jérusalem, tu es la ville de Dieu, en qui tout homme est né ». Dieu a créé Jérusalem pour tous les hommes ; tous les hommes sont appelés à entrer dans le Royaume.
C’est bien pour cela que les deux Conseils présents à Rome, le Conseil Pontifical pour le dialogue interreligieux, et la Congrégation pour l’évangélisation des peuples ont rédigé ensemble, il y a une vingtaine d’années un document très important, qui s’appelle justement « Dialogue et annonce ». On ne peut pas annoncer l’Evangile en dehors d'un vrai dialogue. Et nous sommes évangélisés par nos frères, tout autant que nous les évangélisons. D’ailleurs, dès le début de l’Evangile, Jean nous dit (Jean 1, 9) : « Jésus est le Verbe de Dieu ; il est la Lumière, qui éclaire tout homme venu dans le monde ». Comme le disait le Concile Vatican II : « tout homme est associé au Mystère pascal (à la Résurrection de Jésus qui nous sauve) par l’Esprit-Saint d’une manière que Dieu connaît » (même si nous, nous ne la connaissons pas, ou ne la comprenons pas).
Dans la première prière eucharistique pour la Réconciliation, on affirme « Seigneur, ton Esprit travaille au cœur des hommes, et les ennemis enfin se parlent ». C’est cela l’évangélisation, c’est l’Esprit qui travaille dans le cœur des hommes, de tous les hommes. Evangéliser ce n’est donc pas d’abord fairz des discours. C’est surtout apprendre aux hommes, à reconnaître Dieu présent dans leur vie, la leur et la nôtre. Leur apprendre à écouter la voix de Dieu dans leur cœur. Car l’Esprit Saint parle au cœur de tous les hommes. Et comme dit Jésus, « nous ne savons pas d’où il vient, ni où il va » (Jean 3,8). Nous ne pouvons donc pas aller évangéliser nos frères avec des théories toutes faites, ou des idées à l’avance. Nous nous mettons ensemble, à l’écoute de ce que l’Esprit de Dieu dit à chacun de nous, dans notre cœur. Nous le partageons. C’est ainsi que nous nous éclairons et que nous nous fortifions, pour avancer ensemble. Nous ne disons donc pas aux autres, ce qu’ils doivent faire pour répondre à l’appel de Dieu. Nous leur apprenons plutôt à écouter Dieu, qui parle dans leur cœur. En même temps, nous essayons d’apprendre ce que Dieu nous dit à nous aussi, dans notre cœur.
Par conséquent, le vrai témoin de l’Evangile, ce n’est pas nous, c’est l’Esprit Saint, l’Esprit de Jésus. En vivant au milieu d’autres croyants, nous constatons dans la joie, qu’ils peuvent être de vrais témoins de Dieu, grâce à l’Esprit Saint. Même s’ils ne sont pas de notre religion. Le témoignage n’est pas seulement pour les disciples du Christ, il est pour tous ceux qui essaient de vivre, en se laissant conduire par le Saint Esprit. Souvent, nous avons la bouche beaucoup trop remplie, de ce que nous voulons enseigner aux autres. Au lieu de rencontrer les personnes, leurs cultures et leurs religions, et de les écouter. L’annonce de l’Evangile, c'est le partage. Ensemble nous écoutons l’Esprit de Dieu, qui va tous nous évangéliser.
Faire toute chose nouvelle
Déjà, Dieu disait par la bouche du Prophète Isaïe: « Je vais créer des cieux nouveaux, et une terre nouvelle, où la justice habitera » (Isaie 65,17; 66,22). Pierre et l'Apocalypse redisent la même chose (2° Pierre 3,13 ; Apoc 21,1) : c’est cela l’évangélisation. Il s’agit donc de créer toute chose nouvelle, comme Jésus nous disait : « Je vous donne un commandement nouveau, aimez-vous les uns les autres » (Jean 13,34). Il nous a fait entrer dans une Alliance nouvelle, ouverte à tous les hommes. Son Evangile est une Bonne Nouvelle, qui nous appelle à vivre d’une vie nouvelle, à devenir des hommes et des femmes nouveaux. Cela veut dire aussi qu’il s’agit d’évangéliser les nouveaux secteurs de la vie et du monde. Par exemple les phénomènes de la mondialisation et de la globalisation. Pour que cela se fasse pour le bien de tous, et la libération des pauvres Et non pas leur exploitation et leur marginalisation. Il s’agit d’évangéliser les communications sociales, mais aussi les nouvelles pauvretés, qui apparaissent dans les pays même les plus riches. Il s’agit d’évangéliser nos communautés, afin qu’elles deviennent des communautés comme Dieu le veut. Et la première communauté, c’est notre famille. Jean Paul II demandait une nouvelle évangélisation: il s’agit d’évangéliser la ville, d’évangéliser les migrations, avec tous ces Africains et autres habitants du monde qui n’hésitent pas à risquer la mort pour venir habiter en Europe ou aux Etats-Unis. Cela suppose l’information et l’inculturation. Le Père Armel a expliqué tout cela, en reprenant le message final de l’assemblée de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, du 16 au 18 Novembre 2.009.
Claude POULLARD DES PLACES, missionnaire des pauvres
Enfin, pour terminer, le Père Armel a présenté Claude POULLART DES PLACES, fondateur des Spiritains, comme un modèle d’évangélisation. Jésus disait, en commençant son apostolat, son travail de missionnaire, « Les pauvres sont évangélisés » (Luc 4,18). Il disait aux disciples de Jean-Baptiste : « La Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres » (Luc 7,22). Et la première des Béatitudes, c’est bien « Heureux les pauvres de cœur, le Royaume des cieux est à eux » (Mat 5,3). POULLART DES PLACES est né dans une famille riche. Il était intelligent, il a fait de grandes études. Son père voulait qu'il soit juge, et même président du Parlement de Bretagne. Mais le jour même où il reçoit son diplôme, il décide de laisser tout cela, et de devenir prêtre. Claude part à Paris. Au début, il va au grand séminaire, chez les Jésuites, pour recevoir une formation la meilleure possible. Avec l’idée de son temps, de devenir un prêtre avec un « bénéfice », c'est à dire une bonne place pour bien vivre. Mais Claude sait ouvrir les yeux, et écouter ce que Dieu lui dit dans son cœur. Il voit autour de lui des jeunes de familles pauvres qui veulent être prêtres, mais qui n’ont pas les moyens de se payer leurs études au séminaire. Alors il décide de les aider, de leur faire l’aumône et de les nourrir. Et en plus de devenir pauvre, comme eux et avec eux. Il les forme, pour qu’ils se mettent au service des plus pauvres.
C’est ainsi qu’en 1703 est née la Congrégation des Spiritains. Une Congrégation de prêtres pour se mettre au service des pauvres. Et pour être missionnaires et porter l’Evangile partout dans le monde. Cela en vivant ensemble, en communauté, et en mettant ce qu’ils ont, au service des hommes. Claude POULLART DES PLACES mourra à Paris, durant le terrible hiver de 1709, qui vit mourir plus de 30.000 parisiens. Il mourut le 2 Octobre 1709 d'une pleurésie, étant trop pauvre pour se faire soigner à l’hôpital. Son corps fut déposé dans la fosse commune du cimetière de l’église de St Etienne du Mont, avec les autres pauvres, à l’ombre de la chapelle de la Vierge. A l’exemple et à la suite du Christ pauvre, lui qui s’est fait pauvre pour les hommes, pour tous les sauver.
Nous sommes réunis ici pour fêter  le 3ème centenaire de la mort de POULLART DES PLACES, l’apôtre des pauvres, le formateur d’évangélisateurs au milieu des pauvres. La célébration d’aujourd’hui ne doit pas être une fin, une conclusion, mais un point de départ pour aller plus loin, sur des routes nouvelles, à la lumière de l’Evangile.

N.B. Ceci n’est pas un texte officiel, mais des simples notes prises au cours d’une rencontre des responsables spiritains d’Afrique et des Iles, à Dakar en août 2011 (UCAI).
1°) La situation actuelle
  1. La société nous impose des façons de faire
  2. L’individualisme
  3. La sécularisation
  4. La liberté, avec beaucoup de dialogue
  5. La formation initiale et continue
  6. L’affectation missionnaire
Il nous faut regarder comment nous vivons, pour être des spiritains authentiques ; au milieu des difficultés, et de ce qui passe dans la monde.
1.      la société nous impose certaines choses. Nous n’avons pas le choix. Nous religieux, nous acceptons souvent les modèles et les façons de vivre de la société, même si c’est avec honte et malgré nous. Pourtant notre identité, c’est la vie religieuse. Le sacerdoce, c’est un service que nous offrons aux hommes, mais ce n’est pas notre identité. Souvent on donne plus d’importance à la vie sacerdotale qu’à la vie religieuse missionnaire. Ce devrait être le contraire chez nous . Certains ne vivent en religieux que quand ils le veulent.
  1. C’est très bon de développer notre personnalité. Cependant nos désirs personnels ne doivent pas passer avant notre vie religieuse. L’individualisme continue d’envahir nos communautés en Afrique. Nous ne vivons plus comme des religieux. En effet, l’individualisme augmente dans la société et il nous influence, alors qu’il va contre notre identité spiritaine. Notre supérieur général a mis l’individualisme en question. Certains confrères veulent faire leurs propres affaires, à leur manière et où ils le veulent. Cela a des conséquences sur la formation. Nous devons être conscients de l’influence de la société sur nous. La nature de notre vie religieuse, c’est d’être communautaire, et non pas individualiste.
  2. Nous ne pouvons pas empêcher non plus la sécularisation. Mais il nous faut voir comment la vivre.
  3. Le dialogue est bon. Mais s’il y en a trop, cela n’aide pas. On considère parfois le dialogue, comme un moyen d’imposer sa volonté aux supérieurs. Alors que ce doit être un temps pour comprendre leur point de vue. Ils doivent nous écouter, mais finalement, c’est à eux de prendre la décision. Nous acceptons leur décision au lieu de la refuser, et de continuer à vouloir imposer notre point de vue.
  4. La formation est une chose complexe. Pour la formation initiale, souvent il n’y a pas d’accord entre les générations. Les jeunes disent qu’on ne les comprend pas. Mais les anciens ont aussi de la peine à les comprendre. Cela entraîne des blocages. C’est un défi actuel. Maintenant nous avons des vocations en Afrique. Mais il nous faut être prudents. Comprendre les jeunes, cela ne veut pas dire, accepter tout ce qu’ils proposent.

2) Les défis de la mission en Afrique
  1. Relations entre chrétiens et musulmans et dialogue islamo-chrétien
  2. La Mondialisation
  1. le marché érigé en système, les conditions de vie défavorables des populations, les prix, les barrières douanières, l’inondation du marché avec les produits étrangers, au premier rang desquels ceux qui viennent de la Chine.
  2. les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC), l’imprimerie, le réseau de communication à la fois cher et précaire.
  3. les institutions internationales : le FMI, la Banque Mondiale, prêts et emprunts des bailleurs de fonds.
  4. l’extrême pauvreté. Mahatma Gandhi disait : « La pauvreté est la pire forme de violence ».
    Cette pauvreté entraîne l’analphabétisme, les problèmes de santé, l’augmentation de la mortalité maternelle et infantile.
  5. Les conflits : les problèmes interreligieux, les conflits intercommunautaires : des millions de victimes (enfants, femmes, etc.), les conflits tribaux et ethniques, les conflits de pouvoir, les problèmes de terre, de culture (la tradition contre la modernité occidentale).
  6. les réfugiés : des millions d’hommes sont obligés de quitter leur famille, causant une crise humanitaire majeure dans la région.
  7. la politique : la mal gouvernance, les politiques strictes, la marginalisation.
  8. les injustices : une violation flagrante et systématique des droits humains – violence faite aux femmes et aux enfants.
  9. la corruption et le manque de gestion responsable. Le manque de transparence en Afrique, et le refus de rendre compte, ont fait que cette dernière décennie, la corruption se généralise.
  10. le manque de compétence : la formation ne prépare pas à affronter les problèmes modernes.



                                                                                                                                                          1_Comment Jésus a-t-il évangélisé ? Le 25 Novembre 2014                                                      
                                      2_ Le Synode sur la Famille
                                      3_Comment évangéliser notre Eglise ?
                                      4_Comment évangéliser notre Société ?
      QUESTION : c’est quoi l’évangélisation ?  
        Réponse : c’est la proclamation de la Bonne Nouvelle qui vient de la parole de Dieu.
        C’est aussi mettre en place le projet de Dieu : son Royaume.
        qu’est-ce que la nouvelle Evangélisation. Et la Nouvelle Alliance.
        L’ancienne Alliance a été scellée entre Dieu et Tous les hommes à travers Noé (après Adam et Eve). Avec ABRAHAM  pour Tous les croyants. Avec le peuple élu (Israel) au temps de Moise.
          Pour la Nouvelle Alliance et l’ évangélisation, Jésus se fait connaitre :
        1_Les Anges annoncent sa naissance
            Jean le Baptiste annonce la venue de Jésus.
        3_La bonne nouvelle est annoncée aux pauvres et aux pêcheurs. Ex : les bergers
        4_Aux Rois Mages (païens).
        5_Notre Seigneur a émigré pour se faire connaitre à d’autres Peuples. Ex : Voyage en Egypte lors
             De la persécution d’Erode.
        6_ A son peuple, à sa présentation au Temple. Ex : Témoignage de Siméon.
      7_ A 12 ans IL déclare à ses parents au Temple qu’il est le Fils de Dieu.
        L’évangélisation nécessite  un temps de préparation. Grace à l’Amour Jésus nous sauve.
        Elle dure toute une vie.
      Luc 7,20-23 = JUSTICE
     _Le choix des apôtres et le reste du monde.
- L’évangélisation, c’est le Témoignage par des Actes.
     - Jésus est venu nous sauver par des Actions.
     - Quand tu vis l’évangile, ça se voit.
     - Il est difficile d’évangéliser.
     Missions de Jésus
     Jésus est venu sauver tout le Monde.
     Jésus va voir les païens : la femme Syrienne
     Il admire la Foi de cette Femme
     Jésus agit et demande.
     IL nous rend notre dignité par son humilité.
     Il veut des hommes et des femmes libres.
     Il fait naitre et grandir en nous le désir (amour) .
     La femme samaritaine annonce l’évangile.
     Mt 8 l’officier Romain. Evangéliser, c’est créer un lien d’amitié et de dialogue.
    Nous devons annoncer que le Royaume de Dieu est arrivé.
    Recevoir le Royaume de Dieu = Justice, Paix, Amour, Amitié, Vérité.
    Royaume de Dieu = JESUS
    L’église est au service du Royaume.
    Evangéliser, c’est construire le Royaume.
    Nous avons une nouvelle évangélisation grâce à l’évangile.
    Nous devons être des hommes et des femmes nouveaux.  
    Il faut apprendre aux autres (musulmans) à aimer.
    Même s’ils sont musulmans qu’ils vivent comme Jésus.

    AMEN !
Les Actes des Apôtres présentent trois piliers de l’évangélisation. Le premier est celui de l’Annonce, la proclamation joyeuse du message chrétien : « Jésus est mort, il est ressuscité, il est vivant, il reviendra », message qui renouvelle nos vies et nous appelle à renaître. Viennent ensuite les dons de l’Esprit qui vont de pair avec l’évangélisation. L’Esprit-Saint est le protagoniste de l’évangélisation. Il procure à l’Église les dons et les charismes nécessaires. Enfin, le troisième pilier est celui de la communauté. On n’est pas d’abord chrétien ou croyant pour soi, mais chrétien et croyant avec d’autres. « La Parole de Dieu nous invite aussi à reconnaître que nous sommes un peuple : « Vous qui jadis n’étiez pas un peuple et qui êtes maintenant le peuple de Dieu.» (1 P 2, 10)
Pour être d’authentiques évangélisateurs, il convient aussi de développer le goût spirituel d’être proche de la vie des gens, jusqu’à découvrir que c’est une source de joie supérieure. La mission est une passion pour Jésus mais, en même temps, une passion pour son peuple » écrit le pape François (§ 268) .
Dans notre relation avec les autres, nous sommes invités à rendre compte de notre espérance « avec douceur et respect » (1 P 3, 16), sans nous décourager et sans nous résigner devant la tâche à accomplir.


   


    






QUELLE EGLISE, POUR QUELLE EVANGELISATION ?
Le 50ème anniversaire du Concile Vatican 2 est l’occasion de faire le point sur la vie de nos Eglises. Je voudrais proposer ici quelques réflexions sur la vie missionnaire de l’Eglise au Sénégal, à partir du document Lumen Gentium et de la lettre du pape François « La joie de l’Evangile : EG », en particulier le chapître 4 : La dimension sociale de l’évangélisation
1. Confession de la foi et engagement social : N° 178 à 185
2. L’intégration sociale des pauvres N°186 à 217
3. Le bien commun et la paix sociale N°218 à 237.
4. Le dialogue social comme contribution à la paix 238-250
Voici le plan de ma réflexion :
1) L’EGLISE CATHOLIQUE AU SENEGAL p.1
2) L’EVANGELISATION p.9
3) UNE NOUVELLE ETAPE DE L’EVANGELISATION p. 13
4) COMMENT JESUS ANNONCE-T-IL L’EVANGILE ? p.14
5) LE ROYAUME DE DIEU p.16
L’EGLISE CATHOLIQUE AU SENEGAL
Le Sénégal compte environ 90 % de musulmans et 5 % de catholiques. L’Eglise est donc très nettement minoritaire. Les missionnaires sont arrivés depuis un peu plus de 250 ans (sans compter les premiers passages des missionnaires portugais, franciscains et capucins) : les messieurs du Saint Esprit à partir de 1763. Ces premiers missionnaires étaient plutôt des aumôniers de l’armée coloniale, des commerçants européens et des métis. Le premier travail, vraiment missionnaire auprès des populations locales a commencé à partir de l’année 1844, avec les pères du Saint Cœur de Marie, qui s’uniront à la congrégation du Saint Esprit. En fait le pays n’était pas vraiment islamisé, la présence islamique s’arrêtait la plupart du temps, à un marabout à côté des chefs traditionnels, mais son influence était importante. Le reste de la population continuait à pratiquer la religion traditionnelle. Reconnaissons d’ailleurs que jusqu’à maintenant, beaucoup de chrétiens pratiquent le Christianisme dans l’esprit de la religion traditionnelle. C’est la même chose d’ailleurs pour les musulmans.
Bien sûr, les réalités sont différentes suivant les régions. Dans le nord on compte 99, 8 % de musulmans, des toucouleurs en particulier, islamisés depuis plusieurs siècles. A part ceux de la ville de Saint Louis, l’ancienne capitale, la plupart des chrétiens viennent du sud. Ils sont venus comme fonctionnaires, ou pour trouver du travail. Ils ne sont donc pas dans leur milieu d’origine. Au contraire, au sud, les populations étaient de religion traditionnelle au moment de l’arrivée des missionnaires. Les chrétiens sont donc plus nombreux, ils sont dans leurs régions d’origine et on trouve dans des mêmes familles des chrétiens et des musulmans, ce qui aide beaucoup à établir de bonnes relations entre les pratiquants des deux religions.
Une véritable Evangélisation suppose une ouverture aux autres, un souci de la vie de chaque jour, et une attention aux plus pauvres. Qu’en est-il de l’Eglise dans le diocèse de Dakar ?
L’Eglise du Sénégal est maintenant bien implantée, tous les évêques sont sénégalais depuis plusieurs dizaines d’années, l’Archevêque de Dakar étant Cardinal pour la deuxième fois : le Cardinal Théodore Adrien Sarr, après le Cardinal Hyacinthe Thiandoum. Les prêtres sénégalais sont maintenant plus d’une centaine, dans le seul diocèse de Dakar. Les vocations sont assez nombreuses, il y a des ordinations sacerdotales chaque année. Les religieux et religieuses sénégalais sont nombreux dans les congrégations internationales. Et il existe une congrégation locale de frères et deux congrégations féminines dont l’une envoie d’ailleurs des membres comme missionnaires à l’extérieur du pays.
Les églises sont remplies chaque dimanche et les différents groupes chrétiens sont nombreux ; ceux qui attirent le plus de monde étant les chorales et les groupes charismatiques. Les différentes structures et services de l’Eglise sont assurés. On se trouve donc en présence d’une Eglise bien vivante. Mais qu’en-est-il de la dimension missionnaire ?
La base de l’Eglise au Sénégal c’est la Paroisse, et les chrétiens aiment bien s’y retrouver. Mais le problème c’est que la vie chrétienne a tendance à se limiter à la vie paroissiale et donc, l’Eglise se centre sur elle-même, elle n’est pas orientée vers l’extérieur. De plus, la vie paroissiale est spécialement tournée vers la prière et la liturgie. Il est clair que la liturgie est le sommet de la vie chrétienne, mais que vaut un sommet sans base ? En tout cas, la vie chrétienne ne peut certainement pas se limiter à la prière et à la liturgie.
Quelques conséquences de cela ? Voici comment je vois les choses, à partir de la paroisse Notre Dame du Cap Vert, dans laquelle je travaille. Les aumôneries de prisons sont confiées aux paroisses, il n’y a pas d’aumônerie diocésaine. Ce qui fait qu’il n’y a pas de vraie réflexion, sur ce que les chrétiens sont appelés à faire avec les détenus. L’action de l’Eglise se limite très souvent aux seuls chrétiens, et pour eux, à la prière, à l’Eucharistie et à la catéchèse. Mais on ne prend pas en compte l’ensemble des détenus, ni leurs différents problèmes : besoins en nourriture et en santé, formation professionnelle, soutien psychologique et écoute, assistance à leurs familles, réinsertion, recherche d’avocats pour des jugements justes, etc.
-De même, dans les hôpitaux. On se contente la plupart du temps, d’apporter la communion, de prier, et de donner des conseils aux malades chrétiens. Mais sans vraiment se soucier des malades des autres religions. Et sans prendre en charge les nombreux problèmes des hôpitaux, et de la santé en général. Il n’y a pas une vraie formation et réflexion des agents de santé chrétiens sur leur engagement et leur responsabilité dans l’organisation de la santé dans le pays.
-De même, il y a une paroisse universitaire. Mais elle se limite surtout aux activités paroissiales : accueil, animation et soutien des étudiants catholiques. Il ne s’agit donc pas vraiment d’une aumônerie des universités en tant que telle, visant l’animation de l’université dans ses différents domaines. Et qui aurait le souci de l’évangélisation de tous les étudiants, quelle que soit leur religion.
Pourtant, l’apostolat dans les prisons, les hôpitaux et les universités, pourrait être un facteur important d’évangélisation. Mais là on se limite souvent à la dimension prière et sacramentalisation, pour les seuls chrétiens.
Au niveau officiel et théorique, bien sûr l’Eglise est ouverte à tous. Le 3ème Plan d’Action Pastoral pour les quatre années qui viennent, a repris les quatre objectifs du Plan précédent : la communion, la sanctification (liturgie, prières, sacrements, catéchèse), le témoignage
(évangélisation et dialogue), et le service (dignité et droits de l’homme, réconciliation, justice, paix, développement), mais dans la pratique l’accent est mis sur les deux premiers objectifs. Et même lorsque les deux derniers objectifs sont mis en action, souvent c’est d’abord en faveur des chrétiens.
-Ainsi pour beaucoup, la Caritas est plus une organisation pour aider les chrétiens nécessiteux, qu’une organisation de l’Eglise pour aider tous les pauvres et déshérités quelle que soit leur religion. Et elle se limite souvent à des distributions de dons reçus de l’étranger, au lieu de chercher à mettre en place des projets de développement pris en charge par les gens eux-mêmes, et à partir de nos propres ressources, pour arriver à un changement de mentalité : passer de l’assistanat à la responsabilité, de l’aumône au développement. On se contente trop facilement d’activités (khaware,…), pour gagner de l’argent et apporter des aides ponctuelles, avec le danger de faire des personnes aidées, des assistés et même parfois des mendiants. En tout cas, la Caritas semble trop peu engagée pour transformer la société et pour défendre les droits des pauvres. Et même simplement les former, et leur donner des moyens pour travailler et se prendre en charge eux-mêmes. . Une Eglise qui dépend de l’extérieur peut-elle être vraiment évangélisatrice ?
-La commission Justice et Paix qui pourrait aussi être un véritable facteur d’évangélisation, reste très faible, et absente dans de nombreuses paroisses. Quelques équipes ont bien travaillé, au moment des élections. Mais va-t-on profiter de cette action pour continuer à s’engager avec les ONG et autres organisations de la Société Civile ? Voir tout ce que dit notre pape François dans EG au Chapitre 4 : La dimension sociale de l’évangélisation (n° 177-261)
-Il ne semble pas non plus que les associations et fraternités de femmes catholiques aient en priorité le souci de l’évangélisation. Elles se contentent souvent de prières entre chrétiennes, de participation aux fêtes religieuses, surtout pour faire la cuisine, jouant dans ce cas-là un rôle d’animation avec de belles tenues, renouvelées à chaque fête, ce qui finit par coûter très cher. On peut admirer leur dévouement, leur courage et leur générosité. Mais cela ne doit pas empêcher de se poser des questions, sur l’utilisation de toutes ces qualités. Ne vaudrait-il pas mieux orienter tous ces efforts vers l’Evangélisation, plutôt que vers les fêtes ?
Les femmes de la Légion de Marie sont vraiment admirables dans leur engagement. Je dis les femmes car il y a très peu d’hommes, et encore moins de jeunes : visites des malades dans les hôpitaux, visites dans les prisons etc. Mais on retrouve toujours le même problème : elles ont le souci de soutenir les chrétiens, d’accueillir les musulmans qui veulent devenir chrétiens, mais beaucoup moins de soutenir les autres musulmans pour vivre leur foi musulmane d’une façon plus approfondie, dans le sens de l’Evangile. Dans tous les cas, il semble manquer gravement la connaissance de la théologie du Royaume de Dieu, et de sa relation avec l’Eglise. Je vais y revenir plus loin. Continuons l’observation de notre Eglise diocésaine.
-L’Eglise est reconnue dans le pays pour ses activités sociales, en particulier ses postes de santé, ses centres de formation féminine, ses écoles. Cela est très positif. On apprécie que, tous les gens, sans distinction de religion ou autres, puissent bénéficier de ces services. C’est donc un témoignage vivant et actif de l’amour du Christ, ouvert à tous. Mais cela ne doit pas empêcher de se poser un certain nombre de questions.
Les activités sociales de l’Eglise intéressent les non chrétiens et même font leur admiration, pour le dévouement et le désintéressement de ses acteurs : écoles, dispensaires, centres de formation féminine, Caritas, etc. Mais on peut se demander, si ce n’est pas d’abord pour en
profiter. Est-ce que cela amène à connaître et à rencontrer la personne de Jésus Christ, qui est pourtant la base et le fondement de nos engagements ? Que faire pour cela ?
Par rapport à ces activités, il semble que l’on se contente souvent de continuer à faire marcher les formes traditionnelles de l’aide aux pauvres, mais que l’on ne soit pas suffisamment attentif aux nouvelles formes de pauvreté qui se font jour actuellement, pour répondre à ces besoins d’une façon adaptée.
-On cherche à bien faire marcher les écoles de type classique et à obtenir des diplômes, beaucoup plus qu’à s’investir dans les nouvelles formes d’éducation, comme par exemple les écoles communautaires prises en charge par les parents et le quartier, l’enseignement mixte (théorie et apprentissage d’un métier), enseignement dans les langues locales et adapté aux plus défavorisés, nouvelles méthodes d’enseignement, etc…Alors que des expériences sont déjà menées dans ce domaine, par exemple avec ENDA. A commencer par les jardins d’enfants, qui pour la plupart sont de type vraiment occidental et réservés à une certaine classe sociale.
On a plus le souci des élèves de nos écoles catholiques, que de tous les élèves du pays, spécialement les plus démunis. Alors que l’enseignement rencontre de graves problèmes : grèves incessantes, baisse de niveau, manque d’éducation, l’Eglise semble plus soucieuse de ses œuvres, que du bien commun et de l’avancée de tous. On a des écoles catholiques qui marchent bien, mais les chrétiens ne semblent pas être préoccupés par les autres écoles.
On n’a pas beaucoup le souci des enseignants chrétiens engagés dans le secteur public ou privé laïc. Il y a bien des amicales des enseignants chrétiens, mais ceux-ci se retrouvent plus pour des récollections, quand ce ne sont pas des sorties, des repas, des soirées dansantes et des fêtes, que pour s’engager dans leur milieu (syndicats), et chercher à répondre aux besoins de l’éducation dans le pays.
Pour les élèves, il y a bien quelques aumôneries dans les écoles publiques ou privées non catholiques. Mais on cherche davantage à regrouper des élèves chrétiens pour des partages d’évangile qui se limitent à des discours mais ne débouchent pas sur des actions concrètes, que de faire avancer leur école en tant que telle, avec le souci de tous les élèves, chrétiens ou non, et la participation et la responsabilisation de tous. Et de lutter contre toutes les formes d’injustices et d’inégalités que l’on rencontre dans ces écoles. La JEC, action catholique, est pratiquement inexistante. Cela a des conséquences directes sur l’évangélisation, ou plutôt le manque d’Evangélisation. De même, la JOC n’existe presque plus, sauf quelques équipes de jeunes filles.
-On pourrait faire la même réflexion, par rapport aux dispensaires privés catholiques. Tous admirent la qualité des soins, et le dévouement des agents de santé de ces établissements. Mais on n’agit pas suffisamment pour la santé au niveau du pays. Les amicales de santé des agents chrétiens travaillant dans le secteur public, ont plus le souci d’obtenir des billets de pèlerinage gratuits à Rome et à Jérusalem, comme cela est accordé à leurs camarades de travail musulmans pour le pèlerinage à la Mecque, plutôt que de chercher comment améliorer la santé pour tous, et spécialement permettre aux plus pauvres de pouvoir profiter des soins de santé. Personnellement, je n’ai pas pu obtenir que l’amicale des agents de santé chrétiens intervienne régulièrement dans les prisons, pas plus d’ailleurs que l’association des avocats chrétiens. Ils se contentent au mieux d’apporter un repas le jour de Noel. Est-ce cela qui va résoudre les multiples problèmes des détenus et de leurs familles ?
Il est sûr qu’une véritable évangélisation se fait malgré tout dans les écoles, les centres de formation et à partir des dispensaires et autres actions sociales de l’Eglise. Mais cette évangélisation aurait besoin d’être réfléchie en tant que telle, et d’être davantage organisée pour aller plus loin et surtout plus profond.
Malgré les limites que j’ai signalées, à travers toutes les activités sociales et autres de l’Eglise, l’esprit de l’Evangile et la connaissance de Jésus Christ passent certainement. Et un certain nombre de musulmans vivent leur religion et comprennent le Coran, différemment et d’une façon plus spirituelle, grâce à leurs contacts avec les chrétiens. Par exemple au moment du Ramadan, pour ne pas se limiter au jeûne mais chercher une vraie conversion, grâce à la façon des chrétiens de vivre le Carême. Et aussi dans la façon de prier, plus personnelle et à partir de la vie, en dépassant la seule récitation de formules. Ou encore à vivre leur foi dans l’amour, et pas seulement garder les 10 commandements d’une façon parfois moralisante ou extérieure. On peut se demander, à l‘inverse, dans quelle mesure la foi des chrétiens est purifiée et grandie, grâce à leur vie en commun avec les musulmans. En effet, les musulmans nous appellent à un respect de Dieu plus grand : « Dieu est Dieu, et il n’y a pas d’autre Dieu que Dieu ». Ils prient 5 fois par jour, et nous rappellent l’importance de la prière, et aussi de manifester notre foi en public. Le sérieux avec lequel ils jeûnent pendant le Ramadan nous interroge sur la façon dont nous vivons le Carême. Et beaucoup d’autres choses encore. Mais combien de chrétiens, trop sûrs de leur foi, sont prêts à se laisser interpeler par les musulmans ? Et la commission pour les relations avec les musulmans n’existe plus. Or il ne peut pas y avoir d’évangélisation sans dialogue et accueil de l’autre.
Notre pape François écrit (La joie de l’Evangile=EG : Le dialogue interreligieux, n° 250) : » Une attitude d’ouverture en vérité et dans l’amour doit caractériser le dialogue avec les croyants des religions non chrétiennes, malgré les divers obstacles et les difficultés, en particulier les fondamentalismes des deux parties. Ce dialogue interreligieux est une condition nécessaire pour la paix dans le monde, et par conséquent est un devoir pour les chrétiens, comme pour les autres communautés religieuses. Ce dialogue est, en premier lieu, une conversation sur la vie humaine, une « attitude d’ouverture envers eux, partageant leurs joies et leurs peines ». Ainsi, nous apprenons à accepter les autres dans leur manière différente d’être, de penser et de s’exprimer. De cette manière, nous pourrons assumer ensemble le devoir de servir la justice et la paix, qui devra devenir un critère de base de tous les échanges.
251. L’Évangélisation et le dialogue interreligieux, loin de s’opposer, se soutiennent et s’alimentent réciproquement.
252. La relation avec les croyants de l’Islam acquiert à notre époque une grande importance. Ils sont aujourd’hui particulièrement présents en de nombreux pays de tradition chrétienne, où ils peuvent célébrer librement leur culte et vivre intégrés dans la société. Il ne faut jamais oublier qu’ils « professent avoir la foi d’Abraham, adorent avec nous le Dieu unique, miséricordieux, futur juge des hommes au dernier jour ». Les écrits sacrés de l’Islam gardent une partie des enseignements chrétiens ; Jésus Christ et Marie sont objet de profonde vénération ; et il est admirable de voir que des jeunes et des anciens, des hommes et des femmes de l’Islam sont capables de consacrer du temps chaque jour à la prière, et de participer fidèlement à leurs rites religieux. En même temps, beaucoup d’entre eux ont la profonde conviction que leur vie, dans sa totalité, vient de Dieu et est pour lui. Ils reconnaissent aussi la nécessité de répondre à Dieu par un engagement éthique et d’agir avec miséricorde envers les plus pauvres ».
En conclusion, on doit donc reconnaître que les chrétiens sont davantage engagés dans l’Eglise que dans la société, et plus soucieux d’une vie de prière personnelle que d’un engagement collectif, pour lutter contre les injustices. La lettre sur les fidèles laïcs (Christi Fidelis) n’a pas été assimilée, elle n’est pas passée dans la pratique. Notre pape François nous rappelle (La joie de l’Evangile=EG n°178) : » À partir du cœur de l’Évangile, nous reconnaissons la connexion intime entre évangélisation et promotion humaine, qui doit nécessairement s’exprimer et se développer dans toute l’action évangélisatrice ».
-La catéchèse : C’est un aspect essentiel de la vie de l’Eglise, et elle concerne directement l’évangélisation et la dimension missionnaire de la communauté. Mais encore faudrait-il
s’interroger sérieusement, sur les raisons qui poussent certains catéchumènes à demander le baptême. La religion traditionnelle est essentiellement locale, en lien avec la terre des ancêtres. Beaucoup de catéchumènes demandent à entrer dans l’Eglise, ou à devenir musulmans, pour appartenir à une religion universelle et qui paraît plus moderne. C’est donc un moyen de progrès social, mais pas obligatoirement de conversion au Christ. Ce qui explique qu’un certain nombre de catéchumènes disparaissent une fois qu’ils ont « gagné le baptême ».
Et parmi ceux qui continuent à pratiquer, il semble qu’un certain nombre d’entre eux vivent leur foi chrétienne dans l’esprit de la religion traditionnelle. Ou pour dire les choses autrement, qu’ils continuent à vivre la religion traditionnelle à l’intérieur du cadre de la religion chrétienne. Dans ces conditions, peut-on parler vraiment d’évangélisation ? Ils sont baptisés, sont-ils vraiment convertis à Jésus Christ ? Comment alors être missionnaires à leur tour ? Ce qui semble attirer ces catéchumènes, c’est l’amitié et l’esprit de famille qui règnent dans l’Eglise, et aussi la beauté et la qualité des prières et de la liturgie. Et également les soutiens des communautés chrétiennes et de la Caritas. C’est très bon et important. Mais il reste que beaucoup de nouveaux baptisés se contentent de participer à la messe le dimanche, sans véritable engagement ni dans l’Eglise ni dans la société, et sans vrai souci d’évangélisation de leurs frères et de leurs sœurs.
Le lieu où se font l’évangélisation et la catéchèse, c’est la paroisse. On peut d’ailleurs regretter que cette catéchèse ne se fasse pas davantage dans les quartiers. La catéchèse se fait aussi dans les écoles catholiques au risque de devenir une matière scolaire parmi d’autres, et d’être faite par des enseignants pas toujours motivés. Et il reste la question : est-ce que cette catéchèse est vraiment une évangélisation ? Pour les catéchumènes eux-mêmes oui. Mais elle ne semble pas les former pour qu’ils soient eux-mêmes évangélisateurs de leurs frères. En tout cas, les thèmes enseignés en catéchèse devraient certainement être revus pour répondre davantage aux besoins des gens et à l’évolution actuelle de la société.
-L’apostolat des jeunes : Le thème des JMJ (Journées Mondiales de la Jeunesse) nationales de cette année était : « Jeunes, acteurs de la nouvelle évangélisation ». Ce qui montre que l’on porte le souci de l’évangélisation dans l’Eglise. Mais ce n’est pas sûr que cela débouche sur un véritable engagement des jeunes pour l’évangélisation. On a l’impression que beaucoup de jeunes aiment participer à de grandes rencontres ou des marches pèlerinage, mais qui ne transforment pas vraiment leur vie. Cela se manifeste par de grandes manifestations, qui souvent n’ont pas de suivi. Dans notre paroisse, lorsque nous avons voulu organiser une rencontre des jeunes marcheurs après la marche du pèlerinage national, pour voir comment mettre en pratique la formation reçue, très peu sont venus. Comment passer à des actions concrètes organisées, suivies et réfléchies, pour soutenir cette d’évangélisation des jeunes, par les jeunes ? Les jeunes chrétiens ont tendance à se retrouver entre eux dans leurs amicales, mais ils ne sont pas tellement présents dans les ASC (Associations Socio Culturelles) et autres organisations des jeunes dans les quartiers.
Bien sûr ces manifestations publiques de foi ont leur importance. Mais peut-on parler là d’une véritable évangélisation en profondeur ? En tout cas, ce qui attire le plus les jeunes dans le diocèse, mais aussi les adultes, ce sont des amicales où on se retrouve pour faire des fêtes et organiser des soirées dansantes. Les activités principales sont des activités lucratives : repas (khaware), concerts ou soirées payantes pour gagner de l’argent. Cet argent étant surtout utilisé pour des repas et des sorties, ou pour acheter des tenues, tee-shirts et uniformes et organiser des fêtes pour les seuls membres, mais pas pour aider les plus pauvres, même pas
ceux qui appartiennent au groupe en question, qu’ils soient choristes, scouts, enfants de choeur ou autre chose. Encore moins pour le développement du pays, et le soutien de projets pour les plus démunis. Quand Zachée a parlé avec Jésus, il lui a dit (Luc 19,2-7) : » je vais donner la moitié de mon argent aux pauvres. Et si j’ai fait du mal à quelqu’un, je vais le payer 4 fois ». Il manque gravement de gratuité dans nos mouvements et associations.
L’Eglise risque de devenir une entreprise commerciale, ou une société d’organisation de fêtes et de danses. Ce qui attire les chrétiens, beaucoup plus que l’engagement dans leur milieu de vie, ce sont par exemple les chorales où les gens passent de nombreuses heures en répétition de chants, plusieurs soirées par semaine, souvent au détriment de leur vie de famille, et de leurs études pour les élèves et les étudiants. La conséquence, c’est que les eucharisties se transforment en concerts, ce qui est tout à fait à l’opposé de « la participation pleine et active de l’assemblée » demandée par le décret sur la Liturgie du Concile Vatican 2. Dans nos assemblées, la foule ne chante plus. Les concerts religieux (choralies) se terminent en soirées dansantes. Et pour venir animer par exemple les mariages, ces chorales se font payer.
-Ce qui attire aussi beaucoup les chrétiens jeunes et adultes, ce sont aussi les mouvements charismatiques. Ce n’est pas le lieu ici d’en faire l’évaluation. Ils ont certainement un rôle important dans l’évangélisation, par leur joie et leur courage de présenter officiellement Jésus Christ et son Evangile, sans peur et sans complexe. Il est sûr qu’ils regroupent de nombreux jeunes et adultes, en proposant des formes de prières plus libres et plus animées, mais qui ne sont pas exemptes d’illusion et de sentimentalisme. Or, la foi ce n’est pas seulement une question d’affectivité forte : « avoir le cœur tout chaud ». Elle demande un engagement réel dans la vie. Il est clair que par ailleurs, beaucoup de gens entrent dans ces mouvements plus par intérêt personnel, que par volonté de vivre vraiment avec le Christ. Par exemple : pour trouver du travail, réussir son mariage, avoir des enfants, obtenir son examen, etc. L’un des signes de cela, c’est le nombre de bénédictions qui s’y pratiquent. Et aussi la recherche de signes extraordinaires, de révélations, de rêves, d’apparitions, de conseils, etc. L’Evangile de Jésus Christ ne suffit plus. Or l’évangélisation c’est bien cela : faire découvrir et aimer Jésus Christ, et vivre de son Evangile. Par rapport à la question qui nous intéresse ici, l’évangélisation, on peut aussi se poser des questions sur ce qui se dit dans ces groupes sur l’action de Satan et des démons, et plus largement, sur le péché et le mal dans le monde, et sur la recherche de protections. Comme si le monde n’était pas déjà sauvé par Jésus Christ. Il y a aussi l’illusion que, si on a réussi à rassembler beaucoup de monde, que l’on a des gens qui parlent en langues et qui entrent en transe, que l’on entend un certain nombre de témoignages plus ou moins extraordinaires ou miraculeux, on a assuré une véritable évangélisation et une transformation de la société.
-Par rapport à l’engagement politique des chrétiens, il y a eu tout un effort du côté de la hiérarchie pour pousser les chrétiens à s’engager dans la politique, et pour lutter contre cette idée « enseignée par les anciens missionnaires » (sic), qu’un chrétien ne doit pas faire de politique. Sous la conduite de la commission Justice et Paix, une réflexion approfondie a été faite au moment des dernières élections, pour pousser les chrétiens à voter et à s’engager politiquement. Et aussi pour étudier les programmes des différents partis et faire réfléchir les gens dans les quartiers au choix du candidat pour qui voter. Mais cette réflexion importante, quand elle a été faite, est restée enfermée, à l’intérieur de l’Eglise alors qu’on a beaucoup insisté auprès des chrétiens et des communautés, pour qu’ils partagent leurs formations et leurs documents dans leurs quartiers, avec tout le monde. Cela n’a pas été fait. La communauté chrétienne reste centrée sur elle et enfermée dans ses problèmes, ce qui à mon avis, est en opposition directe avec une nouvelle évangélisation. On est prêt à accueillir les gens chez nous, mais beaucoup moins à aller vers eux, et encore moins à accueillir les valeurs et les richesses spirituelles qu’ils pourraient nous apporter. Aux dernières élections locales, un certain
nombre de chrétiens se sont engagés dans la politique. Mais ils sont encore trop peu nombreux. Et il reste à savoir dans quelle mesure leur foi et l’Evangile est à la base de leur engagement et de leurs actions futures ? Et quel soutien l’Eglise va leur apporter pour cela ? Quand les chrétiens s’engagent en politique, on a souvent l’impression qu’ils cherchent surtout à obtenir des aides, et même des faveurs pour leur paroisse et pour l’Eglise, beaucoup plus qu’à vouloir faire avancer la société toute entière dans l’esprit de l’Evangile, et à apporter dans les structures officielles les soucis des plus pauvres et de tous ceux qui sont traités injustement. Notre pape écrit (EG 205) : » La politique tant dénigrée, est une vocation très noble, elle est une des formes les plus précieuses de la charité, parce qu’elle cherche le bien commun… Je prie le Seigneur qu’il nous offre davantage d’hommes politiques qui aient vraiment à cœur la société, le peuple, la vie des pauvres ! »
-Les médias : Ils peuvent être un moyen important d’évangélisation. Au Sénégal nous avons la chance d’avoir, non seulement une radio catholique, mais surtout la possibilité d’intervenir dans les différentes télévisions et radios publiques et communautaires. C’est une grande opportunité que l’on nous offre. Malheureusement, on n’a pas toujours le souci d’y présenter Jésus Christ et l’Evangile à la population musulmane, qui est très largement majoritaire et qui forme donc le plus grand nombre des auditeurs. On préfère passer à la télévision des messes, des ordinations sacerdotales et des professions religieuses, sans même prendre le soin, au niveau vocabulaire, de présenter les choses d’une façon compréhensible pour des non chrétiens. De même, les émissions catholiques à la radio consistent souvent à faire une sorte de liturgie de la parole, relire les trois lectures du dimanche en question et d’en faire un commentaire qui s’adresse aux seuls chrétiens et en français, alors que la langue parlée par la majorité de la population et comprise par tous est le wolof et non pas le français. On retrouve toujours la même question. Pour beaucoup, évangélisation cela veut dire conversion au christianisme, baptême et entrée dans l’Eglise catholique. On n’a pas l’idée que l’on peut évangéliser les musulmans qui restent musulmans, c’est-à-dire de leur permettre de vivre leur foi dans l’esprit de l’Evangile, comme Jésus l’a fait avec les gens des autres religions qu’Il a rencontrés.
-Les CEB : (Communautés Ecclésiales de Base) : Ces communautés c’est la famille chrétienne dans le quartier. Elles devraient porter le souci de la vie de tous les habitants, et être engagées avec les autres personnes du quartier, pour y construire ensemble le Royaume de Dieu. Mais la plupart du temps, il n’y a pas eu une véritable formation et réflexion sur ce que doit être une communauté chrétienne de quartier. Non seulement les responsables n’ont pas été formés mais souvent, ils ont été abandonnés à eux-mêmes, les prêtres en particulier n’ayant pas la volonté de participer aux réunions de communautés. Les chrétiens se sont retrouvés tout seuls et comme ils ne savaient pas quoi faire, pendant ces réunions, peu à peu, ils en sont venus simplement à réciter le chapelet. Au lieu d’être une famille chrétienne qui prend en charge l’évangélisation de tous, les réunions des communautés sont devenues simplement des réunions de prières. Bien sûr la prière est essentielle à la vie chrétienne, mais elle doit déboucher sur une transformation de la vie, et une action dans le milieu où l’on se trouve.
Relisons l’avertissement de notre pape François dans sa lettre « La joie de l’Evangile » EG n° 95 : « Dans certaines Eglises, on note un soin ostentatoire de la liturgie, de la doctrine ou du prestige de l’Église, mais sans que la réelle insertion de l’Évangile dans le Peuple de Dieu et dans les besoins concrets de l’histoire ne les préoccupe. De cette façon, la vie de l’Église se transforme en une pièce de musée, ou devient la propriété d’un petit nombre…. Elle est privée du sceau du Christ incarné, crucifié et ressuscité, elle se renferme en groupes d’élites, elle ne va pas réellement à la recherche de ceux qui sont loin, ni des immenses multitudes assoiffées
du Christ. Il n’y a plus de ferveur évangélique, mais la fausse jouissance d’une autosatisfaction égocentrique ».
2) L’EVANGELISATION
Que devient l’évangélisation dans tout cela ? Les chrétiens aiment dire qu’ils sont des modèles, et qu’ils sont admirés par les musulmans qui les entourent, pour leur sérieux et leur engagement dans le travail, et par rapport à l’argent. Dans la réalité, les choses sont peut-être moins belles et de toutes façons, cela ne conduit pas obligatoirement à une véritable évangélisation. Les chrétiens cherchent davantage à être des exemples qu’à permettre aux non chrétiens de vivre les valeurs de l’évangile. Et beaucoup semblent avoir une politique du tout ou de rien. On est chrétien ou musulman, les jeux sont faits. On ne cherche donc pas à permettre aux musulmans de mieux connaître Jésus Christ, en allant plus loin que ce qu’il en est dit dans le Coran, pour qu’ils vivent dans l’esprit de l’Evangile, même s’ils restent musulmans.
Par rapport à l’évangélisation, il est important de garder la gratuité de nos activités et le respect de la liberté des gens, pour éviter tout prosélytisme, comme Jésus Christ l’a fait lui-même. Et que les conversions ne soient pas causées par le désir de bénéficier des actions humanitaires et caritatives de l’Eglise. L’évangélisation doit se faire d’une façon désintéressée, dans l’amour de Dieu qui est gratuit et désintéressé (« ce que vous avez reçu gratuitement, donnez-le aussi gratuitement »). Cette question n’est pas nouvelle, elle se pose depuis le début de l’Eglise, mais il est très important d’y réfléchir dans le cadre de la société sénégalaise actuelle, avec tous les bouleversements qu’elle connaît.
-Ce qui ralentit l’évangélisation, c’est d’abord qu’elle est difficile, surtout dans un pays à très grande majorité musulmane, même si les gens sont très tolérants. L’Eglise catholique a été reconnue et soutenue au temps de la colonisation. Depuis, elle n’a pas pris suffisamment conscience qu’elle est une minorité, et elle n’en a pas tiré les conclusions. Jésus disait : « N’ayez pas peur, petit troupeau » (Luc 12,32). Il disait aussi « Vous êtes le sel de la terre ». Il suffit d’un peu de sel, pour donner du goût à tout le plat. Mais encore faut-il que le sel ne perde pas sa force, sinon on lui marche dessus (Mat 5,13). Et surtout qu’il ne reste pas dans la boîte sur l’étagère, mais qu’il soit vraiment au milieu de la nourriture, présent et agissant. Même si la lumière de l’Eglise n’est pas sous le boisseau, elle reste encore trop souvent enfermée dans la maison. Elle éclaire ceux qui sont dans la maison, mais elle n’est pas encore ouverte, sur une colline, pour éclairer tous les hommes (Mat 5,14). Et le levain est plus souvent partagé, entre chrétiens, que présent dans la pate humaine de la société (Mat 13,33).
-Le deuxième obstacle c’est que les chrétiens sont encore restés à une conception, soit de la religion traditionnelle, soit de l’Islam, plus qu’à une évangélisation dans l’esprit de Vatican II. Dans la religion traditionnelle, dans la mesure où c’est une religion liée à la terre et au culte des ancêtres, on dit facilement : chacun a sa religion. Donc, on n’a pas besoin d’aller chercher les autres, qui habitent ailleurs et ont d’autres ancêtres. Les musulmans, eux, cherchent à convertir les gens à l’islam. Et les chrétiens auraient tendance à faire la même chose : chercher à convertir, conversion étant alors synonyme de baptiser les gens pour les faire entrer dans l’Eglise, et non pas changer ses idées, son cœur et sa vie. Par conséquent, si les musulmans contactés ne veulent pas être baptisés, on les laisse poursuivre leur religion,
sans plus s’occuper d’eux. On se contente de vivre en paix avec eux. Alors que Jésus est venu faire tout à fait autre chose : il est venu offrir le Royaume de Dieu à tous les hommes, pour permettre à tous de vivre les valeurs du Royaume à l’intérieur de leur propre religion, même s’ils n’entrent pas dans l’Eglise.
Il est sûr que, malgré les limites que j’ai signalées, à travers toutes les activités sociales et autres de l’Eglise, l’esprit de l’Evangile et la connaissance de Jésus Christ passent certainement. Et qu’un certain nombre de musulmans vivent leur religion et comprennent le Coran, différemment et d’une façon plus spirituelle, grâce à leurs contacts avec les chrétiens. Par exemple, pour ne pas se limiter au jeûne mais chercher une vraie conversion au moment du Ramadan, suite à la façon des chrétiens de vivre le Carême. Et aussi dans la façon de prier, plus personnelle et à partir de la vie, en dépassant la seule récitation de formules. Ou encore à vivre leur foi dans l’amour, et pas seulement garder les 10 commandements d’une façon parfois moralisante ou extérieure. On peut se demander, à l‘inverse, dans quelle mesure la foi des chrétiens est purifiée et grandie par leur vie en commun avec les musulmans. En effet, les musulmans nous appellent à un respect de Dieu plus grand : « Dieu est Dieu, et il n’y a pas d’autre Dieu que Dieu ». Ils prient 5 fois par jour, et nous rappellent l’importance de la prière, et de manifester notre foi en public. Le sérieux avec lequel ils jeûnent pendant le Ramadan nous interroge sur la façon dont nous vivons le Carême. Et beaucoup d’autres choses encore. Mais combien de chrétiens, trop sûrs de leur foi, sont prêts à se laisser interpeler par les musulmans ? Or il ne peut pas y avoir d’évangélisation sans dialogue et accueil de l’autre.
– Ce qui diminue le désir d’exercer l’évangélisation, c’est aussi l’influence de la vie moderne avec l’importance de plus en plus grande prise par les médias, qui cherchent à mettre en place non seulement une société laïque, mais une société de non foi, une société où domine l’individualisme, la recherche du plaisir, du pouvoir, de l’argent, de la facilité et du laisser-aller ; une société de stars et d’ »idoles » : footballeurs, artistes et lutteurs, et du succès facile. Cette volonté de profiter de la vie le plus possible et tout de suite, ne facilite pas bien sûr l’engagement dans la vie chrétienne, encore moins dans l’évangélisation. Mais il ne faudrait pas pour autant condamner la société moderne, qui a ses valeurs de libération, de sincérité, de progrès, etc. Et les choses n’étaient certainement pas plus faciles, ni la société meilleure, par exemple en Europe au temps de la Renaissance ou du Moyen Age. D’ailleurs Jésus nous a prévenus, déjà dans l’Evangile, que « si les gens ont été contre moi, ils seront aussi contre vous. Car le serviteur n’est pas au dessus de son Maître » (Mat 10,24)!
-Il y a aussi les limites internes à l’Eglise : La commission pour les relations avec les musulmans cherchent à renaître peu à peu, mais elle est toute petite, et elle n’est pas implantée dans les paroisses. L’Eglise locale semble plus centrée sur elle-même qu’ouverte à l’extérieur. La catéchèse est plus soucieuse de la connaissance que de l’engagement dans la société. On ne travaille pas suffisamment le lien de la catéchèse avec les CEB (communautés chrétiennes de base), les mouvements, en particulier les mouvements d’action catholique, qui d’ailleurs sont en pleine décadence actuellement et ne sont pas véritablement soutenus. Ceux qui ont le vent en poupe, ce sont les groupes de prière charismatique avec leur richesse, mais aussi leurs limites. Au niveau des jeunes ce qui plaît ce sont les amicales, et ils sont plus intéressées à faire des fêtes (xawaré) et des soirées dansantes, qu’à s’engager dans leur milieu de vie, comme je l’ai expliqué plus haut.
Se pose aussi toute la question de l’inculturation. Car il est clair qu’on ne peut pas avoir d’Evangélisation en profondeur sans inculturation. Comme le dit notre pape François (la joie de l’Evangile n°116) : » Quand une communauté accueille l’annonce du salut, l’Esprit Saint féconde sa culture avec la force transformante de l’Évangile…. Par l’inculturation, l’Église « introduit les peuples avec leurs cultures dans sa propre communauté », parce que « toute culture offre des valeurs et des modèles positifs qui peuvent enrichir la manière dont l’Évangile est annoncé, compris et vécu »….Que l’Église « fasse comprendre et présente la vérité du Christ en s’inspirant des traditions et des cultures de la région » n°118. C’est sûr qu’il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine. Le pape ajoute : n° 129 » Dans les pays où le christianisme est minoritaire, en plus d’encourager chaque baptisé à annoncer l’Évangile, les Églises particulières doivent développer activement des formes, au moins initiales, d’inculturation. Ce à quoi on doit tendre, en définitive, c’est que la prédication de l’Évangile, exprimée par des catégories propres à la culture où il est annoncé, provoque une nouvelle synthèse avec cette culture…Si nous laissons les doutes et les peurs étouffer toute audace, il est possible qu’au lieu d’être créatifs, nous restions simplement tranquilles sans provoquer aucune avancée et, dans ce cas, nous ne serons pas participants aux processus historiques par notre coopération, mais nous serons simplement spectateurs d’une stagnation stérile de l’Église ».
Les congrégations missionnaires sont présentes et nombreuses dans l’archidiocèse mais on ne leur permet pas souvent, et d’ailleurs elles-mêmes ne cherchent pas tellement, à vivre leur charisme missionnaire. Pour les religieux prêtres, ce que l’on attend d’eux c’est de tenir des paroisses, mais beaucoup moins de travailler dans la société pour l’évangélisation en tant que telle. Les religieux non prêtres et religieuses, semblent se contenter de faire fonctionner leurs œuvres, comme on l’a toujours fait. Les écoles, centres de santé et centres de formation pourraient être l’occasion d’une évangélisation plus profonde, dans le dialogue, l’accueil et le respect des autres. Toutes ces oeuvres sont comprises comme la mise en pratique de la charité du Christ, ce qui est très important et vrai, mais beaucoup moins comme une véritable évangélisation, dans le sens du dialogue et du partage de la foi, sans prosélytisme. Un simple signe : il y a très peu de sœurs et surtout de frères engagés dans les commissions Justice et Paix et dans les mouvements d’action catholique. Certains, et surtout certaines, sont plus intéressés par les chorales. Beaucoup semblent se limiter à leur vie de communauté et aux œuvres de leur congrégation. Il est difficile de trouver des frères et des sœurs pour accompagner les communautés de quartiers (CEB). Comment s’étonner alors que celles-ci n’aient pas le souci de l’évangélisation de leur quartier ?
Le pape François explique (EG n° 210) : » Il est indispensable de prêter attention aux nouvelles formes de pauvreté et de fragilité dans lesquelles nous sommes appelés à reconnaître le Christ souffrant, même si, en apparence, cela ne nous apporte pas des avantages tangibles et immédiats : les sans-abris, les toxico-dépendants, les réfugiés, les populations indigènes, les personnes âgées toujours plus seules et abandonnées etc. Les migrants me posent un défi particulier parce que je suis Pasteur d’une Église sans frontières qui se sent mère de tous ».
Il faut donc nous demander : quels sont les nouveaux secteurs de la vie moderne qui ont besoin d’être évangélisés. Car le monde a changé. Il y a de nouveaux domaines de manque de foi, comme des nouveaux secteurs de pauvreté et d’injustices, dans lesquels nous devons nous engager. Mais encore faut-il avoir des idées claires. Et chercher une véritable évangélisation, dans le sens du dialogue et du partage de la foi, sans prosélytisme. Il est important de savoir lire les signes des temps, comme nous l’a rappelé le 2° concile du Vatican, à la suite de Jésus Lui-même (Mat 16,3).
Il est absolument nécessaire que les membres des congrégations missionnaires retrouvent leur souffle et le souci de l’évangélisation, et qu’ils reviennent à leur charisme. Même s’ils travaillent en paroisse, que celle-ci soit ouverte à tous, avec le souci des plus pauvres, et qu’ils ne se laissent pas enfermer dans les activités paroissiales. Et qu’ils poussent les chrétiens à s’engager davantage dans la société, en groupe et pas seulement personnellement, comme Jésus a envoyé l’équipe des apôtres dans le monde.
Encore faut-il en prendre les moyens. D’abord un véritable renouvellement spirituel, comme cela se cherche chez les spiritains depuis leur dernier chapitre général. Mais aussi la formation : que les étudiants soient plus intéressés par une formation pastorale missionnaire que par les diplômes, comme l’a rappelé fortement et plusieurs fois le pape François. Et qu’après la formation de base, on ne se contente pas d’envoyer certains se former en philosophie, théologie, liturgie, droit canon…mais aussi dans les sciences humaines : éducation, santé, développement, justice et paix, animation de groupe…Sinon, comment pourront-ils travailler avec les malades du Sida ou d’Ebola, avec les prostitués et les enfants de la rue, avec les émigrés et les marginaux, pour lutter pour les droits humains et aider les pauvres à se prendre en main, et tant d’autres choses.
Rappelons-nous ce que nous dit notre pape François dans sa lettre sur la Joie de l’Evangile : Oui au défi d’une spiritualité missionnaire n°78 : « Aujourd’hui, on peut rencontrer chez beaucoup d’agents pastoraux, y compris des personnes consacrées, une préoccupation exagérée pour les espaces personnels d’autonomie et de détente, qui les conduit à vivre leurs tâches comme un simple appendice de la vie, comme si elles ne faisaient pas partie de leur identité. En même temps, la vie spirituelle se confond avec des moments religieux qui offrent un certain soulagement, mais qui ne nourrissent pas la rencontre avec les autres, l’engagement dans le monde, la passion pour l’évangélisation. Ainsi, on peut trouver chez beaucoup d’agents de l’évangélisation, bien qu’ils prient, une accentuation de l’individualisme, une crise d’identité et une baisse de ferveur. Ce sont trois maux qui se nourrissent l’un l’autre ».
79. Comme conséquence, beaucoup d’agents pastoraux, même s’ils prient, développent une sorte de complexe d’infériorité, qui les conduit à relativiser ou à occulter leur identité chrétienne et leurs convictions. ..Ils finissent par étouffer la joie de la mission par une espèce d’obsession pour être comme tous les autres et pour avoir ce que les autres possèdent. De cette façon, la tâche de l’évangélisation devient forcée et ils lui consacrent peu d’efforts et un temps très limité.
80. Il faut souligner le fait que, même celui qui apparemment dispose de solides convictions doctrinales et spirituelles, tombe souvent dans un style de vie qui porte à s’attacher à des sécurités économiques, ou à des espaces de pouvoir et de gloire humaine qu’il se procure de n’importe quelle manière, au lieu de donner sa vie pour les autres dans la mission. Ne nous laissons pas voler l’enthousiasme missionnaire !
Les possibilités ne manquent pas : Au niveau de l’Etat, nous avons la chance de vivre dans un pays laïc qui soutient une laïcité positive où l’Etat reconnait et soutient chacune des religions. Même s’il nous fait rester très attentifs, face au désir de certains d’islamiser la société, et au danger d’intégrisme de certains mouvements qui pourraient venir de pays voisins. . Mais il y a aussi le danger de certains chrétiens qui sont eux aussi de tendance intégriste. Pour le moment, l’Eglise catholique est acceptée et même reconnue comme les autres religions dans le pays.
-Dans la société civile, nous avons la chance d’avoir un certain nombre d’ONG et autres organisations qui s’engagent pour les droits humains, et donc en particulier la liberté de religion. Nous avons la possibilité de travailler avec elles. Même si beaucoup sont très attirés par la culture païenne moderne proposée par les pays occidentaux, à l’ONU et dans les grandes organisations internationales, qui tendent à diminuer fortement le respect de la vie et le soutien de la famille, sans parler des pressions pour autoriser l’euthanasie, l’avortement, etc…
-Nous vivons dans une culture tolérante qui accepte les idées et la liberté des autres, et cela est renforcé dans le sud du pays par le fait que dans les mêmes familles il y a des chrétiens et des musulmans. La culture traditionnelle africaine commune à tous les croyants est ainsi une grande chance pour nous, et une base pour construire la paix, l’acceptation mutuelle et le dialogue, et donc pour permettre une véritable évangélisation.
UNE NOUVELLE ETAPE DE L’EVANGELISATION
Il est important de savoir lire les signes des temps, comme nous l’a rappelé le 2° concile du Vatican, à la suite de Jésus Lui-même (Mat 16,3). Lorsque les premiers missionnaires sont arrivés au Sénégal, ils se sont consacrés à implanter l’église locale, ce qui est bien normal. Ils se sont donc consacrés à la catéchèse, l’organisation des paroisses et à ouvrir des séminaires. Mais en même temps, ils ont eu le souci du développement humain, de l’éducation et de lancements de projets dans les différents secteurs de la vie. Ils n’ont donc pas oublié la dimension caritative et humanitaire : mise en place de dispensaires, d’écoles, de centres de formation professionnelle et technique etc. Maintenant, et déjà depuis de nombreuses années, l’Eglise est en place. Est-ce que les congrégations religieuses en particulier ne devraient pas se tourner plus directement vers une nouvelle évangélisation, d’ailleurs demandée par l’Eglise ? Et rendre leurs paroisses, comme toutes leurs autres activités beaucoup plus missionnaires. Les paroisses sont en place, le clergé diocésain est nombreux et travaille. Cela bien sûr doit se continuer. Mais ne faudrait-il pas passer en même temps à une deuxième étape : ne pas se li !miter à la paroisse, proposer l’évangile à tous ceux qui peuvent l’accepter, qu’ils soient chrétiens ou non, et voir tous les nouveaux secteurs de la vie moderne qui ont besoin d’être évangélisés. Car le monde a changé. Il y a de nombreux domaines de manque de foi, comme des nouveaux secteurs de pauvreté et d’injustices, dans lesquels nous devons nous engager. Mais encore faut-il avoir des idées claires sur ce qu’il faut faire.
-La congrégation pour l’évangélisation des peuples au Vatican organise une plénière du 30 novembre au 2 décembre 2015. Dans la lettre préparatoire du 26/05/2014, je lis l’affirmation suivante : « Le but ultime de l’activité missionnaire est l’évangélisation et la plantatio Ecclesiae au sein des populations où la Parole de Dieu n’a pas été semée et où elle n’a pris racine. En d’autres termes, l’Eglise, qui est signe et instrument du salut, ne vit que dans le précepte missionnaire du Christ, tant que l’Evangile n’a pas été annoncé “en tout lieu et à toute créature” (Mc 16,15). Dans le même temps, par l’annonce de l’Evangile, nait l’Eglise et sa plantatio donne forme à la Communauté des croyants ».
Je n‘aime pas beaucoup ce mot « d’implanter ». C’est comme si on amenait un arbre adulte, une Eglise toute faite (occidentale) dans le pays, que l’on vient planter sans tenir compte de la culture et des réalités locales. Ce qu’il faut c’est « semer » la Parole de Dieu dans un nouveau sol, où elle va grandir peu à peu selon les réalités de la terre locale (s’enraciner et s’inculturer). De même, je pense qu’on ne peut pas se limiter à la seule « plantatio Ecclesiae ».
Il s’agit de proposer l’Evangile à tous les hommes, quelle que soit leur religion. De toutes façons, au Sénégal, l’Eglise est maintenant implantée. Il reste l’Evangélisation : pas seulement des chrétiens mais de tous les habitants du pays, à l’intérieur même de leurs différentes cultures et religions. Pour la venue du Royaume de Dieu. Et en particulier, permettre à tous les musulmans qui le veulent et qui sont la très grande majorité, mais aussi ceux qui suivent les religions traditionnelles ou ceux qui se disent incroyants, de vivre les valeurs de l’Evangile, même s’ils restent musulmans. Comme le dit d’ailleurs le document Lumen Gentium du concile Vatican II. Dans la limite de ces pages, je me contente de 3 citations. Mais il faudrait lire le document tout entier, et aussi les autres documents du Concile, en particulier Gaudium et Spes (l’Eglise dans le monde). Sans oublier les documents plus récents du Vatican, mais aussi les déclarations de nos évêques. Simplement une citation de la lettre de François, La joie de l’Evangile n° 20 : »Tout chrétien et toute communauté discernera quel est le chemin que le Seigneur demande, mais nous sommes tous invités à accepter cet appel : sortir de son propre confort et avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de l’Évangile ».
LG 9 : « l’Eglise est l’instrument de la rédemption de tous les hommes. Elle est le sacrement visible de l’unité qui sauve les hommes ». Un sacrement c’est un signe efficace, mais c’est un signe, et non pas le but final et unique. “L’Église est, dans le Christ, en quelque sorte le sacrement, c’est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain” ( LG 1). L’Eglise est le signe et le moyen de la venue du Royaume de Dieu sur la terre. Mais elle n’est pas le Royaume en elle-même, ni toute seule.
« L’Eglise tire son origine de la mission du Fils et du Saint Esprit, selon la volonté de Dieu le Père » (LG 2). La Trinité est don réciproque et total des trois personnes dans l’amour. La mission c’est de faire entrer tous les hommes dans cet amour, et de leur apprendre à se donner à leurs frères, à l’exemple et avec l’aide de la Trinité. Comme le dit LG 48, “Le Christ (…) a constitué son Corps, qui est l’Eglise, comme le sacrement universel du salut”.
LG 4 : « La mission de l’Eglise que lui a donné son Seigneur, c’est la formation spirituelle, morale et humaine de tout homme, de toute femme et de tout enfant. Elle participe au bien des peuples, répare les fractures existant entre eux et élève la dignité humaine ». C’est cela l’implantation de l’Eglise et non pas seulement des évêques et un clergé local, la construction de bâtiments, des prières, des baptêmes et des confirmations. Et au n° 4-1 : Déjà « pour les chrétiens, le peuple de Dieu doit atteindre une maturité dans tous les aspects de la vie humaine : famille, travail, choix de vie, service, éducation etc. »
4-8 : à mon avis la mission de l’Eglise ce n’est pas seulement « d’enseigner toutes les nations et de prêcher l’évangile à toute créature pour que soit fondée l’Eglise peuple de Dieu ». C’est aussi et d’abord de permettre à tous les hommes de vivre les valeurs de l’Evangile, même s’ils n’entrent pas dans l’Eglise, et ne demandent pas le baptême. C’est-à-dire de faire venir le Royaume de Dieu, pas seulement pour les chrétiens et l’Eglise, mais pour tous les hommes. Pas seulement pour les personnes une par une, mais pour tous les peuples, toutes les sociétés, le monde entier. Et même la création toute entière, comme l’a dit le Christ avant de quitter cette terre (Marc 16,15). Et comme l’explique Paul (Rom 8,19-23).
COMMENT JESUS ANNONCE-T-IL L’EVANGILE ?
Déjà, Zacharie chante à la naissance de son fils Jean Baptiste (Luc 1,70-79) « Et toi, petit enfant, tu marcheras devant le Seigneur pour préparer ses chemins… pour éclairer ceux qui sont dans la nuit et l’ombre de la mort, et pour conduire nos pas sur le chemin de la paix ». A Noël les anges chantent (Luc 2, 10-14) « Je vous annonce une bonne nouvelle qui donnera la joie à tout le peuple… paix sur terre aux hommes que Dieu aime » et Dieu aime tous les hommes. Et c’est bien pour cela qu’Il fait connaître la naissance de son fils, non pas aux chefs religieux d’Israël, mais d’abord à des pauvres, des hommes rejetés et traités de pécheurs, les bergers, (Luc 2). Et ensuite à des savants païens venus de l’est (Matthieu 2, 1-12). Avant de s’enfuir en Egypte, là où Dieu avait déjà délivré son peuple esclave, au temps de Moïse. Et quand Marie et Joseph présentent leur enfant au Temple pour le consacrer à Dieu, Siméon chante « Il est le Salut que Tu as préparé pour tous les peuples, Lumière qui te fera connaître à toutes les nations du monde » (Luc 2, 30-32). Cette idée que Dieu aime et sauve tous les hommes est déjà très présente dans la Première Alliance (Par exemple Isaïe 12,4; 54,2 ; 56,7). Et quand Jésus à Nazareth explique sa mission, Il reprend justement le prophète Isaïe en disant : « L’Esprit de Dieu est sur moi, Il m’a choisi pour apporter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu’ils vont être délivrés, que les aveugles vont voir à nouveau, et ceux qui sont écrasés vont être relevés » (Luc 4, 18,21). Par conséquent cela me semble très clair : L’Evangile est pour tous et d’abord pour les pauvres. L’annonce de l’Evangile demande que l’on cherche d’abord à libérer les prisonniers, et les aveugles de toutes sortes : dans leur cœur, mais d’abord dans leurs corps (Luc 4, 18-21).
De même quand Jean Baptiste envoie ses disciples demander à Jésus « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » (Luc 7,20-23) » Jésus répond : « Allez dire à Jean ce que vous avez vu et entendu. Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont rendus purs, les sourds entendent, les morts reviennent à la vie, et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres ». Cela nous montre bien que l’évangélisation ce sont des actions (construire le Royaume) et pas seulement des paroles. Comme le dit Jésus : « Voyez ce que je fais ». Quand Jésus annonce l’Evangile, il commence par guérir les malades (Matthieu 15,29). Et Il nourrit la foule (Jean 6, 1) avant d’enseigner le Pain de la vie (Jean 6, 25). Cela nous montre le chemin à suivre pour l’évangélisation. En effet, nos actions sont plus fortes que nos paroles. L’évangélisation c’est une question de témoignage. On peut nous empêcher de parler, mais on ne peut pas nous empêcher de vivre l’Evangile. Comme le dit Jésus : « On vous amènera devant les tribunaux… et ce sera pour eux un témoignage » (Matthieu 10, 18). Tous les hommes ont envie d’être heureux. Si nous sommes heureux en vivant de l’Evangile, ils auront envie de venir avec nous pour rencontrer le Christ. Car l’Evangile est une Bonne Nouvelle.
L’Evangile s’adresse à tout le monde. C’est évident, si on regarde la vie de Jésus. Il traverse sans arrêt les frontières pour aller de l’autre côté du Jourdain (Marc 10, 1), en Samarie (Jean 4,4) ou dans la région de Génésareth (Marc 6, 53). Il guérit les malades et ceux qui sont possédés des esprits mauvais, sans rejeter personne, Il enseigne tout le monde sans distinction, Il aime tous les hommes, Il est accueillant à tous. Mais plus que cela, Il reconnaît l’action de l’Esprit Saint dans le cœur des païens, et Il en rend grâce à Dieu son Père. Il remarque que c’est seulement le lépreux samaritain, qui vient lui dire merci d’être guéri. Il dit de l’officier romain (Mat 8,10) « Je n’ai jamais vu une telle foi en Israël ». Et Il en tire la conclusion « Ils viendront de l’est et de l’ouest, et prendront place à table au repas du Royaume ». Et nous ne pouvons pas oublier que, avant de recevoir le Corps du Christ dans la communion, c’est la prière d’un païen, cet officier, que nous disons : » Seigneur, je ne suis pas digne que tu viennes chez moi, mais dis seulement une parole, et je serai sauvé ». De même, Jésus envoie la Samaritaine, une païenne, une femme de mauvaise vie, pour le faire connaître aux gens de
son village, des samaritains, des païens eux aussi (Jean 4,28). Et c’est une femme syrienne qui lui fait comprendre, qu’Il est envoyé par son Père pour tous les hommes : « Même les chiens sous la table mangent les morceaux, que les enfants font tomber » (Marc 7,28).
Jésus dira lui-même : « Quand je serai élevé de terre, j’attirerai tous les hommes à moi » (Jean 12,32). Et avant de monter au ciel il dira à ses disciples « Allez annoncer la Bonne Nouvelle de l’Evangile à toute la création», en leur disant que pour cela ils doivent « chasser les esprits mauvais et parler des langues nouvelles (Marc 18,18). Il ne manque pas de rappeler aux pharisiens ce qu’a fait le prophète Jonas, pour appeler les païens de Ninive à la conversion. Et la reine de Saba qui est venue écouter le Roi Salomon. Et Il dit : « il y a plus ici que Salomon » (Matthieu 11, 20-25)). On pourrait continuer à citer de nombreux autres passages de l’Evangile qui vont dans le même sens.
Paul a consacré toute son énergie à mettre en place des communautés chrétiennes, dans tout l’empire romain. Mais il voulait des communautés ouvertes et missionnaires, qui annoncent l’Evangile à tous. Il s’écrie « Malheur à moi si je n’annonce pas l’Evangile » (pas seulement malheur à moi si je n’implante pas l’Eglise : 1°Cor 9, 16). Et il affirme : « Dieu ne m’a pas envoyé pour baptiser, mais pour évangéliser » (1° Cor 1,17). Il ajoute : « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (1° Ti 2,4).
LE ROYAUME DE DIEU
Ce qui manque à mon avis pour une véritable évangélisation, c’est une théologie du Royaume de Dieu. Sans une réflexion profonde sur ce qu’est le Royaume de Dieu, son importance et les conditions de sa venue, on en restera toujours à une conception limitée de l’évangélisation, comme une simple implantation de l’Eglise. Et on se limitera à ceux qui sont déjà chrétiens, ou qui acceptent de le devenir. Mais alors qu’en sera-t-il de tous les autres hommes ? Le pape Françoisécrit : « Évangéliser c’est rendre présent dans le monde le Royaume de Dieu. » ( EG = Evangelii Gaudium, § 176). Il ajoute n°180 : « Le Royaume nous appelle. En lisant les Écritures, il apparaît du reste clairement que la proposition de l’Évangile ne consiste pas seulement en une relation personnelle avec Dieu. La proposition est le Royaume de Dieu (Luc 4, 43). Il s’agit d’aimer Dieu qui règne dans le monde. Dans la mesure où il réussira à régner parmi nous, la vie sociale sera un espace de fraternité, de justice, de paix, de dignité pour tous. Donc, aussi bien l’annonce que l’expérience chrétienne tendent à provoquer des conséquences sociales. Cherchons son Royaume : « Cherchez d’abord son Royaume et sa justice, et tout le reste vous sera donné en plus » (Mt 6, 33). Le projet de Jésus est d’instaurer le Royaume de son Père ; il demande à ses disciples : « Proclamez que le Royaume des cieux est tout proche » (Mt 10, 7).
Je n’ai pas la place ici de présenter cette théologie du Royaume. Je me contente de quelques citations de l’Evangile, qui concernent plus directement l’évangélisation.
Dans l’Evangile, on parle très souvent de la Bonne Nouvelle du Royaume (Matthieu 4, 23 – Matthieu 9, 35 – Luc 4, 43 etc.). Ce qui montre bien que l’évangélisation est liée à la venue du Royaume. Jésus nous a appris à prier ainsi : « Notre Père… que Ton Règne (ton Royaume) vienne ». Le Royaume c’est vraiment ce qu’il y a de plus important. Comme le dit encore Jésus (Matthieu 6,33) : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, et Dieu vous donnera tout le reste en plus ». Et ces paroles s’adressent à tous les hommes, comme les béatitudes. Pas seulement aux chrétiens. Jésus, le nouveau Moïse, les prononce en haut de la montagne. Le Royaume c’est un trésor, une perle fine (Matthieu 13, 44-45) pour lequel nous sommes prêts à tout laisser.
Le Royaume, c’est d’abord Jésus lui-même. C’est Lui que nous aimons, c’est avec Lui que nous vivons, c’est autour de Lui que nous nous rassemblons. Jésus disait : « Quand deux ou trois sont réunis en mon nom, Je suis au milieu d’eux » (Matthieu 18, 20). Le Royaume, c’est vivre avec Jésus, et comme Lui.
Le Royaume de Dieu n’est pas au ciel, il est sur la terre, comme nous l’a dit Jésus dans la prière du Notre Père « Que Ton Règne vienne, Que Ta Volonté soit faite, sur la terre comme au ciel ». Le Royaume, c’est donc commencer à vivre déjà avec tous sur la terre, comme au ciel. Le Royaume est pour tous, pas seulement pour les chrétiens. Et Dieu y appelle sans cesse de nouvelles personnes, comme le maître a appelé les ouvriers aux différentes heures de la journée (Matthieu 20,1). Le Royaume est pour tout le monde, car Jésus « a racheté pour Dieu, des hommes de toutes tribus, de toutes langues, de tous peuples et de toutes nations » (Apocalypse 5,10). Cela, Dieu le disait déjà, par la bouche d’Isaïe (56,7): »Ma maison s’appellera : maison de prière pour tous les peuples ». Et Jésus explique « Il y a beaucoup de places, dans la maison de mon Père » (Jean 14, 2).
Le Royaume, comme l’Evangile, est d’abord pour les pauvres et pour ceux que l’on fait souffrir à cause de la justice (comparer Matthieu 5, 3 + 10 et Luc 4, 18-21). C’est donc à eux que nous annonçons l’Evangile en premier. Et aussi aux pécheurs, et aux hommes et aux femmes de mauvaise vie. Jésus l’a dit avec force : « Les ramasseurs d’impôts et les prostituées arriveront avant vous, dans le Royaume de Dieu » (Matthieu 21, 31).
-Quels sont les signes de ce Royaume, qui nous montrent ce que nous devons faire pour qu’il arrive parmi nous ? En premier, c’est l’Amour. Quand l’enseignant de la loi rappelle le commandement de Moïse « Tu aimeras le Seigneur Ton Dieu de tout ton cœur… tu aimeras ton prochain comme toi-même », Jésus lui dit : « Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu » (Matthieu 12, 34). Evangéliser et faire venir le Royaume, c’est pardonner et avoir pitié de nos frères (Matthieu 18, 23). Comme nous le dira Jésus, à la fin du monde « Venez, vous qui êtes les bénis de mon Père. Recevez le Royaume qu’Il a préparé pour vous, depuis le début du monde… car j’ai eu faim, vous m’avez donné à manger. J’ai eu soif, j’étais étranger, nu, malade, en prison… Tout ce que tu as fait au plus petit de mes frères, c’est à Moi que tu l’as fait » (Matthieu 25, 40). Ce n’est donc pas seulement aimer, mais c’est reconnaître dans tout homme un enfant de Dieu, et un frère ou une sœur de Jésus. C’est de cette façon là, que nous pouvons vraiment évangéliser. Et accueillir tous les hommes dans le respect, et sans distinction.
C’est s’engager pour la justice, qui nous fait briller dans le Royaume de Notre Père (Matthieu 13, 43). C’est en même temps être patient. Et supporter le mal qui est dans le monde avec espérance, comme le maître attend le temps de la moisson, pour brûler la mauvaise herbe (Matthieu 13, 24). Le Royaume c’est se faire petit devant Dieu et devant les hommes, comme un enfant (Matthieu 18, 1). Et se faire le serviteur de tous, comme Jésus a lavé les pieds de ses apôtres (Jean 13). L’évangélisation, comme le Royaume, nous demande de laisser le mal. Car le Royaume est comme un filet, qui attrape toutes sortes de poissons, et que les anges viendront trier à la fin du monde (Matthieu 13, 47). Ce n’est donc pas à nous de choisir les gens.
Tout cela nous demande d’agir en vérité car « ce ne sont pas ceux qui disent Seigneur, Seigneur, qui entreront dans le Royaume des cieux. Mais ceux qui font la volonté de mon Père « (Matthieu 7, 21). Et Paul explique : « le Royaume de Dieu ce n’est pas une affaire de paroles, mais de puissance » (1ère aux Corinthiens 4, 20), « ce n’est pas une question de
nourriture ou de boisson, mais de justice, de paix et de joie dans l’Esprit Saint » (Romains 14, 17). Face à la situation de notre Eglise que j’ai décrite au début, le Seigneur nous demande donc d’écouter le Saint Esprit, pour « tirer de notre trésor, de l’ancien et du nouveau ». Et de nous adapter au monde de ce temps (Matthieu 13, 52). De commencer tout petit, comme la graine de moutarde, qui est la plus petite des graines (Matthieu 13, 21). Et ensuite de grandir peu à peu, et d’étendre nos bras pour accueillir nos frères, comme l’arbre étend ses branches pour que les oiseaux viennent se reposer. Et qu’ils puissent ensuite repartir librement poursuivre leur propre chemin (Matthieu 13, 31).

Il s’agit bien de partager la vie des hommes et de nous engager dans la société, comme le levain doit être mélangé à la pâte pour agir, et la faire lever toute entière (Matthieu 13, 33). Jésus a dit à Pierre : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise ». Mais Il ajoute « Je te donnerai les clés du Royaume ». Pas seulement les clés de l’Eglise (Matthieu 16, 19). L’Eglise doit donc être au service du Royaume. « Un règne sans limite et sans fin, règne de vie et de vérité, règne de grâce et de sainteté, règne de justice, d’amour et de paix » (Préface du Christ Roi).

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire