Prison



ANIMATION A LA PRISON DES FEMMES DE RUFISQUE
N.B. Ce document n’est pas accompagné de photos ; les photos étant absolument interdites en prison.
La ville de Rufisque est située à 25 km de Dakar au Sénégal. Là se trouve une prison pour une centaine de femmes condamnées pour divers délits, aussi bien sénégalaises qu’étrangères. Certaines de ces femmes ont été arrêtées, alors qu’elles étaient enceintes ou venaient d’accoucher. Elles se retrouvent donc avec leurs bébés en prison. On comprend les problèmes et les difficultés de ces femmes d’autant plus que la prison est en fait une maison très ancienne qui a été récupérée et n’a pas été rénovée, et donc qui n’a absolument pas été construite pour être une prison fonctionnelle. En plus, cette maison n’a pas les capacités d’accueillir un tel nombre de personnes, d’où la surpopulation carcérale avec toutes ses conséquences : promiscuité, tensions, maladies etc.
La nourriture est insuffisante et les soins de santé très limités. Mais pour la plupart des femmes, la plus grande souffrance c’est d’être séparée et sans nouvelle de leurs familles, spécialement de leurs enfants.
Notre action se situe dans le cadre de l’animation des prisons reconnue par les services pénitentiaires nationaux sous la supervision du ministère de la Justice. Nous intervenons sous la direction des régisseurs des différentes prisons en lien avec le personnel pénitentiaire. Nous avons les commissions suivantes qui interviennent dans chaque prison que nous suivons (Voir le document en pièce jointe).
1) L’assistance judiciaire
2) L’assistance matérielle et socio-économique
3) L’assistance psychologique et la formation continue
4) La formation professionnelle et la réinsertion
5) La culture et la communication
6) La commission santé
Plus précisément dans cette prison des femmes, nous intervenons
1) D’abord pour une aide matérielle :
* Fournir des habits, et du matériel de santé (médicaments) et d’hygiène (savon, eau de javel etc.) en particulier pour les étrangères et pour les femmes sénégalaises venues d’autres régions du pays, et qui ne reçoivent pas de visites de la famille pour leur apporter des médicaments dont elles ont besoin et qu’on leur donne pas à l’infirmerie, parce qu’ils manquent. On se contente souvent de leur donner simplement une ordonnance, et elles doivent alors payer les médicaments à leurs frais.
* Apporter un complément de nourriture pour ces mêmes personnes.
* Etant souvent enfermées dans le noir, beaucoup de ces détenues ont des problèmes de vision et nous leur fournissons donc des lunettes.
2) Chaque semaine assurer des séances d’écoute pour accueillir et soutenir psychologiquement les détenues qui le désirent (elles sont nombreuses), sans aucune distinction de langue ou de religion. Nous intervenons en français, la langue officielle du Sénégal, en anglais, portugais et espagnol, et dans plusieurs langues africaines, en particulier le wolof, la langue véhiculaire du Sénégal , mais aussi le bambara, le soussou et le kissi (langues de Guinée) le lingala et le lari (langues du Congo), etc. pour que ces personnes puissent s’exprimer plus facilement dans leur propre langue. Tout cela bien sûr, dans la liberté totale et dans la confidentialité.
3) Assurer les relations entre les détenues et leurs familles par des visites aux parents ou des contacts par téléphone ou internet pour celles dont la famille est éloignée, en particulier celles qui viennent des pays étrangers.
4) Proposer une formation pendant le temps de la détention : alphabétisation dans différentes langues, spécialement anglais, français et wolof, apporter des revues et des livres pour celles qui savent lire. Les former à la couture, la teinture, le tricot et organiser la vente de leurs productions pour leur assurer un petit revenu qui leur permet d’acheter les produits de première nécessité à la boutique de la prison, et aussi de commencer à constituer un petit pécule préparatoire à leur sortie.
5) Assurer des bonnes relations, des échanges, et des séances de réflexions avec le personnel pénitentiaire.
6) Préparer la sortie et la réinsertion des femmes : préparer les familles à les accueillir de nouveau, leur trouver les moyens de retourner dans leur village ou leur pays, leur chercher un travail ou d’autres moyens de vivre, si possible, pour leur permettre de se prendre en charge avec leurs enfants et leurs familles.
Et pour celles qui le désirent continuer à les rencontrer et à leur assurer écoute et soutien, au moins pour celles qui résident dans la région de Dakar.
7) Nous cherchons aussi à répondre à des besoins plus personnalisés, exprimés par des détenues, dans la mesure de nos possibilités.




Jeudi 6 Novembre :
Le matin, à la prison des femmes et l’après-midi permanence à la paroisse. J’accueille de mon mieux des personnes très diverses, chacune avec son problème. Nous ne pouvons pas trouver de solution à tous les problèmes, mais au moins nous cherchons à accueillir les gens le mieux possible et à les comprendre dans les difficultés. Ce qui n’est pas toujours facile !

Jeudi 18 Décembre :
Visite à la prison des femmes. Nous sommes très heureux de nous revoir. Le point essentiel, ce sont les contacts avec les familles pour les fêtes de Noël et de fin d’année. Je vais avoir beaucoup de coups de téléphone à passer !
Samedi 20  Décembre : Je pars à la prison des femmes. Nous anticipons Noël, en collaboration avec une association « Tendre Enfance » qui soutient les bébés et leurs mères en prison. En effet, quand une femme enceinte, ou avec un bébé, est arrêtée, son enfant reste avec elle jusqu’à 3 ans. Bien sûr, ce n’est pas un lieu de vie pour un bébé. Nous faisons ce que nous pouvons pour eux.
Nous fêtons Noël d’abord avec les autorités et souhaitons les impliquer. Nous pourrons leur rappeler leurs déclarations et leurs promesses au cours de l’année. Puis nous célébrons l’Eucharistie. De nombreuses femmes musulmanes y participent, avec beaucoup de piété. Cette prière contribue vraiment à faire l’unité entre toutes.
Après la messe, nous remettons des cadeaux aux mamans pour leurs enfants. Ce ne sont pas des jouets, mais plutôt des savons, des couches, des habits et autres produits de première nécessité. Ensuite, nous partageons le repas tous ensemble et nous continuons dans la joie et la fête. Tout au long de la semaine, les activités continuent : accueil, soutien, visites
Jeudi 8 Janvier : Depuis 15 jours, je n’étais pas parti à la prison des femmes, à cause des fêtes. Nous sommes heureux de nous retrouver. En même temps, il y a beaucoup de choses à régler et beaucoup de services à rendre. Cela n’est pas toujours facile et me demande beaucoup de temps. Mais je le fais avec joie. Le soir, je passe plusieurs heures à téléphoner aux familles, un peu partout dans le monde, pour donner des nouvelles et demander aide et soutien.
Jeudi 5 Février : Le matin, visite à la prison. Je retrouve les détenues avec toujours autant de plaisir. Elles sont vraiment très gentilles et attentionnées. Ensuite, je prends le temps de parler avec les gardes ; elles ont besoin de parler elles aussi.
Vendredi 20 Mars : Ces 3 jours, je participe à une session sur la santé en prison. C’est un sujet important et pour lequel je suis concerné directement. 

Jeudi 26 Mars : Comme chaque jeudi, visite à la prison des femmes. Je suis parti de bonne heure, mais à midi je n’ai pas pu voir tout le monde. Il est vrai que certaines ont besoin de beaucoup de temps pour parler et se libérer. Mais je dois arrêter ma visite car on  ferme les portes. Je verrai en priorité la semaine prochaine celles qui n’ont pu me rejoindre aujourd’hui. Le soir, confessions dans une autre paroisse de notre secteur. Jeudi 9 Avril : Je vais à la prison des femmes, comme chaque jeudi, mais une fête y est organisée. J’attends plus de deux heures, puis je rentre. Je laisse la nourriture que j’ai apportée pour une détenue hollandaise et des habits pour une autre de Guinée Bissao. Et j’ai juste le temps de parler avec une sud-africaine. En effet, les détenues non sénégalaises ne reçoivent aucune nouvelle, ni aucun soutien. 
Dimanche, c’est le dimanche de la Miséricorde. On me demande à la télévision, pour donner un témoignage sur la façon dont on peut vivre concrètement la miséricorde dans les réalités du Sénégal. 

Jeudi 23 Avril :Visite à la prison. Une nouvelle directrice a été nommée. Comme presque chaque fois, elle se croit obligée de serrer la vis pour montrer son autorité. L’ambiance est complètement changée : surveillance, limitation des visites, interdiction d’écrire dans sa langue (seulement en français et en anglais : deux langues que beaucoup de possèdent pas). La plupart des détenues viennent me voir, découragées. D’autres arrivent même en pleurant. Je les écoute et j’essaie de les réconforter de mon mieux, et de voir comment améliorer les choses.
A mon retour, arrive un détenu qui vient d’être libéré. Avec la Caritas, nous l’aidons  à établir ses papiers pour avoir un travail de gardien. Puis, un couple, en route pour le Maroc. Nous leur donnons à manger. Ils en profitent pour se laver et envoyer un message à leur famille par Internet. Nous les aidons à trouver un logement pour quelques jours. Enfin, un autre détenu libéré nous demande l’argent du voyage pour rentrer en Guinée Bissao.

Jeudi 7 Mai : Le matin, à la prison des femmes, comme chaque jeudi
Samedi 13 Juin : Formation des visiteurs de prison sur l’écoute. Puis rencontre générale d’ATD Quart Monde.

Jeudi 25 Juin : Visite à la prison. C’est la dernière avant mes congés. Quand j’annonce la chose, les détenues sont très tristes, et moi aussi. En plus de l’accueil et de l’écoute des nombreuses femmes qui veulent me parler, et de tous les cas pratiques à régler, je vois avec la direction des problèmes plus sérieux : en particulier, le cas des détenues en prison depuis plusieurs années sans même être jugées (les Assises ne fonctionnent pas), la question des libérations conditionnelles, du rapatriement des détenues étrangères, des bébés en prison avec leurs mères, des avocats qui disparaissent, etc…
Mercredi 1er Juillet : La nuit, un appel téléphonique nous annonce que l’un de nos amis a été agressé à une cinquantaine de kilomètres de Dakar. Nous allons le chercher et l’amenons dans un premier hôpital…qui n’a pas de radio. Nous partons en pleine nuit dans un deuxième hôpital. On lui remet le bras en place et on le plâtre. Mais la radio révèle que l’os a été cassé : il faudra une opération  Mais d’abord, il faudra trouver l’argent : 300.000 F CFA. Nous ne savons pas où les trouver ! On verra !
Le plus pressé, c’est de régler le problème de la police. Nous faisons retirer la plainte et allons rencontrer les agresseurs pour tenter une réconciliation et une prise en charge des soins de santé. Cela nous prend beaucoup de temps et de déplacements. Mais nous n’allons pas abandonner l’affaire.
En même temps, encore des visites et demandes d’aides : deux détenus libérés mais qui n’ont aucun moyen pour vivre. C’est le cas de tous les libérés : on les met dehors, sans aucun soutien. Lorsque ce sont des Sénégalais, nous préparons leur sortie de prison en prenant contact avec leur famille. Mais lorsqu’il s’agit d’étrangers, ils n’ont aucun moyen de rentrer chez eux, ni même de quoi manger. Et alors bien sûr beaucoup retombent dans la délinquance.
Nous nous retrouvons à midi avec l’équipe de l’aumônerie pour préparer la prochaine rencontre avec plusieurs magistrats du Tribunal. Nous avons beaucoup de problèmes à leur soumettre : d’abord celui de la sortie de prison ; ensuite toute la vie et le suivi à la prison, en particulier les détenus depuis 4-5 ans et qui ne sont toujours pas jugés, ni les hommes ni les femmes, parce que les assises ne fonctionnent pas ; l’incarcération des homosexuels et des femmes ayant avorté, ce qui est absolument inadmissible et certainement pas une solution, même si on est contre l’homosexualité ou l’avortement. D’autres questions, comme la réduction des peines et le rapatriement des détenus étrangers dans leurs pays, en particulier un certain nombre de Français(es), même s’ils sont maintenus en prison. Au moins ils seront chez eux et pourront être visités par leurs familles. Et aussi les personnes ayant fumé ou vendu des drogues douces (marijuana) condamnées aux Assises comme pour les grands trafiquants de drogues dures (cocaïne, héroïne…). Ensuite, les différences entre les prisonniers : les gens du « peuple » qui se retrouvent à 100 dans la même chambre, pendant que les grands politiciens, artistes ou fonctionnaires ont une cellule personnelle avec tout le confort nécessaire. Les problèmes ne manquent pas !


.  










ANIMATIONS DANS LES PRISONS DE « LIBERTE 6 » A DAKAR : Hommes et Femmes

N.B Ceci n’est pas une présentation de notre organisation, mais de simples extraits de mon journal, pour ceux que cela peut intéresser. Merci !
En général : Ecoute chez les hommes le mercredi ; réunion chez les femmes  le vendredi et chez les hommes le samedi

Mardi 3 Juillet :
Le soir, rencontre de l’aumônerie de nos trois prisons. Nous faisons le tour de chacune de nos commissions pour évaluer leur travail : chacun apporte ses idées pour améliorer les activités. Puis nous abordons un certain nombre d’autres points : la venue d’un conteneur avec des outils pour lancer des ateliers ; le contenu de notre audience avec la ministre de la Justice ; les émissions radio ; les avocats et médecins à trouver qui accepteraient d’intervenir bénévolement ; la formation ; et encore beaucoup d’autres choses.( Voirle compte-rendu)
Mercredi 4 Juillet :
Matinée d’écoute à la prison avec son lot de problèmes et de souffrances. Je récupère des numéros de téléphone pour donner des nouvelles aux familles. Mais certains n° sont faux (les détenus cherchent à les reconstituer par cœur, car la plupart du temps ils ont perdu leurs papiers) ; d’autres ne décrochent même pas ; d’autres enfin refusent tout contact avec leur parent prisonnier. Mais beaucoup sont heureux de ce contact, ils nous demandent de le continuer et de venir les rencontrer. Cela nous permettra de préparer le retour et la réinsertion. Mais souvent, notre premier travail est de retrouver nous-mêmes des traces de la famille et cela n’est pas une petite affaire !
Vendredi 6 Juillet :
Comme chaque vendredi, rencontre des femmes à la prison. Aujourd’hui, nous parlons des élections législatives. L’échange est très intéressant, c’est une vraie formation civique avec la participation de toutes. A partir de là, nous voyons comment vivre un peu plus de démocratie à la prison.
Samedi 7 Juillet :
A la prison des hommes, une longue discussion au sujet d’un groupe religieux (une secte) venu à la prison en se disant chrétien. Du coup, les gardiens ont appelé tous les prisonniers chrétiens. Mais nombre d’entre eux n’ont pas beaucoup aimé leur discours, et encore moins leur volonté de mettre la main sur eux. Cela nous amène à toute une réflexion sur la liberté de conscience et le respect des autres religions. Nous allons aussi revoir la question avec le service social et l’administration de la prison.
Avec les chrétiens, nous partageons ensuite la Parole de  Dieu (Marc 6, 1-6) : Jésus n’est pas reçu dans son village. Les prisonniers notent un certain nombre de choses sur Jésus : d’abord, il est vraiment homme, comme nous, et il connaît nos difficultés. Il a eu des problèmes avec sa famille et ses voisins. Il a travaillé de ses mains pour gagner sa vie. Cest un croyant : il va prier avec les autres à la synagogue. En même temps, il enseigne avec sagesse ; il aime les gens ; il guérit les malades. Et nous notons sa force de caractère : il est chassé de chez lui, mais il ne se décourage pas. Il va annoncer lEvangile et guérir les gens dans les autres villages.
Quand nous avons des problèmes de famille ou de travail, nous gardons courage nous aussi. Jésus est avec nous. Grâce à Lui et avec Lui, nous continuons à aimer.
-Jésus est étonné du manque de foi de ses compatriotes. Cet Evangile nous appelle à vitre notre foi en vérité.
-Etre chrétien, cest suivre Jésus dans toute notre vie. Travailler comme Lui, mais aussi, bien nous former et travailler pour les autres. Même à la prison nous pouvons apprendre un métier et nous aider les uns les autres.
-Nous entendre avec notre famille, malgré les problèmes et les incompréhensions. Et en prison aussi, nous avons souvent des problèmes avec nos familles. Il est important de nous réconcilier avec nos parents, nos amis et aussi ceux avec qui nous avons fait du mal.
-Mais il ne sagit pas de ne penser quà nous-mêmes. Quels que soient nos problèmes, nous nous ouvrons aux autres comme Jésus. Pour leur annoncer la Bonne Nouvelle de Jésus et les aider et les soutenir dans leurs souffrances et leurs maladies. Il y a beaucoup de gens malades à la prison. Et de personnes qui souffrent dans leur corps et dans leur cœur. A nous den faire un lieu dévangélisation et de guérison.
– « Nul nest prophète en son pays ». Même à la prison, il y a des gens qui nous conseillent, qui nous montrent le chemin de Dieu et qui peuvent nous aider à préparer notre avenir. Est-ce que nous savons les reconnaître ? Sommes-nous prêts à les écouter ?
Mardi 10 Juillet :
Avec les responsables de l’aumônerie, nous allons à la douane pour nous renseigner sur les formalités afin de faire venir un conteneur pour la prison. C’est toujours compliqué mais, comme nous connaissons le responsable, nous sommes très bien reçus. On verra la suite !
Mercredi 11 Juillet :
Séance d’écoute à la prison, avec son lot de problèmes, comme d’habitude. Aujourd’hui, deux demandes de prisonniers en fin de peine pour retourner dans leur région et pouvoir reprendre contact avec leur famille. Et deux cas de rapatriement au Libéria. Ce sera très difficile. On va toujours essayer.
Je parle avec trois visiteuses qui sont allées au pavillon des prisonniers à l’hôpital de la ville rencontrer les prisonniers malades. Nous avions prévenu à l’avance et elles étaient munies de toutes les autorisations nécessaires. Malgré tout, elles sont refoulées pour la 4ème fois. Nous sommes découragés, d’autant plus que ce sont des bénévoles, qui n’ont pas beaucoup de moyens et qui payent de leur poche les frais de déplacement et autres.
Les responsables de la réinsertion nous rejoignent pour préparer la sortie des prisonniers libérables. Là aussi, c’est compliqué. Nous avons toutes les peines du monde à avoir les noms au greffe. Les gens veulent souvent s’imposer et garder leur pouvoir, au lieu de se mettre vraiment au service des autres et de les aider. Malgré tout, nous essayons de faire pour le mieux.
Samedi 14 Juillet :
Rencontre à la prison des hommes. Comme d’habitude, nous commençons par parler des différents problèmes de la prison. Ce sont les mêmes plaintes qui reviennent (malheureusement), car les choses n’avancent pas vite. Au niveau de l’eau, des efforts sont faits. Les pompiers en ont apporté et, de plus, quand les prisonniers vont travailler à l’extérieur, ils emportent les bidons que nous leur avons fournis et ils reviennent avec de l’eau.
Dans un 2ème temps, nous parlons des relations entre chrétiens et musulmans à la prison. On part de choses précises et des réalités, selon des exemples vécus : la façon dont les musulmans expriment et vivent leur foi, et la nôtre. Ce qui nous amène à préciser un certain nombre de choses, car il y a beaucoup de confusions. Par souci de s’entendre et d’éviter les tensions, des gens de bonne volonté disent : « chrétiens et musulmans, c’est pareil, il n’y a pas de différences ». C’est une bonne intention, mais ce n’est pas juste. Bien sûr, nous croyons dans le même Dieu, puisqu’il n’y a qu’un seul Dieu, mais nous n’avons pas les mêmes idées sur Dieu. Nous allons tous vers Dieu, mais nous ne suivons pas le même chemin. Nous avons les mêmes premiers prophètes, mais nous ne sommes pas d’accord sur Jésus-Christ. Les chrétiens disent qu’Il est Fils de Dieu et les musulmans disent que Dieu n’a pas de Fils. Ils reconnaissent Jésus comme prophète, mais pour eux le plus grand et le dernier des prophètes c’est Mohammed.
Tout cela ne doit pas nous empêcher de nous connaître d’abord, de nous respecter et de nous estimer ensuite, et enfin de travailler ensemble. En respectant la liberté et la foi de chacun.

Dans un 3ème temps, nous partageons l’Evangile (Marc 6, 7-13). Nous relevons d’abord le pouvoir de Jésus sur les esprits mauvais et pour guérir les malades. Aujourd’hui encore, il peut chasser le mauvais esprit qu’il y a à la prison. Et nous guérir de nos maladies, dans notre cœur et dans notre corps. Car Jésus nous aime, comme il a aimé les hommes d’autrefois ; aujourd’hui encore, il veut nous guérir et nous libérer. Jésus est le Maître, mais il ne veut pas s’imposer, il n’écrase personne ; au contraire, il donne son pouvoir aux apôtres ; et c’est un grand exemple pour nous. Autour de nous, beaucoup de gens cherchent le pouvoir. Ils sont prêts à tout pour cela, aussi bien les politiciens que les chefs d’entreprises, mais aussi les employés et les fonctionnaires, également les chefs de famille, les hommes par rapport aux femmes, les grands frères par rapport aux petits frères… Et cela est vrai aussi dans la prison : l’administration et les gardiens font sentir leur pouvoir ; mais aussi les prisonniers : par exemple les chefs de chambre, les plus forts qui s’imposent, se font servir et friment, font souffrir et humilient les plus faibles.
Ce à quoi le Seigneur nous appelle, c’est bien sûr d’abord d’arrêter d’écraser nos frères ; mais surtout de les responsabiliser et de les faire grandir, comme le Christ l’a fait avec ses apôtres. Et cela dans les petites choses, dans la vie de tous les jours. D’abord en laissant toutes les formes de jalousie.
Jésus dit à ses apôtres : « n’emportez ni argent, ni nourriture, seulement un bâton ». Des simples sandales et un seul habit. Pourquoi cela ? Parce que l’Evangélisation ce n’est pas une question d’argent ou de moyens techniques. C’est une question d’amour et de témoignage de vie. Mais surtout, c’est parce que  Dieu nous garde et nous protège dans toute notre vie. Et c’est en Lui que nous mettons notre confiance. Et non pas dans le pouvoir ou l’argent. Quels que soient nos problèmes, nos souffrances et nos questions, nous sommes en paix parce que nous nous tournons vers Jésus qui nous guérit de toutes nos maladies et faiblesses ; Il nous libère des esprits mauvais et de tout mal. Avec Lui, c’est possible de changer notre vie. Avec Jésus, nous gardons l’espérance. Il nous fait confiance et nous responsabilise. Avec Lui, nous pourrons guérir ceux qui souffrent dans leur cœur et dans leur corps. Nous pouvons changer les esprits et enlever les mauvaises idées de la tête et du cœur des gens.
                                                                                          
Alors, que faire ? Comment mettre cet Evangile en pratique ? D’abord, nous laissons la soif de l’argent. Nous en avons besoin, pour nous-mêmes et pour aider les autres, mais nous ne mettons pas notre cœur dans l’argent, nous ne lui donnons pas la première place. Et nous mettons notre confiance en Dieu, tout en faisant déjà ce que nous pouvons faire par nous-mêmes.
-Jésus envoie ses disciples deux par deux. On ne peut pas être chrétien tout seul Ce n’est qu’en communauté que nous pouvons annoncer l’Evangile et aider nos frères et nos sœurs. La première chose à faire pour cela, c’est de vivre dans l’amitié et de partager la vie des gens. « Quand vous êtes accueillis dans une maison, restez-y jusqu’à votre départ ». Et aussi, rejetez toute agressivité. Si on refuse de nous accueillir, nous ne nous mettons pas en colère. Nous n’insultons pas les gens. Nous nous contentons de secouer la poussière de nos pieds et nous partons en paix et tranquilles. Car il y a trop d’agressivité entre nous à la prison.
-Nous sommes les apôtres d’aujourd’hui, là où nous sommes. Même si c’est en prison. Nous avons reçu l’onction d’huile (verset 13) au baptême. Nous ne nous décourageons pas ; nous ne restons pas assis à ne rien faire. D’abord, nous cherchons à profiter de ce séjour en prison pour changer notre vie. Et comme les apôtres, nous disons à nos frères qu’il faut changer de comportement. Et nous les aidons pour cela. Nous chassons les esprits mauvais. Ces esprits mauvais ce ne sont pas d’abord les démons ou les revenants, ce sont les mauvaises idées que nous avons dans le cœur. C’est le mauvais esprit de vengeance, de jalousie et de rancune, de mensonge et de calomnie, de recherche du pouvoir à tout prix. Ce sont là les mauvaises pensées qu’il faut chasser. De même, guérir, c’est un symbole : nous ne sommes pas médecins, nous ne savons pas soigner. Mais nous pouvons guérir les cœurs. Et il y a beaucoup de gens qui sont malades autour de nous dans leur tête et dans leur cœur. Jésus dit aussi : « Ce sera pour eux un témoignage ». Il ne s’agit donc pas pour nous de prêcher aux autres et de nous contenter de conseils. C’est par notre façon de vivre qui les entraîne, que nous pouvons les guérir et les libérer. Et quand Jésus nous demande de chasser les esprits mauvais, la première chose c’est de laisser nous-mêmes toutes les pratiques de maraboutage, de fétichisme et de sorcellerie. D’arrêter d’aller voir les charlatans, de faire des sacrifices ou de maudire les gens.

Petite fête. Une de nos animatrices va partir en congés. Nous nous sommes cotisés : pas pour lui faire un cadeau, mais pour organiser une petite fête avec les prisonniers. Nous ne voulons pas inviter seulement les chrétiens, mais nos moyens sont limités. Nous nous contentons donc d’un sandwich accompagné d’un café, de manière à partager notre joie avec le maximum de personnes. Pas tous, malheureusement, car ils sont plus de 900 dans cette prison des hommes !

Mercredi 18 Juillet :
Rencontre d’écoute à la prison. En même temps, la commission de réinsertion est venue rencontrer les prisonniers libérables le mois prochain. Une autre équipe d’animateurs bénévoles rencontre les nouveaux arrivés. L’infirmier major vient nous poser un certain nombre de problèmes : des ordonnances (il n’y a pas de médicaments à la prison), et le financement de deux opérations (au ventre et à l’œil).

Vendredi 20 Juillet :
Aujourd’hui, c’est le temps du Ramadan qui commence. Nous en parlons donc à la prison avec les femmes, car elles sont aussi concernées et la plupart d’entre elles sont musulmanes. Nous avons commencé par voir le grand changement social que le ramadan entraîne dans la vie courante : davantage d’entr’aide et de partage, les gens se demandent pardon, la façon de s’habiller en particulier des jeunes change également (mais ils ne se mettent pas en barka, ni même en voile pour autant !). Les appels à la prière se multiplient, et aussi les conférences et émissions religieuses. Au moment de la rupture du jeûne, toutes les activités s’arrêtent, le pays étant à 90 % musulman. Cela se vit aussi dans la prison, bien sûr. Nous en parlons donc ensemble. Nous regardons comment les non-musulmans peuvent supporter les désagréments que cela amène, par respect pour les musulmans. Mais aussi comment faire respecter leur propre foi. Par exemple, ceux qui ne jeûnent pas, peuvent-ils avoir à manger ? Mais que l’on respecte les temps de prière des musulmans.
A partir de là, nous parlons de nos différences. Il y a un seul Dieu. Nous sommes tous croyants. Mais nous ne suivons pas le même chemin. Il ne suffit pas de nous tolérer ni même de nous accepter différents, mais de construire ensemble le pays, à partir de nos différences. Nous voyons comment le faire concrètement à la maison des femmes. Et que chacun se laisse interpeler par la foi et la pratique religieuse des autres.
Mercredi 25 Juillet :
Animation à la prison. Comme chaque semaine, nous nous retrouvons à trois équipes : une pour l’accueil des nouveaux arrivés, une pour l’écoute, et une pour la réinsertion des libérés à venir en septembre. Je passe aussi à l’infirmerie pour voir quelle solution trouver au manque chronique de médicaments. On me remet un certain nombre d’ordonnances. Je vais chercher des gens qui pourront les prendre en charge. Je recueille aussi un certain nombre de numéros de téléphone et mails à l’étranger, soit pour donner des nouvelles des prisonniers, soit pour faire venir de l’argent afin de payer un avocat ou s’acheter un minimum de nourriture. On nous amène un prisonnier malade. Nous l’accompagnons à l’infirmerie où nous voyons aussi le cas de trois prisonniers qui attendent d’être opérés depuis plusieurs semaines. Nous nous inquiétons aussi de la situation de la famille d’un prisonnier nigérian : sa femme se retrouve sans rien, avec ses trois enfants. Elle était professeur d’anglais au Nigéria. Nous allons l’aider pour lui trouver du travail. Je vais aussi acheter des cahiers pour un autre prisonnier qui veut écrire un roman. Je l’encourage beaucoup dans ce sens. De même que j’encourage les autres à se former, à aller à l’alphabétisation, dans les ateliers ou à la bibliothèque. L’un d’entre eux, un étranger –et donc loin de chez lui, et sans visite ni soutien- se laisse complètement aller et n’arrive pas à réagir. Et il y a tous ceux qui attendent sans être jugés, bien qu’ayant fait appel depuis longtemps. Et ceux que l’on reporte de convocation en convocation. Aujourd’hui, l’un d’entre eux vient d’être renvoyé pour la 23ème fois, sans aucune raison claire ; même son avocat n’y comprend rien. Un autre, dont le cas a été réuni à celui de deux autres, demande à avoir un jugement à part. Et encore beaucoup d’autres cas, tous plus compliqués les uns que les autres.
Samedi 28 Juillet :
A la prison des hommes. Nous voyons d’abord comment ils vivent le temps du Ramadan, ensemble chrétiens et musulmans, dans l’entente et le respect mutuel. Nous abordons ensuite la question des grâces qui vont être accordées à la fin du Ramadan.
Nous devons rencontrer le Ministre de la Justice ce mardi prochain. Nous écoutons donc ce que les prisonniers ont à nous dire à ce sujet, car ce sont eux qui connaissent le mieux les problèmes et les conditions. Leur principale souffrance, c’est bien sûr leur manque de liberté, mais aussi de nourriture et de médicaments. Ce qui les aide à supporter cela c’est le courage de chacun, mais aussi leur solidarité. Leurs principales demandes portent sur la lenteur des jugements et des appels, le manque de transparence et de respect, spécialement envers les étrangers. Et tous les problèmes d’argent et même de corruption. A la fin du Ramadan, comme chaque année, le Président va accorder la grâce à un certain nombre de prisonniers. Tous espèrent obtenir cette grâce, ou, au moins, une réduction de peine : cela crée un  grand climat de tension. Bien sûr, beaucoup seront déçus et ce sera difficile de leur faire retrouver le moral ! Il y a aussi toutes les difficultés de relations avec l’administration, les chefs de chambre, etc… Et le manque d’avocats, car ils coûtent très cher. Les choses à faire ne manquent pas.
Mardi 31 Juillet :
Nous rencontrons la Ministre de la Justice. C’est une rencontre que nous avons préparée longuement, en impliquant le maximum de personnes, et d’abord les prisonniers eux-mêmes : hommes, femmes et jeunes. Je vous en ai souvent parlé. Nous avons préparé un certain nombre de documents. Nous lui présentons d’abord les différents problèmes avec nos propositions. Nous recevons un très bon accueil et dans un 2ème temps, nous parlons librement, ce qui nous permet d’aborder les questions d’une façon plus concrète et précise et plus décontractée. Evidemment, il nous faudra assurer le suivi, pour parvenir à des avancées précises. Même s’il y a un certain nombre de choses qui nous dépassent.
Mercredi 1er Août :
Je rencontre certains nouveaux arrivés (pas tous à la fois, car ils sont très nombreux) ; cela se fera au fur et à mesure. C’est très important de les aider à s’insérer et de répondre à leurs besoins matériels. Mais de voir aussi la question de leur dossier de jugement en appel, etc… De son côté, la commission de réinsertion accueille les libérables du mois prochain. Et la troisième équipe fait le tour des ateliers pour voir comment ça marche.
Samedi 4 Août :
Comme d’habitude, je pars à la prison des hommes pour notre réunion hebdomadaire. Mais comme il pleut (nous en sommes très heureux pour les paysans et tout le pays), le chef de poste n’autorise pas les prisonniers à sortir de leurs chambres pour venir à la salle de réunion. Au bout de 2 heures d’attente, avec les animatrices, nous retournons chez nous, tout tristes.
Mercredi 8 Août :
Retour à la prison. La Commission de réinsertion  n’arrive pas à obtenir la liste des prisonniers de septembre, malgré plusieurs demandes. Cela nous gêne beaucoup car nous n’aurons pas le temps de contacter leurs familles pour préparer leur retour. Ni les aider à retrouver un moyen de vivre et les réconcilier avec ceux à qui ils ont fait du mal. Tout cela demande beaucoup de temps. Mais nous rencontrons des blocages du côté de l’administration, ce qui est vraiment dommage. Comme vient de me le dire lui-même le nouveau directeur de la prison : « Nous sommes formés pour la répression, pas pour l’éducation ».
Au point de vue santé, on me présente un certain nombre de malades qui ne sont pas soignés : un qui souffre des hémorroïdes, un autre de diabète, un autre d’hypertension. Nous allons voir comment leur trouver les médicaments nécessaires. Mais surtout, nous allons chercher des médecins volontaires, car celui qui est nommé ne passe pas à la prison. Beaucoup de détenus sont découragés, car ils ont fait appel, mais pendant des mois on ne les convoque pas. Et quand ils sont enfin convoqués, on les renvoie plusieurs fois de suite, sans aucune explication. Beaucoup sont aussi trompés par les avocats qui prennent leur argent et disparaissent.
Une bonne nouvelle cependant : un des prisonniers va être libéré. Il fait des objets d’art à partir de cornes de zébus ou de moutons. Il est d’accord pour accueillir d’autres prisonniers à leur sortie, et leur apprendre le travail. Nous allons chercher le fonds et l’argent nécessaire
Jeudi 9 Août : Visite du quartier avec les délégués de Caritas France.
L’après-midi, nous allons à la prison des mineurs. Au programme, visite des jeunes puis entrevue avec la directrice et le responsable des services sociaux : réflexion sur les activités de la prison, le suivi des jeunes et des familles, la réinsertion, etc… Les éducatrices sont là et également un des délégués des fraternités maristes qui assurent le suivi des jeunes, les activités sportives et autres : alphabétisation, micro-jardinage, etc.. Sans oublier celles qui assurent la catéchèse et la prière.
Vendredi 10 Août :
Messe à la prison des femmes. Nous prenons le temps de partager longuement l’Evangile. Les femmes ont maintenant l’habitude et partagent profondément leurs pensées, à l’aise les unes avec les autres.
Samedi 11 Août :
8 heures. Séance de travail sur l’animation de la prison.  A 10 heures, rencontre générale des prisonniers chrétiens volontaires. Ils demandent qu’à partir de maintenant, nous commencions par le partage de la Parole de Dieu, pour avoir le temps nécessaire d’approfondir notre réflexion. Nous changeons donc notre façon de faire (voir le compte-rendu). Ensuite, nous parlons des problèmes divers. Nous partageons la joie de ceux qui ont été libérés. Nous faisons le compte-rendu de notre rencontre avec le Ministre, et de mon travail de samedi dernier avec les religieuses. Plusieurs nouveaux détenus sont arrivés : nous les accueillons et leur expliquons comment vivre en paix avec les autres. Mercredi, j’irai à l’hôpital, au pavillon spécial des prisonniers. Je demande donc les noms de tous ceux qu’ils connaissent là-bas. Un des responsables de chambrée nous fait le compte-rendu de leur rencontre avec le nouveau directeur, en particulier au sujet des dépôts d’argents, de la nourriture, etc… et bien sûr de la discipline.
Nous leur donnons aussi les nouvelles du pays, qu’ils ont d’ailleurs entendues à la radio, en particulier de cet accident qui a fait 23 morts. Nous parlons aussi de leurs familles. Les sujets de conversation ne manquent pas et le temps passe vite. Nous devons nous séparer.
Ce matin, il y a quelque chose de spécial : c’est le temps du Ramadan. Les musulmans organisent des conférences et des prières. Mais ils organisent aussi des actions d’entr’aide et des distributions de nourriture aux nécessiteux. Aujourd’hui, ils sont venus à la prison avec un imam mais aussi avec des médecins volontaires, qui vont consulter les malades pendant toute la journée. Restera ensuite le problème des médicaments.
Mercredi 15 Août :
Tôt le matin, je pars en ville à l’Hôpital Principal où je célèbre l’Eucharistie. Ensuite, je porte la Communion à plusieurs malades, ce qui me fait visiter un certain nombre de services. Puis, je vais dans un deuxième hôpital, beaucoup plus populaire, accompagné des Sœurs qui y travaillent. Je termine par le Pavillon spécial des prisonniers malades, et je retrouve quelques personnes que j’ai connues dans les prisons où je travaille habituellement.
Vendredi 17 Août :
Travail à la maison, puis rencontre à la prison avec les femmes. Aujourd’hui, nous parlons de leur vie. D’abord, les animatrices parlent du rôle de la femme dans la société et du respect de la personne.  Nous voyons ensemble comment vivre cela déjà entre elles à la prison, et même profiter de ce temps difficile pour changer de comportement. Ensuite, les détenues partagent comment elles ont célébré la fête du 15 Août entre elles (ce jour étant férié au Sénégal, nous ne pouvions pas entrer à la prison).
Puis elles s’expriment sur leur manière de vivre ce temps du Ramadan, dans l’entente avec les musulmans, mais aussi en faisant respecter leur foi et leur religion, à commencer par le jeûne. Elles notent combien ce temps a été un temps de prière, de pardon et de réconciliation pour beaucoup.
Nous cherchons ensemble comment aider l’une d’entre elles qui est complètement repliée sur elle-même et ne parle pas. Il faudra que je la voie personnellement.
Nous abordons ensuite la situation du pays, avec surtout le problème des inondations et toutes les conséquences qu’elles ont entraînées (voir les nouvelles).
Samedi 18 Août :
Il pleut beaucoup. Malgré tout, je pars à la prison. Mais je ne peux pas tenir notre réunion car les prisonniers sont enfermés dans les chambrées (à cause de la pluie) ! J’avais amené de la nourriture, remise par une animatrice, pour l’anniversaire de quatre personnes, mais je ne peux pas les voir. Je laisse donc la nourriture, mais je vérifierai qu’ils l’ont bien reçue quand je reviendrai. J’en profite pour parler un peu avec le personnel pénitentiaire à l’entrée, au poste de garde et à la direction. A ce niveau, les relations sont bonnes car nous nous connaissons bien. Mais il nous arrive de temps en temps de tomber sur un nouveau ou quelqu’un qui veut montrer son autorité. Alors là, ce n’est pas facile.
Je retourne à la maison, complètement trempé. Heureusement, il ne fait pas froid, mais il faudra du temps pour que ça sèche car il y a beaucoup d’humidité dans l’air.
Mercredi 22 Août :
Rencontre d’écoute à la prison. Je commence par rencontrer les nouveaux arrivés pour qu’ils puissent parler de leurs problèmes et pour voir avec eux comment vivre cette nouvelle étape de leur vie. Puis je reçois un certain nombre « d’anciens » dont un rappeur qui me demande des cordes de guitare, car il voudrait composer des chants sur la prison. Je communique à certains ce que vivent et font leurs familles que j’ai pu contacter. Il y a aussi à vérifier que l’argent et tout le soutien envoyés par les familles arrivent à destination et soient bien utilisés. Beaucoup se plaignent bien sûr d’avoir été accusés injustement, par intérêt ou jalousie. Surtout quand ils sont étrangers. Evidemment, ce n’est pas toujours vrai, et personnellement, je ne leur demande jamais pour quoi ils ont été condamnés Mais il faut bien reconnaître que les cas de fausses accusations ne sont pas rares. D’autres demandent à changer de chambre pour des problèmes de santé, de tabagie, ou de relations. Aujourd’hui, j’essaie de régler au mieux deux de ces cas. Et il y a tous ceux qui ont fait appel et qui attendent des mois et même des années avant d’être jugés. Mais je dois dire que, en général, il y a une grande solidarité de partage, de soutien et de conseils entre les prisonniers. C’est ce qui leur permet de supporter plus facilement leurs conditions de vie vraiment très difficiles et de vivre leur situation d’une façon moins inhumaine. Et même à certains, de faire le point et de se reprendre en mains. Tous les prisonniers attendent les grâces à l’occasion de la Korité. Finalement, c’est une grande illusion et beaucoup vont être déçus. Surtout que les décisions tombent d’en haut, d’une façon absolument imprévisible.

Jeudi 24 Août :
A la prison des femmes,  nous parlons de la façon dont elles ont passé le Ramadan à la prison avec les contraintes mais aussi les partages matériels, et également au niveau de la foi. Beaucoup de personnes sont venues leur apporter le repas de rupture de jeûne le soir, ce qui a bien amélioré leur nourriture. Elles ont fêté successivement dans la joie le 15 Août (qui est férié au Sénégal, bien que pays à 90 % musulman) et la Korité (Aid el Fitr) fin du Ramadan.
Et nous parlons aussi des autres choses. En particulier des inondations. De nombreuses maisons se sont écroulées, pour plusieurs raisons. D’abord, il y a 20 ans, le pays a subi une longue sécheresse ; les gens sont donc venus construire dans des bas-fonds asséchés. L’exode rural est très important au Sénégal et la banlieue de Dakar s’accroît sans cesse. Mais quand il pleut, comme cette année, les quartiers sont complètement inondés, et les constructions faites sur les voies d’évacuation des eaux empêchent les eaux de s’écouler.
De plus, ces maisons ne sont pas solides, car les gens n’ont pas les moyens de construire. Quand ce ne sont pas des baraques faites de tôles et de bouts de bois, dans les parpaings il y a plus de sable que de ciment ! Il y a eu une trentaine de morts, surtout des enfants et des bébés, soit par noyade, soit dans des maisons écroulées. Beaucoup de nourriture et de machines et appareils sont perdus, beaucoup d’habits et de matériel ont été emportés. Le Plan ORSEC a été déclaré et il y a une très grande solidarité pour accueillir les sinistrés, les soutenir psychologiquement, et leur donner de la nourriture, des habits et des médicaments. Des collectes ont été organisées dans les quartiers et à la télévision (téléthon). Les jeunes de la Croix Rouge aident les agents de santé pour lutter contre le paludisme et éviter le choléra. Les associations et Mouvements aident les pompiers à  évacuer l’eau, enlever les ordures, nettoyer les maisons et ouvrir des voies d’évacuation de l’eau. Dans notre communauté, comme dans les autres, nous avons fait une collecte. Les responsables des différentes religions ont appelé à l’engagement. Il y a une grande mobilisation dans tout le pays.

Le Sénat devait être renouvelé. Le coût de son fonctionnement était évalué à 7 milliards de francs CFA (10 millions d’Euros) et, comme je l’ai déjà expliqué, ce Sénat était très contesté. Le Président en a profité pour le faire supprimer par l’Assemblée et les 7 milliards vont être consacrés au soutien des victimes des inondations. Dans la foulée, le Président va aussi supprimer le poste de vice-président qui avait été la cause d’une grosse révolte populaire contre l’ancien président, le 23 juin 2011 (origine du Mouvement M 23). Mais tout cela sont des mesures provisoires. La gravité de la situation va obliger de réfléchir au problème dans toutes ses dimensions. Ne plus construire sur les zones inondables, évacuer les anciennes, et construire des logements sociaux dans des endroits sûrs et donc plus éloignés du centre. Cela va coûter très cher et il faudra ruser de diplomatie, voir les problèmes, respecter les gens et les faire participer aux décisions. Il va falloir revoir tous les plans d’urbanisme ; ne plus laisser construire sur les voies d’eaux et avoir des constructions plus solides. Il faudra toute une éducation de la population pour cela, et aussi que les familles arrêtent de boucher les canaux d’évacuation en y jetant leurs ordures. Mais pour ça, il est nécessaire que les ordures soient ramassées régulièrement. Il y a donc beaucoup à faire, à tous les niveaux. Nous allons y réfléchir à notre prochaine réunion de Communauté. Mais nous tenons à faire participer aussi les prisonniers à cette réflexion et éducation.

Au partage d’Evangile, nous réfléchissons sur trois points (Jean 8, 60-69) : la foi vécue, la prière d’écoute (méditation) et d’actions de grâces, et le courage. (Voir le compte-rendu).

Après la réunion, je rencontre spécialement une jeune femme, pour l’écouter et lui remonter le moral. Elle est complètement découragée. Elle prétend avoir été accusée injustement, par jalousie ; elle n’a pas d’avocat et cela fait plus d’une année qu’elle attend d’être jugée. Elle s’est refermée sur elle et ne parle plus à personne. J’essaie au moins de l’écouter, puisqu’en privé elle accepte de s’exprimer. Mais il me faudra la revoir, car les choses ne pourront avancer que peu à peu.
Samedi 25 Août :
Aujourd’hui, je ne vais pas à la prison des hommes, car je suis invité à une rencontre de réflexion sur les abus sexuels, en particulier sur les enfants. Nous avons invité deux avocats, un psychologue, un médecin et un policier, pour avoir une vision aussi complète que possible du problème. Nous cherchons à voir les causes profondes et à trouver quelles actions il est possible de mener par rapport à l’éducation des garçons et des filles, les idées traditionnelles sur l’homme et la femme, le « culte » du secret dans les familles, mais aussi le problème de l’alcoolisme et de la drogue, le manque de véritable éducation sexuelle à l’école –et surtout dans la famille-, l’influence des médias et des films pornographiques, etc…. Et aussi le suivi des abuseurs sexuels dans la société et à la prison. Ces réflexions  entraînent des réactions intéressantes et de nombreuses propositions de la part des participants. Je vais faire venir les différents intervenants à la radio, pour partager tout cela avec davantage de personnes

Samedi 1er Septembre :
A la prison des hommes. Nous sommes très heureux de nous revoir. En effet, à cause de la pluie et de mes diverses activités (voir plus haut), cela fait longtemps que nous ne nous sommes pas revus. Nous avons donc beaucoup de choses à nous dire et à partager.
Nous nous réjouissons pour ceux qui ont été graciés à l’occasion de la fête de la Korité (fin du Ramadan). Mais ils sont vraiment très peu nombreux, et nous en sommes déçus.
Comme chaque samedi, nous partageons la Parole de Dieu (voir mon compte rendu). Cela nous permet de réfléchir profondément sur nos coutumes et la religion traditionnelle pour voir comment les vivre en chrétiens, dans la foi, mais en gardant tout le positif et les valeurs. Ce n’est pas évident. Ce n’est qu’ensemble que nous pouvons voir un peu plus clair dans ce domaine.
Aujourd’hui, un de nos étudiants est venu nous rejoindre. C’est important qu’ils ne se laissent pas enfermer dans leurs études, et qu’ils apprennent à voir –et à comprendre- la vie, les efforts et les difficultés des gens, y compris les prisonniers. Nous accueillons un prisonnier congolais, malade, qui vient de sortir de l’hôpital. Il n’est pas vraiment guéri ; nous allons tout faire pour le suivre et le soutenir.

Mais surtout, nous passons un long temps sur la situation en Gambie, où 9 condamnés à mort ont été exécutés…. Et d’autres sont dans l’attente angoissante. D’autant plus qu’ils n’ont pas bénéficié d’un jugement équitable et que les droits de la défense n’ont pas été respectés. Bien sûr, cela touche profondément les prisonniers et nous les écoutons longuement sur cette question.
Nous ne manquons pas non plus de partager avec eux les souffrances des gens suite aux inondations, et tous les efforts que nous fournissons pour les aider.
D’ailleurs, le soir, je me retrouve avec plusieurs responsables pour faire le point des actions menées.
Mercredi 5 Septembre :
je vais visiter plusieurs familles en difficultés que nous suivons et essayons de soutenir.
Je passe également à l’Ambassade du Brésilpour essayer de régler le cas d’un prisonnier équatorien qui traîne ici depuis 4 ans. Nous voudrions que soit réglé son problème : cela fait 21 fois qu’il passe en appel, sans jamais être jugé. Son affaire n’est pas claire, il a été victime d’un coup monté (fausse accusation de trafic de drogue : on lui a tout mis sur le dos, alors qu’il se rendait à une conférence).  Un des 3 co-détenus est décédé en prison. Il faut refaire tout le dossier et les témoins se sont enfuis ! Nous voudrions soit le faire libérer, soit le faire rapatrier en Equateur, mais il n’y a pas d’ambassade de l’Equateur au Sénégal. Nous voulons passer par l’intermédiaire du Brésil : l’ambassadeur n’est pas là. Je laisse un mot pour demander un rendez-vous. Puis je passe à l’ambassade du Congo pour le cas d’un autre prisonnier.
                            
Jeudi 6 Septembre :
Suite à notre entretien avec le  Ministre de la Justice le mois dernier, elle nous demande de rencontrer un de ses techniciens pour finaliser notre première rencontre et voir ce qu’il est possible de faire concrètementpour les prisonniers.Nous abordons les problèmes l’un après l’autre. En particulier, la formation professionnelle des prisonniers en prison pour préparer leur sortie et leur permettre de faire vivre leur famille à leur sortie. Puis la relance de petits ateliers et d’un grand jardin.  Et aussi la nécessité de construire de nouvelles prisons pour des meilleures conditions de vie. Et déjà, comment améliorer ces conditions de vie dans les circonstances actuelles. Nous abordons aussi le problème de la santé : non seulement pour soigner les détenus (SIDA, tuberculose, autres maladies) mais aussi pour la prévention, l’éducation sanitaire et l’hygiène. Pour cela, nous allons commencer par réunir toutes les associations qui travaillent dans les prisons.

Vendredi 7 Septembre :
Nous devions avoir notre réunion de communauté, mais le quartier est complètement inondé et les gens sont bloqués.
Le matin, à la prison des femmes, nous avons célébré l’Eucharistie et partagé la Parole de Dieu, avant de parler de la vie à la prison.

Samedi 8 Septembre :
A la prison, un nouveau groupe vient d’arriver. Bien sûr, chacun doit passer à la fouille, un par un, et nous devons attendre que tout soit fini pour commencer notre rencontre. Après le partage d’Evangile, nous parlons des inondations qui les touchent eux aussi. Nous leur expliquons tout ce qui se fait dans les quartiers et villages en ce moment. Et nous leur expliquons aussi ce qu’il faudra faire à l’avenir pour attaquer le problème à la base (autre type de construction, respect des voies d’évacuation des eaux, enlèvement des ordures, etc…), comme je l’ai déjà expliqué la dernière fois. Il y a aussi toute la question de la sécurité. Les personnes sinistrées ont été accueillies et prises en charge, avec un gros effort de solidarité, dans les écoles. Mais certains ne veulent pas laisser leurs maisons inondées, car la nuit certains viennent voler les meubles et même les portes, les fenêtres des maisons, ou les tôles du toit. De plus , la rentrée des classes arrive : on ne sait pas où loger toutes ces familles obligées de quitter leurs maisons.
Beaucoup de prisonniers sont malades. A l’infirmerie, on leur fait une ordonnance, mais c’est la famille (ou les amis) qui doit acheter les médicaments. Or, beaucoup de familles sont pauvres ; et beaucoup de prisonniers sont étrangers ou ne reçoivent pas de visites. De même pour ceux qui doivent se faire opérer, il faut prendre en charge les frais de l’opération. Nous essayons de collecter l’argent pour cela autour de nous.

Nous abordons ensuite les problèmes de justice. Et en effet, il y en a énormément. J’en ai souvent  déjà parlé : les avocats demandent vraiment très cher, la plupart des gens ne peuvent pas payer. De juges reportent les jugements en appel jusqu’à 20 fois de suite pour la même personne, sans raison valable et sans explication ; les ambassades ne font absolument rien pour leurs ressortissants. Bien sûr, presque tous les détenus se disent innocents, mais il est évident qu’un certain nombre est accusé à tort, par intérêt, jalousie, méchanceté ou intérêt, et que leur cas n’est pas étudié sérieusement. Surtout les étrangers : ne parlant pas la langue locale, le ouolof, c’est facile de tout leur mettre sur le dos. Aujourd’hui, nous travaillons avec la responsable de l’ACAT Sénégal  (Action des Chrétiens Contre la Torture). Si au moment des arrestations et dans les commissariats les coups pleuvent, en prison les détenus sont rarement frappés, et il n’y a pas trop de brimades ou de tortures psychologiques. Le gros problème, ce sont plutôt les conditions de vie difficiles et même inhumaines.

Lundi 10 Septembre :
Je vais exceptionnellement à la prison pour régler quelques problèmes urgents concernant les prisonniers : maladies, jugements et libérations imprévues, et autres difficultés. Mais surtout nous nous retrouvons les trois équipes qui tiennent des séances d’écoute (rencontres personnelles avec les prisonniers) les lundi, mercredi et jeudi. C’est important pour nous de faire régulièrement le point de ces rencontres. Nous examinons les problèmes rencontrés et cherchons ensemble les meilleures solutions dans la confidentialité et le respect des personnes, bien sûr. Nous nous sentons souvent démunis et tout petits devant les obstacles rencontrés. Mais même si nous n’avons rien à apporter, ni de solutions aux problèmes des détenus, les accueillir, les écouter et partager leurs souffrances est déjà très important pour eux, mais aussi pour nous. Spécialement pour ceux qui viennent de loin et ne reçoivent aucune visite.

Mercredi 12 Septembre :
Je retourne à la prison pour l’écoute. Nous réglons le problème d’un jeune détenu. Il est tailleur. Nous lui trouvons une place à l’atelier de la prison où il pourra voir une activité et même se former davantage dans son métier.
J’ai apporté des médicaments pour quatre prisonniers, puisqu’il n’y a rien à l’infirmerie.
 Un autre problème : dans plusieurs chambrées, ils sont plus de 100, et les cabinets sont à l’intérieur de la chambre. En cette période d’hivernage, il fait très chaud et il n’y a pas d’air. De plus, il n’y a pas assez de place pour se coucher ; ils sont les uns sur les autres, et si quelqu’un se lève la nuit, à son retour il doit se battre pour se refaire une place. Tout cela entraîne tensions et bagarres qu’il n’est pas facile de régler.
Et il y a tous ceux qui n’ont pas d’argent et dont la famille se retrouve abandonnée et sans moyens. Ce sont les mères et les enfants qui en supportent toutes les conséquences. Vraiment, la prison n’est pas une solution.
Pendant le même temps, l’équipe de ré-insertion reçoit ceux qui vont être libérés le mois prochain, pour préparer leur sortie. L’un d’eux  vient d’apprendre qu’il est condamné à 3 ans supplémentaires, sans même avoir été convoqué. En fait, cela fait 3 ans qu’il attendait sa libération, mais on lui a dit que ces 3 ans ne comptent pas, sans aucune explication. Evidemment, il est complètement découragé.
Vendredi 14 Septembre :
A la prison des femmes, nous parlons des condamnés à mort qui ont été exécutés en Gambie. Nous ne nous limitons pas à une discussion sur la peine de mort, mais nous réfléchissons à ce qu’est la démocratie. En effet, le président de Gambie est arrivé au pouvoir par un coup d’état, il se maintient au pouvoir par la terreur et il tue les gens comme sacrifices pour garder son pouvoir. Cela nous amène à parler du pardon et de la réconciliation. De l’importance de l’éducation contre la violence et la drogue. C’est la responsabilité de tous, en particulier des parents. Et ces femmes en prison sont aussi des mères de familles. Nous abordons aussi la question de la drogue qui est souvent une cause de la délinquance. Je suis très content, car les femmes parlent de plus en plus librement et ça n’a pas été facile car traditionnellement les femmes ne parlent pas beaucoup en public. Et les femmes qui sont en prison sont souvent d’un milieu très populaire ; beaucoup ne parlent même pas le ouolof, la langue véhiculaire, mais seulement la langue de leur ethnie. Maintenant, elles ont pris confiance et s’expriment beaucoup plus facilement : et elles s’entr’aident,  certaines traduisent pour celles qui ont de la peine à s’exprimer en ouolof.

Samedi 15 Septembre :
Aujourd’hui, je suis à la prison des hommes. Avant le partage d’Evangile (voir le compte-rendu), ils me donnent d’abord les nouvelles de la prison (malades, jugements….).
Ensuite, nous parlons du film américain : « L’innocence des musulmans » qui suscite beaucoup de réactions, puisque le pays est à 90 % musulman. Nous sommes tous d’accord pour dire que ce n’est pas normal d’insulter une autre religion, ni de manquer de respect à son fondateur. Surtout quand on sait la grande tension qu’il y a dans le monde avec les intégristes, même à côté de nous, par exemple au Mali ou au Nigeria. Il ne faut surtout pas jeter de l’huile sur le feu. Mais d’un autre côté, ce n’est pas normal d’attaquer des ambassades et de tuer des gens. Le problème c’est que dans l’Islam il n’y a pas de distinction entre la religion et l’Etat. Car ceux qu’on a tués n’y étaient pour rien. Et les foules musulmanes n’ont pas su se maîtriser, face à la provocation. Mais il faut dire qu’au Sénégal, les choses se sont passées dans le calme. Le Président de la République a réagi, de même que les responsables religieux, mais sans violence. Une ONG musulmane (JAMRA) a voulu apporter une lettre à l’ambassade des Etats-Unis à Dakar, pour dire leur désapprobation, mais aussi pour présenter leurs condoléances aux familles des tués. Malheureusement, ils ont été refoulés. Ils sont repartis sans faire d’histoires, mais très déçus. Vraiment, je regrette beaucoup cela. La conclusion, pour la prison, c’est que nous allons continuer à intensifier nos bonnes relations et notre compréhension mutuelle entre chrétiens et musulmans. Les dernières déclarations du Pape au Liban vont nous aider pour cela.

Mercredi 19 Septembre :
Je passe d’abord au Centre des enfants de la rue, puis je pars à la prison pour l’écoute des prisonniers. Les problèmes ne manquent pas. L’un d’eux ne voit plus : j’ai tout un stock de lunettes, il en trouve une paire qui lui convient. Pendant ce temps-là, la commission de réinsertion reçoit les détenus qui vont être libérés, en Octobre et Novembre, pour préparer leur retour en famille et dans la société. De mon côté, je vois comment soutenir la famille d’un prisonnier et trouver du travail pour sa femme. Il n’est malheureusement pas le seul dans ce cas. Les détenus souffrent beaucoup, mais leurs familles encore plus, car le père de famille n’est plus là pour les nourrir, payer l’école des enfants, etc… Beaucoup de détenus ne reçoivent aucune visite : c’est très dur pour eux. Nous essayons de leur remonter le moral autant que possible. Nous prenons le temps aussi d’accueillir les nouveaux venus, pour les aider à s’insérer le mieux possible et leur trouver les activités qui peuvent leur convenir, chacun selon ses possibilités. Nous rencontrons beaucoup d’injustices et d’exploitation, spécialement pour les étrangers, auxquels on fait porter le chapeau d’autant plus qu’ils ne connaissent pas la langue locale : le ouolof. Ce matin je reçois deux membres d’OLNG qui ont été condamnés pour détournements d’argent et pour blanchiment d’argent, alors que les responsables locaux se sont enfuis ou s’en sont sortis indemnes, et qu’eux-mêmes n’y étaient pour rien.
Ensuite, je reçois un prisonnier qui a été opéré et qui a besoin de suivi, mais il n’y a pas de contrat avec l’hôpital pour le prendre en charge. Nous contactons les autorités pour voir que faire. La santé est un très grand problème. Aucun médecin ne vient jamais à la prison. Il y a seulement un infirmier qui rédige des ordonnances, mais n’a pas de médicaments. Ce sont les familles doivent les acheter. La plupart du temps, ces ordonnances prescrivent des vitamines, car les prisonniers sont mal nourris et anémiés, et évidemment ce n’est pas la solution. Si les prisonniers sont loin de chez eux, ils sont abandonnés. De même, s’ils doivent être opérés, il faut payer le kit. Nous avons mis en place une caisse de secours pour aider les cas les plus graves.
La plupart des prisonniers n’ont pas les moyens des se payer un avocat. Et s’ils en ont un, ils se font exploiter : aujourd’hui, l’un d’entre eux va être transporté à St Louis, dans le nord, pour y être jugé, l’avocat lui demande un million de CFA !
Je récupère plusieurs numéros de téléphone pour prévenir les familles et leur donner des nouvelles. C’est la même chose chaque vendredi

Après ces rencontres personnelles, nous mettons en place l’alphabétisation : en français, ouolof, anglais et espagnol. Et nous préparons la séance d’animation culturelle de jeudi.

A mon retour à la Communauté, je reçois un coup de fil de l’ambassade du Burkina Faso. Je leur avais signalé le cas de l’un de leurs concitoyens. Ils sont allés le visiter et vont chercher à régler son cas. En plus, ils demandent à me rencontrer pour établir une collaboration suivie. Cela me fait très plaisir, d’autant plus que la plupart des ambassades se désintéressent complètement de leurs ressortissants en disant que ce sont des délinquants et de toutes façons ils n’ont pas de papier en règle !

Vendredi 21 Septembre :
Le matin, je vais à la prison des femmes. Nous faisons un partage d’Evangile (Marc 9. 30-37. Voir mon compte-rendu). Les détenues, comme les animatrices, apprécient la richesse de ce texte et participent activement à l’échange. Les choses avancent peu à peu.

Mercredi 26 Septembre :
Je conduis les étudiants au Centre des Enfants de la rue, et je continue à la prison pour rencontrer personnellement les détenus. Ce sont malheureusement toujours les mêmes problèmes dont je vous ai souvent parlé : problèmes de jugements, de santé, de nourriture, d’abandon de la famille, découragement et dépressions, de vie commune, etc… Nous faisons ce que nous pouvons avec nos petits moyens. Au retour, nous passons saluer les Frères de Taizé et nous prions avec eux.

Samedi 29 Septembre :
Aujourd’hui à la prison nous nous réjouissons de la libération de plusieurs détenus, dont deux de notre groupe. Nous avions préparé leur réinsertion. Nous nous sommes rencontrés à nouveau après leur sortie. L’un d’entre eux était professeur d’anglais ; je lui établis des lettres de recommandation pour qu’il puisse retrouver un emploi.
Puis nous nous donnons les autres nouvelles : les malades, en particulier ceux qui sont en cellule à l’hôpital. Puis le problème du pain, car le boulanger n’était plus payé depuis quelque temps… il n’y a donc plus de pain pour le petit déjeuner.
Nous voyons aussi comment soutenir les familles des détenus, qui sont abandonnées puisque les chefs de famille sont en prison. Nous essayons de trouver du travail ou au moins des activités, selon leurs possibilités, pour gagner le minimum afin de faire vivre leurs familles.
Plusieurs, surtout les étrangers, me donnent les numéros de téléphone de leurs parents ou amis pour que l’on tente de les contacter et qu’ils puissent envoyer de l’argent.
Ensuite, nous partageons la Parole de Dieu, comme d’habitude (voir les comptes-rendus). Nous réfléchissons spécialement à l’ouverture à tous, quelles que soient leur langue et leur religion, à partir de cette parole du Christ : « Qui n’est pas contre nous est pour nous ». A l’importance de ne pas faire tomber les autres : non seulement changer notre vie, mais aider aussi les autres à changer. Et enfin, au partage et au soutien mutuel : « Celui qui donne même un verre d’eau à son frère ne perdra pas sa récompense ».

Nous avons aussi des problèmes d’organisation, mais faute de temps pour réfléchir à cette question nous la reportons à la semaine suivante. Pour l’instant, il nous faut recevoir ceux –ils sont nombreux- qui ont des problèmes de vision et leur faire essayer des lunettes.

Une des animatrices est revenue de vacances. Elle partage avec tous ce qu’elle a vécu avec sa famille. Nous parlons aussi de la vie du pays : les souffrances causées par les inondations, le 10ème anniversaire du naufrage du bateau « Le Joola » dans lequel ont péri plus de 1.800 personnes. Et le 3ème anniversaire de la tuerie et des viols à Conakry dans le stade du 28 Septembre (Voir mon site « Nouvelles » de fin septembre 2009).

Mercredi 3 Octobre :
Ecoute à la prison. Je rencontre plusieurs personnes malades et qui ont besoin d’opérations, de soins et de médicaments. Nos rencontres d’écoute deviennent des rencontres de santé, car il y a de gros manques au niveau de l’infirmerie. C’est donc une priorité. Mais cela ne m’empêche pas de rencontrer aussi des personnes qui ont des problèmes psychologiques (ils sont nombreux) et de solitude ; ils ont besoin de parler. Il y a aussi tous les jugements en appel, les demandes de grâces…. Nous avons beaucoup de difficultés à ce sujet, ainsi qu’avec les avocats. D’abord, ils demandent de fortes sommes : 1.000.000 Fr CFA (environ 1.500 €) dont 500.000 d’avance. Et quand ils ont reçu cette avance, ils disparaissent. L’une de nos actions est de trouver les contacts de ces avocats et de les suivre pour qu’ils fassent leur travail, en utilisant notre réputation et notre pouvoir pour cela.
Pendant ce temps, la commission réinsertion rencontre les personnes libérables les deux mois suivants pour préparer leur retour en famille et dans la société, avec les différents problèmes qui se posent. Nous voudrions aussi faire libérer un prisonnier qui est devenu aveugle en prison.
Je rencontre une dame qui travaille à la prison de Thiès (ville à 70 km de Dakar) et qui est venue visiter un prisonnier transféré. Nous nous asseyons tous ensemble pour voir comment améliorer notre travail. Elle nous demande notre soutien, ce que nous acceptons bien volontiers.

Ensuite, je passe au Centre des Enfants de la rue du quartier. J’y ai invité le responsable des jeunes de notre quartier pour qu’il voit ce que nous faisons, et qu’avec ses camarades ils réfléchissent à ce qu’ils peuvent faire eux-mêmes pour soutenir notre action et rencontrer les enfants.
Vendredi 5 Octobre :
Après la prière et la messe, je pars aussitôt dans une grande Société de la place pour demander son soutien en faveur des ateliers de formation artisanale dans les prisons, afin de faciliter la sortie des détenus et leur permettre d’avoir de quoi faire vivre leur famille. Je suis très bien accueilli par le directeur. Je lui donne un certain nombre d’explications et lui laisse les documents nécessaires. On verra la suite !
Samedi 6 Octobre :
Les prisonniers m’attendent et je suis très heureux de les revoir. Aujourd’hui, j’amène trois étudiants avec moi : celui qui y travaillait l’année dernière, pour les saluer, et deux nouveaux, pour leur présenter la maison et pour une première initiation. Je suis heureux aussi d’être accompagné de l’un des animateurs de l’Association des Enfants de la rue avec laquelle je travaille. Car je pense très important qu’il y ait un suivi et une coordination entre nos différentes activités.

Deux de nos animatrices, mères de famille, qui ont été absentes pendant les vacances, sont là aujourd’hui. Tous sont très heureux de nous retrouver et de les revoir. En effet, c’est une prison d’hommes et la présence active de femmes est essentielle pour leur équilibre. Je suis dans l’admiration de ces animatrices, car ce n’est facile pour elles de se situer, et elles sont parfois soumises à de nombreuses provocations de toutes sortes.

Dans la communauté chrétienne, il y a des tensions en ce moment. C’est obligé. Ce qui est bon, c’est qu’ils posent ouvertement le problème. D’abord, certains s’opposent au responsable qui a pourtant été choisi par tous, dans l’entente. Cela l’a découragé et il a refusé de diriger la prière, ce qui a amené une grosse tension. Et comme très souvent, les réactions ont été très agressives. Bien sûr, nous n’abordons pas le programme prévu, pour laisser le temps à chacun de s’exprimer et de donner son avis, afin d’arriver à une vraie réconciliation et à nous réveiller pour ré-organiser la communauté. C’est la vie, il y a des hauts et des bas ! Après un temps de réconciliation, de prière et de chants, nous passons au partage d’Evangile. (à suivre).








           






Chers amis,

            Voici un bon moment que je me promettais de vous écrire, mais j’ai été vraiment très occupé, d’autant plus que j’ai changé de paroisse et en me retrouvant dans la grande banlieue de Dakar, il y a eu beaucoup de choses à mettre en place. Encore une fois merci pour le grand container que vous nous avez envoyé l’année dernière. Comme vous le savez, nous avons eu beaucoup de difficultés pour le sortir du port, mais finalement, grâce en particulier à l’équipe d’animation de la prison et au soutien de la Ministre de la Justice, devenue depuis Premier Ministre, les choses ont pu se débloquer. A l’avenir, nous savons maintenant comment faire pour éviter de telles difficultés et de tels problèmes.
            Au niveau de la prison elle-même, il y a eu un changement de directeur et beaucoup de tensions dans les prisons elles-mêmes. Ce qui fait qu’il a fallu être très patient. Il est vrai que la nouvelle direction a voulu améliorer les choses pour faire fonctionner les ateliers dans de bonnes conditions. La cour a été pavée, les salles pour les différents ateliers aménagées, l’électricité a été installée pour le matériel informatique, l’infirmerie et le service dentaire. Si bien que les ateliers ont maintenant commencé à fonctionner : menuiserie, serrurerie, électricité, petite mécanique, couture, taillerie, peinture etc. Mais il nous a fallu bien préciser les choses, pour que ces ateliers soient vraiment des ateliers de formation des détenus et non pas des ateliers de production pour la prison. D’abord parce que les bénéfices des ateliers de production servent beaucoup plus au fonctionnement de la prison qu’aux détenus eux-mêmes, et surtout, parce que notre souci c’est la réinsertion des détenus à leur sortie. Nous ne cherchons donc pas en priorité des revenus, même s’il faut que ces ateliers tournent et qu’on leur fournisse le matériel nécessaire pour cela. Mais plutôt d’enseigner un métier aux détenus volontaires pour qu’ils trouvent plus facilement un travail à leur sortie. Je rappelle que ce sont ces détenus, connaissant ces différents corps de métiers, qui ont accepté de former volontairement et bénévolement, leurs co-détenus. Ce qui est très important pour nous.
            Pour le cabinet dentaire, le fauteuil est installé avec tout le nécessaire. Nous sommes entrain de chercher l’outillage (daviers, etc.). Si vous pouvez nous procurer du matériel dentaire ancien, cela nous aiderait beaucoup. De même, un ophtalmographe que je vous ai déjà demandé, pour l’examen des yeux. A cause des mauvaises conditions de détention, beaucoup de détenus ont des problèmes de vision. Nous avons déjà des ophtalmologues et des dentistes prêts à venir bénévolement faire des consultations et des soins à la prison.
            Personnellement, ayant déménagé, je n’interviens plus directement au camp pénal des hommes, mais chez les femmes internées dans la ville de Rufisque. A ce niveau là, le matériel de couture que vous nous avez envoyé nous est spécialement utile. Nous assurons également avec elle des cours d’alphabétisation en français et en ouolof.
            Pour les trois dispensaires que nous avons aidés également à la réception du container l’an passé, celui de Derklé a changé de direction mais il continue a bien fonctionner, étant tenu par des sœurs de Saint Joseph de Cluny. Bien sûr, les produits ont été consommés depuis longtemps, de même que le lait et la panure. Mais le petit matériel médical est toujours utilisé et apprécié.
            Au même endroit se trouve un centre de formation de jeunes filles dans lequel j’interviens régulièrement. Là aussi le matériel de mercerie a été bien utile.
            Les vélos sont utilisés en parti par des catéchistes du secteur rural en différents endroits, et les autres en ville, par des étudiants qui ont un long chemin à faire pour aller suivre leurs cours. Je vous remercie donc pour tout cela.
            Voici quelques nouvelles que je voulais vous donner. Vous recevez des nouvelles plus détaillés mais plus générales par mail. Soyez sûrs que nous vous sommes très reconnaissants pour tout ce que vous faites pour nous ici à Dakar, et également à Kédougou avec le Père Stéphane. Vous nous apportez un soutien très important pour notre travail social et humanitaire, et également en Guinée, que ce soit à Conakry ou à Mongo. Nous vous remercions de tout de tout cœur. Nous vous souhaitons bon courage dans vos activités.
            Avec toute mon amitié.


                                                                                                          Père Armel

Au point de vue financier, pour les 2.000 Euros reçus de vos,  soit 1.300.000 FR CFA :
En décembre, je vous avais signalé 1.069.050 Fr CFA de dépenses.
Depuis nous avons effectué les dépenses suivantes :
-Livres et documents pour la formation, photocopies…                                          152.000
-Achât de matériel : tissu, cuir, cornes, bois, fer…..                                                350.200
-Achât d’outils pour menuiserie, soudure, électricité, mécanique…                      642.500
-Installation de la salle d’informatique (prises…)                                                    150.000
-Carrelage de la salle d’informatique                                                                     180.000
                        Total :                                                                                    1.474.700

Pour le paiement, nous avons utilisé les 230.950 Fr qui restaient de votre envoi, le reste a été financé par nous-mêmes, grâce aux fonds récoltés pendant le Carême et les 3 séances culturelles que nous avons organisées.

Merci encore pour votre aide.

Le journal LE P0PULAIRE en page 6 du n° 4190 du mardi 12 novembre 2013, revient sur la question de l'avortement médicalisé au Sénégal, à propos de la conférence de presse qui s'est tenue la veille à ce sujet. On y retrouve un certain nombre d'affirmations graves et contradictoires, qui peuvent avoir des conséquences désastreuses sur le sens moral de la population.
Il faut quand même être clair et reconnaître que le foetus est bien vivant dans le ventre de sa mère. L'avortement c'est donc supprimer une vie humaine qui est déjà commencée. C'est donc une choses très grave, en opposition directe avec le commandement de Dieu: "Tu ne tueras pas".

L'article commence en s'inquiétant de "l'augmentation du nombre de femmes incarcérées pour cause d'avortement". Et qu'est-ce qu'il propose comme solution: l'accès à l'avortement médicalisé! C'est à dire d'augmenter encore le nombre des avortements! Est-ce que la solution, ce ne serait pas plutôt d'arrêter de mettre ces femmes en prison? Car ce n'est jamais de gaieté de coeur qu'une femme avorte. C'est parce qu'elle est désemparée, abandonnée et rejetée par sa famille et par la société. La solution c'est donc de l'aider à vivre sa grossesse le mieux possible, afin de pouvoir accueillir cet enfant qui vient, mais certainement pas de le tuer avant sa naissance!

Le prophète est clair:" Dieu est contre le péché, mais il n'est pas contre le pécheur". Dieu est contre l'avortement, mais il ne condamne pas la femme qui a avorté. Il ne veut qu'une chose, c'est lui pardonner, pour qu'elle retrouve la paix. Et à nous, Il nous demande de tout faire pour l'aider à garder cet enfant. Mais certainement pas à nous en débarrasser, en le supprimant.

Cette proposition de l'avortement médicalisé donne l'impression que l'avortement serait un acte banal, comme s'il n'avait pas des conséquences psychologiques graves. Une femme qui a avorté ne peut jamais oublier ce qu'elle a fait. C'est pourquoi, elle a besoin de tout notre soutien et de toute notre compréhension, et non pas de condamnation

Comment oser parler d'avortement médicalisé? La médecine est faite pour soigner et sauver les vies,  pas pour tuer. L'avortement ne pourra jamais être un acte médical. C'est complètement contradictoire. C'est tuer la médecine.

"L'article continue: "La Task Force a fait un plaidoyer, en vue de changer la loi sur la santé de la reproduction, pour permettre l'accès à l'avortement médicalisé".  Comment la loi sur la santé de reproduction pourrait-elle autoriser l'avortement médicalisé? Il ne s'agit plus de sante, mais de mort. Il ne s'agit plus de reproduction, mais justement de supprimer la reproduction. Nous sommes en train de perdre complètement le sens de la loi.

On parle ensuite de "droit à l'avortement, pour qu'aucun enfant ne meurre étouffé à la naissance". On n'a jamais le droit de supprimer volontairement une vie humaine. C'est supprimer la base de toute société humaine. C'est tuer la société elle-même.
 L'avortement, médicalisé ou non, est un grand malheur et il faut tout faire pour l'éviter, pour soutenir la femme enceinte et lui permettre de mener à bien sa grossesse. C'est cela qui permettra "qu'aucun enfant ne meurre étouffé à la naissance". Mais pas l'avortement . On voudrait "qu'il ne meurre pas étouffé à la naissance", alors on le tue à l'avance. Drôle de solution!
On parle  de "droit de la femme à l'avortement". Mais est-ce que le foetus n'a pas le droit à la vie? C'est lui qui est le plus faible, c'est lui qui doit être défendu  en premier.
Comment oser dire:" l'avortement médicalisé est une question de respect de la vie humaine". Est-ce respecter la vie humaine, que la supprimer? Drôle de respect!

On se plaint que la société sénégalaise est en train de perdre tout sens moral. Mais n'est-ce pas tuer la Morale que de demander de supprimer la vie, sous prétexte de la respecter. Et de faire de l'avortement un droit. Une telle position ne peut conduire qu'à la mort de notre société, après avoir causé légalement la mort de nombreux foetus.

Cette Task Force fait bien de "nous conscientiser sur  un problème sui est une rélité (les avortements et les infanticides). Le problème est très grave.Il demande une mobilisation de tous. Mais nous ne pouvons pas accepter la solution qu'elle propose, qui est encore pire que le mal dénoncé. On ne défend pas la vie en la supprimant!





REUNION DU BUREAU DE L’AUMONERIE DES PRISONS DE LIBERTE 6 (18-6-13)  Quelques points retenus :

1)Activités à mener
- Continuer la mise en place des ateliers : chercher des détenus volontaires pour former les autres. Trouver de l'aide à la commercialisation des produits fabriqués par les détenus et les ateliers : Par exemple à  la sortie des messes le dimanche, en tournant, chacun dans sa paroisse, en l’annonçant le dimanche précédent. Le directeur du Camp Pénal est prêt à nous fournir un stock à vendre progressivement selon nos possibilités (avec inventaire). A organiser avec Joseph Angrand : jjwillangrand@yahoo.fr ;  tel 77 652 15 48 et MARIE Philomène djimis 70 305 97 81
- La vente des nems, beignets, crêpes ou cakes etc après la messe de Dimanche, en tournant dans les paroisses (à chacun de voir cela dans sa paroisse (
Marie Jeanne  QUENUM DIOP sunsinum@gmail.com
77 636 91 60

-Organiser un khawaré (fête pour récolter des fonds) avec les jeunes pendant les vacances


- Maintenir le rythme des activités durant les vacances, malgré les absences et départs en congés. Se tenir au courant et faire un calendrier  pour qu’il y ait toujours quelqu’un : les prisonniers comptent sur nos visites (le  Père Thibault est d’accord pour dire la messe dans les 2 prisons)

- plaider pour s détenus qui demandent plus d'aération dans les cellules (c’est fait : à continuer jusqu’à ce qu’il y ait des résultats). Serait-il possible de trouver des ventilateurs ? (tous)
-Au Camp Pénal, maintenant que la nouvelle administration est en place, reprendre les rencontres avec le personnel pénitentiaire, les chefs de chambre et les rencontres des ONG intervenant à la prison  (HELENE DIOUMA FAYE  77 649 35 78 helenefaye1972@yahoo.fr; PHILOMENE FAYE  77 644 44 04 philofaye1@hotmail.fr)
-Chez les femmes (Maf) : Les problèmes de nourriture et de santé sont moins graves que chez les hommes. Des ateliers sont en place et fonctionnent (coiffure, culture sur tabliers, couture et broderie, fabrique de jus..) et fonctionnent. Nous assurons des rencontres de prières, partages d’Evangile, partage sur leur vie en prison, formation et eucharisties les vendredis et samedis.
Il faudrait reprendre les rencontres entre chrétiennes et musulmanes (par exemple sur notre profession de foi : Je Crois en Dieu et Fatiha, le pardon et la réconciliation…) Elisabeth Pauline Dieng  et Thérèse Badiane DIOP 77 325 11 76  viedesable1@hotmail.com. Finir de mettre en place les séances d’écoute et organiser les sorties et les réinsertions (Sœur Germaine Diatta 77 058 58 65 geratom.diatta@yahoo.fr); intensifier les relations et l’entr’aide avec la prison de Rufisque ( Simon Pierre Gomis Correa et madame)


-Continuer les visites dans les ambassades et réactualiser les listes des détenus (HELENE DIOUF MANDIAMY  77 552 19 65  hlnemandiamydiouf@yahoo.fr et  MARIA NATERCIA CORREIA  77 658 94 08



2) Fin d'année:
- un moment de partage sera organisé le mardi 25 Juin à 18h à Keur Cita.
Informer tous les membres de l'Aumônerie. Nous avons prévu
Partage à partir de l’Evangile : Luc 10 (participation libre de tous)
1) l'envoi en mission (1-9): nous nous demanderons quelle est la mission que le Seigneur nous a confiée en prison, et comment la faire pour le mieux : Prières de demande 
2) l'action de grâces pour les petits (17-25) : chacun pourra dire ce qu’il a reçu cette année en prison. Suivi de prières d’action de grâces
 chants: Si l'espérance t'a fait marcher  plus loin que ta peur
Chercher avec toi les pas de Dieu, Vierge Marie
Tu nous appelles à t'aimer, en aimant le monde où tu nous envoies

3) Divers:
-envoyer les lettres de remerciement pour la Mairie de Dakar et le Nonce, si cela n’a pas encore été fait (Philomène Faye)
- trouver une date pour la remise du lot de crèmes vitaminées, habits… à la prison de Rufisque
-voir la disponibilité de l'une des paroisses suivantes: St-Dominique ou Martyrs pour la choralie
et aussi une date pour un concert au mois de Novembre (
MANDANG
Léonie
77 176 80 31)
.Nous avons prié pour vous, et avec vous, pour tous les prisonniers
Bonnes vacances et bon travail : l'Esprit nous accompagne! 

4) Rappel : Compte rendu de la réunion du bureau tenue le 24-05 2013

1) Nous avons décidé ensemble comment utiliser l'argent que nous avons dans la caisse de l'aumônerie des prisons.
Ce sera pour: l'achat du matériel et le fonctionnement des ateliers
                     les médicaments
                     la nourriture pour les nécessiteux
                     le transport pour les détenus sortants et certaines courses (ambassades…)
                     les fêtes comme Noel et Pâques
                     le fonctionnement de l'aumônerie p.e les feuilles A10, l'encre etc.
Néanmoins il faut aller doucement et toujours laisser une somme minimum dans la caisse (500.000 Fr).

2)Nous devons chercher des fonds et ne pouvons pas toujours demander aux mêmes personnes de nous aider.
A été proposé: d'organiser une chôralie au mois de Novembre
                      des repas, comme pour la Caritas : journée du prisonnier 
                      La vente des nems, beignets, crêpes ou cakes etc après la messe de Dimanche, en tournant dans les paroisses 
                      d'organiser un khawaré (fête pour récolter des fonds) avec les jeunes pendant les vacances
Nous avons reçu des couverts, assiettes et verres que nous pouvons louer, pour récupérer de l’argent pour la caisse. S’aadresser à Philomène Faye

3)Nous avons parlé de la solidarité active pour résoudre les problèmes des enfants et des familles des détenus qui n'ont rien, mais  c'est très difficile. Leur faire obtenir des micro crédits risque de les entraîner dans des difficultés encore plus grandes. Et nous n’avons pas les moyens de prendre en charge les loyers, la nourriture ou la scolarité des enfants. Sauf pour des cas particuliers, à décider ensemble en bureau. Ce que nous faisons c’est de chercher des places d’employées de maison pour les femmes et filles de détenus.
Nous distribuons les dons que nous recevons, mais ne pouvons pas prendre en charge la nourriture des prisonniers, même pas pour l’améliorer. C’est la responsabilité de l’état. Nous consacrons ce que nous recevons au plus nécessiteux, connus dans nos séances d’écoute et autres contacts, sans nous limiter aux chrétiens mais pour tous sans distinction
Pour le moment, nous ne prenons pas en charge les ordonnances médicales, puisqu’un budget est prévu pour cela ; mais nous continuons à chercher des médicaments

4)Autres questions : Où nous en sommes-nous quant au rendez-vous demandé au ministre de la santé?
La lettre a bien été déposée, il faudrait le relancer( Marie jeanne Quenum). 
                                                                                                         
5) C'est difficile de travailler ensemble parce que nous n'avons pas un coordinateur national, ni même local  pour gérer cela.

6)Nous cherchons un avocat qui pourrait venir un jeudi après-midi pour expliquer aux détenus en quoi consiste son travail, les droits des prisonniers, les procédures, le déroulement  d'un procès etc. pour suivre l’un ou l’autre dossier. Et aussi d’autres avocats

7) Nous avons pour le cabinet dentaire un fauteuil de soins ultra moderne mais hélas... pas d’instruments pour soigner les patients.
Madame Wilhelma Diop se renseignera pour connaitre le matériel manquant et son prix. Même chose pour les ophtalmologistes, qui sont prêts à travailler, mais n’ont pas de matériel disponible. Nous cherchons toujours des médecins, généralistes et spécialistes.

En ce qui concerne le contenu du container, il est destiné principalement au Camp Pénal. Nous devons respecter les intentions des donateurs, à qui nous envoyons des compte-rendus réguliers. Malgré tout, nous avons décidé de partager avec les prisons de la Maf, de Rebeuss et de Rufisque ce que nous pouvions (nourriture, couvertures, habits…). S’il reste d’autres besoins, nous pouvons partager avec les autres prisons. Qu’ils nous fassent une demande par écrit. Mais d’abord nos moyens sont très limités et tout ce que nous avons reçu dans le conteneur est maintenant distribué. Et nous souhaiterions qu’ils participent d’abord à nos efforts de financement (Actions de Carême, etc…) et à nos recherches de fonds (voir plus haut n° 2). Et surtout qu’il s’établisse une véritable collaboration entre nous (voir n°5)
 Le matériel, destiné aux dispensaires, a été réparti entre le dispensaire Saint Martin à Rebeuss, celui de Saint Pierre et celui de Derklé.

Merci à tous ceux et celles qui ont participé aux dernières formations
Un GRAND MERCI A TOUS ET POUR VOTRE ENGAGEMENT, CHACUN SELON SES POSSIBILITES
Bon courage et à bientôt. Prions les uns pour les autres, et ensemble pour tous les détenus





Compte rendu de la réunion du bureau tenue le 24-05 2013

1) Nous avons décidé ensemble comment utiliser l'argent que nous avons dans la caisse de l'aumônerie des prisons.
Ce sera pour: l'achat du matériel et le fonctionnement des ateliers
                     les médicaments
                     la nourriture pour les nécessiteux
                     le transport pour les détenus sortants et certaines courses (ambassades…)
                     les fêtes comme Noel et Pâques
                     le fonctionnement de l'aumônerie p.e les feuilles A10, l'encre etc.
Néanmoins il faut asller doucement et toujours laisser une somme minimum dans la caisse (500.000 Fr).

2)Nous devons chercher des fonds et ne pouvons pas toujours demander aux mêmes personnes de nous aider.
A été proposé: d'organiser une chôralie au mois de Novembre
                      des repas, comme pour la Caritas : journée du prisonnier 
                      La vente des nems, beignets, crêpes ou cakes etc après la messe de Dimanche, en tournant dans les paroisses 
                      d'organiser un khawaré (fête pour récolter des fonds) avec les jeunes pendant les vacances
Nous avons reçu des couverts, assiettes et verres que nous pouvons louer, pour récupérer de l’argent pour la caisse. S’aadresser à Philomène Faye

3)Nous avons parlé de la solidarité active pour résoudre les problèmes des enfants et des familles des détenus qui n'ont rien, mais  c'est très difficile. Leur faire obtenir des micro crédits risque de les entraîner dans des difficultés encore plus grandes. Et nous n’avons pas les moyens de prendre en charge les loyers, la nourriture ou la scolarité des enfants. Sauf pour des cas particuliers, à décider ensemble en bureau. Ce que nous faisons c’est de chercher des places d’employées de maison pour les femmes et filles de détenus.
Nous distribuons les dons que nous recevons, mais ne pouvons pas prendre en charge la nourriture des prisonniers, même pas pour l’améliorer. C’est la responsabilité de l’état. Nous consacrons ce que nous recevons au plus nécessiteux, connus dans nos séances d’écoute et autres contacts, sans nous limiter aux chrétiens mais pour tous sans distinction
Pour le moment, nous ne prenons pas en charge les ordonnances médicales, puisqu’un budget est prévu pour cela ; mais nous continuons à chercher des médicaments

4)Autres questions : Où nous en sommes-nous quant au rendez-vous demandé au ministre de la santé?
La lettre a bien été déposée, il faudrait le relancer (Marie jeanne Quenum). 
                                                                                                         
5) C'est difficile de travailler ensemble parce que nous n'avons pas un coordinateur national, ni même local  pour gérer cela.

6)Nous cherchons un avocat qui pourrait venir un jeudi après-midi pour expliquer aux détenus en quoi consiste son travail, les droits des prisonniers, les procédures, le déroulement  d'un procès etc. pour suivre l’un ou l’autre dossier. Et aussi d’autres avocats

7) Nous avons pour le cabinet dentaire un fauteuil de soins ultra moderne mais hélas... pas d’instruments pour soigner les patients.
Madame Wilhelma Diop se renseignera pour connaitre le matériel manquant et son prix. Même chose pour les ophtalmologistes, qui sont prêts à travailler, mais n’ont pas de matériel disponible. Nous cherchons toujours des médecins, généralistes et spécialistes.

En ce qui concerne le contenu du container, il est destiné principalement au Camp Pénal. Nous devons respecter les intentions des donateurs, à qui nous envoyons des compte-rendus réguliers. Malgré tout, nous avons décidé de partager avec les prisons de la Maf, de Rebeuss et de Rufisque ce que nous pouvions (nourriture, couvertures, habits…). S’il reste d’autres besoins, nous pouvons partager avec les autres prisons. Qu’ils nous fassent une demande par écrit. Mais d’abord nos moyens sont très limités et tout ce que nous avons reçu dans le conteneur est maintenant distribué. Et nous souhaiterions qu’ils participent d’abord à nos efforts de financement (Actions de Carême, etc…) et à nos recherches de fonds (voir plus haut n° 2). Et surtout qu’il s’établisse une véritable collaboration entre nous (voir n°5)
 Le matériel, destiné aux dispensaires, a été réparti entre le dispensaire Saint Martin à Rebeuss, celui de Saint Pierre et celui de Derklé.

Question posée : Peut-on faire une fête de fin d’année ? Sous quelle forme : une messe, suivie d’un partage : chacun amène un jus et quelque chose à manger (partager) ? Quel jour ? Quelle heure ? Où ? Envoyez rapidement vos propositions

Merci à tous ceux et celles qui ont participé aux dernières formations
Un GRAND MERCI A TOUS ET POUR VOTRE ENGAGEMENT, CHACUN SELON SES POSSIBILITES

Bon courage et à bientôt. Prions les uns pour les autres, et ensemble pour tous les détenus


2. Mercredi 30 Janvier :
Comme chaque mercredi, je vais à la prison des hommes pour l’écoute : nous sommes 4 animateurs pour cela et nous nous retrouvons avec les autres équipes qui interviennent : la Commission économique pour apporter un supplément absolument nécessaire en nourriture aux étrangers et aux Sénégalais qui ne reçoivent pas de visite de leur famille, et la Commission de réinsertion pour les prisonniers libérables. Aujourd’hui, il y a beaucoup de monde et j’initie à l’écoute une religieuse, nouvelle venue, mais qui a déjà une bonne expérience du travail en prison dans une autre ville.  Et il y a beaucoup de monde à voir avec des cas toujours aussi difficiles à régler. Il va falloir nous organiser davantage pour répondre aux besoins et en particulier trouver quelqu’un pour s’occuper de la commercialisation des objets fabriqués dans les ateliers de la prison. Et quelqu’un d’autre pour trouver du travail pour les femmes et filles des détenus afin de leur permettre de faire vivre leurs familles. Il faudrait aussi quelqu’un de dégagé pour suivre les problèmes de santé et la recherche de médicaments. Il nous faudrait aussi quelqu’un pour aller contacter les ambassades qui abandonnent complètement leurs citoyens.
Je suis ensuite reçu par le Régisseur de la prison, je dois dire sans aucune difficulté. Nous avons d’ailleurs d’excellentes relations avec tout le personnel pénitentiaire. Nous tenons une séance de travail sur plusieurs points : une rencontre générale de sensibilisation sur le SIDA qui sera suivie par des interventions plus ciblées ; la situation des détenus âgés ou malades et les possibilités de grâces ou de réductions de peines ; l’organisation d’une rencontre de tous ceux qui interviennent à la prison pour une meilleure coordination et complémentarité de nos actions ; et les mauvais traitements des personnes arrêtées par la police et le fait qu’on leur prend tous leurs documents personnels si bien qu’ils n’ont même plus les numéros de téléphone pour que nous puissions contacter leurs familles.

A 15 heures, je me retrouve à la prison des mineurs. Nous rencontrons le nouveau directeur, qui nous reçoit très bien. Nous lui présentons nos différentes activités et voyons  quels sont ses projets. Cela se fera au fur et à mesure. Avec nous est venue une Sœur qui tient un dispensaire dans le quartier et qui pourra aider. Puis il y a une rencontre avec le personnel, suivie d’une réunion générale avec tous les jeunes détenus. Nous tenons une réflexion animée et très intéressante avec eux, en attendant que les dentistes arrivent. En effet, des membres de leur Association viennent faire une séance d’éducation à la santé dentaire aux jeunes, et leur remettre brosses à dents et pâte dentifrice. Ils passeront ensuite à la prison des hommes. Mais ce qui nous intéresse surtout, c’est qu’ensuite ils sont prêts à venir donner des soins, par roulement.

Vendredi 1er Février :
Nous nous retrouvons chez les femmes, à la prison. Aujourd’hui, nous partageons la Parole de Dieu : l’Evangile de Jésus à Nazareth (Luc 4, 14-21) : « L’Esprit de Dieu repose sur moi. Il m’a choisi pour annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu’ils vont être libérés, rendre la vue aux aveugles, relever ceux qui sont écrasés, annoncer une année de grâces, de la part de Dieu ». Les femmes sont maintenant à l’aise et ont l’habitude de ce partage. Aussi ont-elles beaucoup de choses à dire. Nous les écoutons avec joie mais aussi avec beaucoup d’attention. A partir de là, nous partageons leurs soucis, leurs souffrances et aussi leurs joies.

Samedi 2 Février :
C’est une journée de récollection pour l’aumônerie des prisons. En plus de nos rencontres et formations ordinaires, nous avons tenu à nous retrouver pour cette journée de réflexion et de partage sur nos engagements et ce temps de prière et de méditation. Nous en avons besoin pour enraciner nos actions dans la foi, mais aussi pour mieux nous connaître et augmenter nos liens d’amitié. Nous nous retrouvons à plus de 40 personnes engagées à différents niveaux, et dans des Commissions diverses, dans 5 ou 6 prisons, de plusieurs églises chrétiennes, et notre partage est vraiment  très riche et très profond. Nous avons commencé par nous présenter longuement pour bien nous connaître. Puis nous avons eu une réflexion sur la dimension religieuse de notre engagement, à partir de la Parole de Dieu. A la suite, un partage sur ces trois questions :  1) Pourquoi nous allons dans les prisons ?    2) Quelles sont les belles choses que nous y avons découvert ?   3) Sur quelle Parole de Dieu nous appuyons notre engagement ?
Dans une étape suivante, nous essaierons de nous retrouver avec les autres personnes et groupes qui interviennent dans chaque prison. Pour le Camp Pénal, c’est prévu pour le 28, en accord avec le Régisseur.

Après la récollection, réunion avec le Bureau pour préparer nos différentes actions de Carême : le soutien des prisons par les enfants et les jeunes, un concert pour obtenir des fonds, et un grand repas le jour de Pâques avec plus de 1000 détenus, hommes et femmes, quelques membres de leurs familles, et tout le personnel des prison. C’est un gros travail. Heureusement que les membres de l’aumônerie sont motivés.


Mercredi 6 Février :
A 9 heures, nous nous retrouvons à la prison des mineurs, avec les différents groupes et ONG qui y interviennent. En effet, nous avons senti le besoin de coordonner nos interventions pour ne pas faire double emploi et éviter la concurrence. Egalement pour pouvoir répondre aux différents besoins des jeunes. Et d’abord pour nous connaître entre nous. La réunion se passe dans une très bonne ambiance et la compréhension mutuelle. Nous faisons un nouveau planning d’activités, sous la direction du nouveau directeur de la prison, qui peut ainsi commencer dans de bonnes conditions.

Rapidement, je pars à la prison des femmes où l’ancienne responsable fait ses adieux. Comme elle a très bien travaillé, il y a beaucoup de monde et la cérémonie est très chaleureuse. Mais nous ne sommes pas inquiets pour l’avenir car nous connaissons bien la nouvelle directrice avec laquelle nous avons déjà bien collaboré dans la prison où elle se trouvait précédemment.

Entre temps, je suis passé à la prison des hommes pour apporter des médicaments. Plusieurs problèmes doivent être réglés. En effet,  nous ne pouvons plus prendre les ordonnances en charge car notre Caisse est vide. Nous cherchons à aider au moins pour les urgences et les interventions chirurgicales. De plus, à l’infirmerie on prescrit surtout des fortifiants. Nous pensons qu’il vaudrait mieux améliorer la nourriture pour tous.
A la sortie, je rencontre un détenu qui a été libéré. Pendant qu’il était en prison, son adjoint lui a pris tout son matériel (il avait 3 magasins). Nous faisons la liste de ce matériel et nous allons chercher un huissier pour régler le problème.

Samedi 9 Février :
Malgré l’importance du Colloque, je vais à la prison des hommes, car c’est ma priorité. Surtout que j’ai été absent ces trois derniers samedis. Nous suivons le schéma habituel. D’abord les nouvelles des uns et des autres : c’est important pour créer un esprit de famille et de soutien mutuel. Puis nous partageons la Parole de Dieu, comme nous l’avons fait avec nos étudiants ce matin, car nous voulons en faire la base de toute notre vie. Nous avons mis en place un schéma pour cela. Les prisonniers sont maintenant bien habitués à cette démarche. A la suite, nous voyons les activités à venir et les problèmes à régler. Le premier, c’est l’arrêt de la distribution de savon et de pain depuis plusieurs mois. Et le problème des malades.
Aujourd’hui, une jeune religieuse nigériane m’accompagne. Elle retrouve des détenus qu’elle a connus dans l’Est du pays, à Tambacounda. Elle va continuer à venir avec nous chaque samedi ; cela va renforcer notre équipe.

Mercredi 13 Février :
Aujourd’hui, Mercredi des Cendres. Comme d’habitude, je vais à la prison le matin, pour l’écoute des prisonniers, la réinsertion  et les rencontres avec les différents services pour tous les problèmes et questions qui se posent.
Ce n’est pas facile de travailler car tout le personnel est convoqué pour un contrôle. En effet, on vérifie la présence effective de chacun au travail et cela pour pallier aux fraudes   :  des personnes qui perçoivent un salaire sans venir travailler  ;  des fausses inscriptions  ;  des gens qui viennent toucher le salaire d’agents décédés. Le Gouvernement actuel a décidé de clarifier les choses, de refaire et d’informatiser le fichier des fonctionnaires, ce qui est une très bonne chose.

Samedi 16 Février :
A la prison des hommes, nous parlons bien sûr du Carême chrétien. Surtout que les musulmans les regardent et leur posent beaucoup de questions. L’échange est très intéressant et nous permet d’approfondir les choses. Puis nous passons aux nouvelles. Un des détenus a perdu sa mère. Il a demandé l’autorisation d’aller assister (accompagné) à l’enterrement. Nous attendons la réponse, sans trop d’espoir. Et nous préparons la libération  prochaine d’un autre détenu. Le travail n’est pas toujours facile. Nous sommes des bénévoles et prenons sur notre temps, mais il arrive souvent que l’on nous dise : ce n’est pas possible, ou, il y a un imprévu, revenez la semaine prochaine ! Avant-hier, deux animatrices sont venues pour une rencontre, mais à 16 heures on leur a dit que le repas de midi n’était pas encore prêt !

Mercredi 20 Février :
Nous allons d’abord à la prison des femmes où une nouvelle directrice vient d’arriver. Mais nous nous connaissons déjà et nous pensons que nous allons pouvoir bien travailler ensemble. Nous abordons un certain nombre de problèmes : en particulier, l’écoute des femmes et la préparation de leur sortie, des rencontres éducatives et des rencontres religieuses entre chrétiennes et musulmanes, la commercialisation de la production des ateliers, etc… Nous allons pouvoir améliorer nos activités.

Je continue chez les hommes : contacts avec l’administration et les différents services (greffier pour les libérables, le suivi des ateliers de productions, les problèmes de santé et de nourriture). Il ne reste pas beaucoup de temps pour l’écoute des détenus qui le demandent. On continuera la semaine prochaine. Mais je ne pars pas pour autant m ; je reste un long moment à attendre avant de pouvoir rencontrer le directeur, car les choses doivent être décidées au niveau supérieur !
Après cela, séance de travail avec les différents animateurs et animatrices pour faire le point et voir comment nous organiser.

Je repars ensuite à la banque pour récupérer l’argent envoyé à des prisonniers, mais j’arrive trop tard, elle est fermée.

Vendredi 22 Février :
Programme habituel. Le matin, à la prison  des femmes nous évaluons deux choses : comment avons-nous vécu l’année de la foi jusqu’à maintenant. Après un temps d’approfondissement de la foi, il est important de passer aux actions, en prison comme ailleurs. Le temps du Carême est une bonne occasion pour cela. Nous voyons comment nous l’avons vécu jusqu’à maintenant. Le partage est très riche et animé, et grâce à la compréhension de l’administration nous dépassons largement le temps prévu.
A la sortie, avec les animatrices, nous faisons le point de notre action de Carême en faveur des prisonniers.
Puis je rencontre le responsable d’une organisation de micro-crédits. En effet, nous voudrions en faire bénéficier les femmes des détenus, pour qu’elles puissent faire vivre leur famille pendant que leur mari est en prison.

Samedi 23 Février :
A la prison des hommes. Avec les prisonniers nous préparons la fête de Pâques. La messe sera présidée par le Nonce, mais nous voulons que ce soit la fête pour tous, musulmans comme chrétiens. Nous voulons aussi faire venir les femmes des détenus et quelques membres de leurs familles (ceux de la région de Dakar). Cela fera près de 1.500 personnes. Nous inviterons les autorités et les ambassadeurs pour qu’ils puissent se rendre compte eux-mêmes des conditions de vie difficiles de leurs citoyens. Nous espérons que cela les motivera à agir. Mais nous voulons surtout donner la parole aux détenus par une intervention, des questions aux autorités, des poèmes, des scènes de théâtre, etc… Chaque ethnie et chaque pays présentera ensuite sa culture par des chants et danses en tenue traditionnelle. Nous voulons que ce soit la fête pour tous. Vous en recevrez le compte-rendu.
Nous continuons la rencontre à la prison par le partage d’Evangile. Puis nous faisons la liste des étrangers par pays. En effet, nous voulons faire le tour des ambassades pour qu’elles s’occupent de leurs citoyens. Nous terminons par les questions diverses, suivies de la prière et des contacts personnels.

Lundi 25 Février :
Je vais rencontrer le directeur d’une société de la place qui me remet un chèque pour le fonctionnement d’un des ateliers que nous voulons lancer à la prison des hommes. Bien sûr, je le remercie. Je pars ensuite  à la prison pour l’écoute des détenus.

Mercredi 27 Février :
9 heures. Rencontre à la prison avec les autorités. Nous voyons aussi le responsable des ateliers pour organiser la vente des objets, fabriqués par les détenus, lors de la fête de Pâques. Puis, activités ordinaires : passage à l’infirmerie, à la cuisine, dans la cour, etc… Et nos rencontres personnelles pour l’écoute et pour la réinsertion

Samedi 2 Mars :
Rencontre à la prison des hommes, avec toutes les questions dont je vous parle chaque jour. Mais nous rencontrons un certain nombre de difficultés pour les mobiliser pour la fête de Pâques. Nous leur avons proposé de faire des pièces de théâtre pas seulement pour poser leurs problèmes mais aussi pour montrer les bonnes choses qu’ils vivent entre eux. Et également que chaque pays ou groupe montre sa culture à travers chants, danses, poèmes….  D’abord, ils demandent de l’argent… que bien sûr nous n’avons pas. Ensuite, ils disent qu’il n’y a pas d’entente entre eux. Enfin, que c’est trop difficile. En fait, comme le leur dit une animatrice, ils ont de la peine à prendre leurs responsabilités et à prendre leur vie en main. Pour tous leur problèmes, ils s’appuient sur nous et nous demandent d’agir à leur place. Bien sûr, nous n’acceptons pas. En les aidant au maximum, nous tenons surtout à les responsabiliser, mais ils ont été si souvent humiliés et manipulés qu’ils ont de la peine à le faire. Ils sont trop découragés et démotivés pour agir. Cependant, au fur et à mesure, des volontaires se manifestent et nous arrivons à organiser les choses. Maintenant, il va falloir passer à la pratique : l’administration et le service social sont d’accord. Donc, nous pensons que les choses vont se faire.


1. ANIMATION DES PRISONS A DAKAR
Au Sénégal, l’institution carcérale n’a pas suivi les évolutions de la société. En dépit de l’explosion démographique et d’une forte augmentation de la délinquance, aucun centre pénitentiaire n’a été construit depuis l’Indépendance du pays en 1960. Le Sénégal compte 37 lieux de détention (dont 32 maisons d’arrêt et de correction (MAC), deux camps pénaux, une maison centrale d’arrêt et un pavillon spécial) qui accueillent environ 17 000 prisonniers.
Selon  la Commission africaine des droits de l’homme et du peuple (DDHP), « beaucoup de personnes en détention préventive passent illégalement trop de temps dans les lieux de privation en attendant leur jugement ». En 2008, la DDHP a recensé 31 personnes ayant passé dix ans de détention provisoire avant d’être acquittées. Les étrangers arrêtés croupissent souvent dans les cellules du Commissariat Central de Dakar des mois durant, en attendant leur reconduction à la frontière.
 « Les détenus sont souvent des victimes de la double peine », En plus de l’enfermement qu’ils subissent, les conditions sanitaires précaires causent de nombreuses maladies (VIH, Tuberculose, Malaria). Face à ces problèmes, les visites médicales ne sont pas assurées et les médicaments manquent cruellement.
Les prisons sont très souvent surpeuplées. Avec 1500 détenus, celle de Rebeus compte quatre fois plus de détenus qu’elle n’en devrait. Les cellules collectives réunissent jusqu’à 180 personnes. Violence et promiscuité sont le quotidien des prisonniers sénégalais. « Les conséquences du surpeuplement des prisons sont physiques, sociales et économiques, parce qu’elles causent le stress, l’énervement,l’aggravation de certaines maladies par manque d’aération et d’hygiène (toilettes collectives dans les cellules elles-mêmes fermées pour la nuit…)  ». En raison du surnombre la malnutrition sévit, même si l’on vient d’augmenter la pension alimentaire de 350 à 600 francs CFA par prisonnier et par jour, tout compris (moins d’un Euro).La faim et les épidémies ont parfois raison d’eux avant même qu’ils ne soient jugés.
 « Les détenus sont rarement vus comme des citoyens, mais comme des personnes dangereuses, à punir et non pas à (ré)éduquer, et qui n’ont pas droit au respect, ayant perdu leur dignité »
Présentation de notre équipe                                                                                                           
Nous travaillons à Dakar au Camp Pénal des hommes (détenus déjà condamnés), à la Maison d’Arrêt des Femmes (en attente de jugement) et au Centre des mineurs. Nous avons mis en place différentes commissions de manière à répondre le mieux possible aux besoins des prisonniers. En effet, dans le passé, il n’y avait qu’une petite équipe autour d’un prêtre qui allait dire la messe chaque semaine pour les catholiques. Mais nous avons senti la nécessité de soutenir les détenus dans toute leur vie et de répondre au maximum aux besoins de tous, sans distinction . Nous avons donc fait appel aux personnes volontaires et nous sommes actuellement une cinquantaine de bénévoles qui travaillent dans les différentes commissions suivantes.

1.      L’ASSISTANCE JUDICIAIRE
2.      L’ASSISTANCE MATERIELLE ET SOCIO-ECONOMIQUE
3.      L’ASSISTANCE SPIRITUELLE ET LA FORMATION CONTINUE
4.      LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET LA REINSERTION
5.      LA CULTURE ET LA COMMUNICATION
6.      LA COMMISSION SANTE

Nous voulons ainsi répondre aux besoins divers de tous les détenus, dans tous les domaines et à tous les niveaux.
1.D’abord leurs conditions de vie et leur nourriture.
Cela implique un très lourd travail de la part de la Commission économique et sociale pour trouver des fonds, en particulier nourriture, habits et couvertures, produits d’entretien et d’hygiène, médicaments etc. Nous organisons pour cela des activités génératrices de revenus (AGR) et faisons appel à la générosité de nos amis et voisins. Nous devons dire que ces personnes sont vraiment généreuses, ce qui fait que nous arrivons à travailler, d’abord en comptant sur nos propres forces et en nous appuyant sur les possibilités locales. Mais bien sûr nous ne pouvons pas satisfaire tous les problèmes matériels, et d’ailleurs nous ne le voulons pas. C’est au gouvernement et à l’administration pénitentiaire de prendre leurs responsabilités dans ce domaine, mais un soutien est très important.

2. Au niveau santé, les besoins sont énormes. A l’infirmerie il n’y a pas de médecin, mais seulement un infirmier, et pratiquement pas de médicaments. Nous cherchons donc à nous procurer des médicaments en ville, et à trouver des médecins qui peuvent venir faire des consultations régulières bénévolement. Nous avons lancé le même type d’activités pour les soins dentaires. Nous sommes appelés régulièrement pour prendre en charge les kits nécessaires pour les opérations chirurgicales (environ 100 euros à chaque fois). Nous organisons aussi des rencontres de formation à la santé avec les détenus : hygiène, prévention, éducation sanitaire et formation par rapport aux maladies : sida, tuberculose etc.

3. Pour l’assistance judiciaire : depuis l’arrestation jusqu’aux différents jugements (appel, obtention de libération conditionnelle, de réduction de peines,  de grâce etc.). Beaucoup de détenus n’ont pas les moyens de se payer un avocat. Nous avons contacté un certain nombre d’avocats qui acceptent de prendre en charge bénévolement l’un ou l’autre détenu dont le dossier est plus délicat et difficile, et qui n’a ni ressource ni soutien.Il n’est pas rare qu’après avoir fait plusieurs mois et même plusieurs années, en attente de jugement, on s’aperçoive que l’accusé est innocent et qu’il a été arrêté injustement.

4. Nous avons également mis en place un soutien psychologique à travers des rencontres personnelles et des séances d’écoute régulières. Et une animation culturelle : projections de film, conférences suivi de débats, alphabétisation et formations diverses.

5.La réinsertion
Nous préparons les détenus à leur sortie par une série de rencontres, pour voir comment ils vont pouvoir recommencer leur vie et travailler à l’extérieur. Nous préparons également leurs familles à les accueillir, ce qui n’est pas toujours facile. Nous cherchons enfin à mettre en place une réconciliation entre les détenus et leurs victimes. Mais cela est beaucoup plus difficile et nous n’y arrivons pas toujours. Les grandes distances ne facilitent pas non plus les contacts.

6.Le soutien aux familles :
Quand les détenus sont en prison, ceux qui souffrent le plus en fait, ce sont leurs familles. En effet quand le chef de famille est en prison, sa femme et ses enfants n’ont souvent plus rien pour vivre. Ils ne peuvent plus payer leur loyer et sont chassés de leur maison. Les enfants sont renvoyés de l’école car ils ne peuvent pas se procurer les fournitures et payer les cotisations diverses. Il n’y a pas d’argent pour leur acheter des médicaments et les soigner en cas de maladie. Nous avons mis en place une organisation pour trouver du travail aux femmes, filles et nièces des détenus, selon leur compétence, pour qu’ils puissent avoir le minimum pour vivre.
Dans ce domaine, une autre chose qui nous préoccupe, c’est le divorce. Un certain nombre de femmes abandonnent leur mari quand  il se retrouve en prison. Nous essayons donc de parler avec ces femmes de détenus pour maintenir la stabilité des familles.

7.La formation professionnelle :
Dans la prison, il y a déjà des petits ateliers pour des détenus formés. Cela les occupe d’une façon utile et leur fournit un petit pécule, même s’ils ont parfois de la peine à récupérer leur argent à la sortie. Nous cherchons à faciliter les commandes et la vente de leurs produits. Mais pour nous poursuivons surtout un autre but. En effet dans les prisons, il y a un certain nombre de détenus qui ne connaissent pas de métier. Nous voudrions donc utiliser le temps qu’ils passent en prison pour leur donner la chance de se former, et ainsi trouver un travail à la sortie. Nous avons demandé à une association amie (Appel détresse) de nous trouver le petit outillage nécessaire pour démarrer cette action. Ils vont nous envoyer un container et la ministre de la justice nous a déjà promis l’exonération, pour ne pas avoir à payer les frais de douane. Nous n’avons pas les moyens de payer des formateurs pour ces ateliers que nous voulons lancer, mais des détenus compétents sont déjà volontaires pour former les autres prisonniers, par petits groupes et par métier.Pour démarrer nous pensons à 11 ateliers : soudure, électricité, petite mécanique générale, mécanique moto, reliure, sérigraphie, menuiserie, couture, sculpture, informatique et œuvres d’art (statues, tableaux, etc…). La prison prendra en charge l’électricité et l’eau ainsi que tous les produits et matériels de nettoyage et l’entretien des ateliers, de même que le mobilier nécessaire. Ce qui est déjà un très gros effort, vus la situation économique du pays et le budget plus que limité pour le secteur pénitentiaire. Nous voulons commencer  par le Camp Pénal situé à Dakar, quartier Liberté 6. D’abord parce que c’est une prison où les  détenus sont là pour une durée assez longue, ce qui leur donne le temps de se former suffisamment  et sérieusement.

8.La communauté chrétienne
Nous avons aussi des rencontres spécifiques avec les chrétiens pour des partages d’Evangile, la catéchèse et la célébration de l’Eucharistie. Ces chrétiens se retrouvent en plus entre eux à l’intérieur  de la prison les dimanches pour une célébration de la Parole et pour des prières et des formations religieuses. Mais nous parlons aussi avec eux de la vie en prison et des autres problèmes qui se posent, de même que de la vie du pays et du monde tout entier. En effet, il nous semble important qu’ils restent ouverts à ce qui se passe dans le monde. Nous cherchons avec eux comment ils peuvent être le sel de la terre et la lumière du monde à l’intérieur de la prison, en se soutenant mutuellement et en faisant de la vie en prison une occasion  de réflexion et même de conversion. Ces chrétiens se retrouvent en plus entre eux à l’intérieur  de la prison les dimanches pour une célébration de la Parole, pour des prières et des formations religieuses et des rencontres amicales.

De nombreux détenus nous disent, au moment de leur libération, combien ce séjour en prison a été pour eux un temps de réflexion, de reprise en main et le début d’une vie nouvelle.Voici ce que m'a écrit un prisonnier à sa sortie :" J'ai acquis une autre dimension spirituelle dans cette prison. Me voilà libre à présent et je voudrais mettre à profit mon temps libre au service des nécessiteux, à savoir faire partie des gens qui soient capables de rendre visite au nom de Justice et Paix  aux malades et aux détenus. Je suis disponible pour accomplir la catéchèse. Pour cela, je reste à votre entière disposition ».

Nous avons aussi des rencontres avec les responsables religieux et les croyants musulmans et nous travaillons en coordination avec les autres groupes chrétiens. A Noël et à Pâques, nous célébrons ces  fêtes, de même que les musulmans célèbrent les leurs, en prison. Nous  responsabilisons chaque fois une paroisse à tour de rôle pour qu’ils trouvent les fonds nécessaires pour cela et qu’ils envoient une de leurs chorales pour animer la fête. Après l’Eucharistie pour les chrétiens, les détenus musulmans viennent nous rejoindre pour un repas suivi de partage, de chants, de danses et de théâtre préparés par les détenus eux-mêmes. C’est l’occasion, dans les discours, de faire comprendre un certain nombre de choses, mais aussi de donner la parole aux détenus devant les autorités et tous les invités.
9.Un travail en commun
Pour toutes ces activités, nous travaillons toujours en coordination avec  les responsables, le service social et le personnel de la prison. Nous rencontrons également régulièrement les techniciens et conseillers du ministère de la Justice et de l’administration pénitentiaire et la ministre elle-même. Et aussi  la direction des droits humains, les Assises nationales, la Société civile et un certain nombre d’ONG. Mais nous n’arrivons pas encore à travailler en coordination avec les autres ONG intervenant en prison, certaines associations voulant garder jalousement leur indépendance et certains responsables préférant « diviser pour régner », et profiter des uns et des autres, au détriment des détenus. Ce n’est pas toujours simple !
Nous rencontrons aussi régulièrement les chefs de chambre, pour un temps de discussion et de prises de décision. Généralement le personnel pénitentiaire traite les détenus d’une façon humaine. Le problème étant plutôt celui de la recherche de l’argent et de la corruption. C’est surtout dans les commissariats, au moment de l’arrestation, que les personnes sont frappées et traitées sans respect.

10.La formation
Nous sommes tous des bénévoles et cette action demande des connaissances. Nous cherchons donc à utiliser nos diverses compétences au maximum et nous organisons des formations régulières, en particulier sur les questions judiciaires et la formation à l’écoute. Nous avons aussi des temps de prières et de récollection entre nous pour reprendre notre action dans la prière et au niveau de la foi, et pour voir comment continuer  l’action du Christ dans les prisons : « J’étais prisonnier et vous m’avez visité… Tout ce que tu fais au plus petit de tes frères, c’est à moi que tu le fais « (Matthieu 25, 36) ». « L’Esprit de Dieu repose sur moi, Il m’a choisi pour apporter la Bonne Nouvelle de l’Evangile aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu’ils vont être délivrés, que les aveugles vont voir et que les écrasés seront libérés pour annoncer une année de grâce de la part du Seigneur. C’est aujourd’hui que cette Parole de Dieu se réalise » (Luc 7, 14-21). Comme le disait une animatrice aux prisonniers le jour de Noel : »Il ne faut pas nous remercier d’être venus vous voir. En vous, nous avons rencontré Jésus Christ. C’est nous qui devons vous remercier !»

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire